Tunisie-Armée nationale : Interférences quand tu nous tiens

«Il faut mettre l’armée nationale à l’abri des tiraillements partisans», disait, jeudi 31 juillet dernier, le porte-parole de la présidence de la République, Adnane Mansar, en rendant compte de la rencontre qu’avait eue le jour même le président provisoire, Moncef Marzouki, avec le chef d’Etat-major de l’armée de terre démissionnaire, Mohamed Salah Hamdi.

Il ne croit pas si bien dire. L’Armée nationale, qui s’est forgée «une foi républicaine» dès l’aube de l’indépendance grâce à l’engagement en ce sens des officiers supérieurs patriotes qui avaient présidé à ses destinées, ne s’est jamais départie de sa fonction essentielle d’être la protectrice de la patrie, le dernier rempart contre les ennemis de l’intérieur comme de l’extérieur qui chercheraient à porter atteinte aux acquis de la nation.

Pas particulièrement appréciée

Il faut reconnaître que l’armée n’était pas particulièrement appréciée par les hautes autorités du pays en raison de cet engagement. Le père de l’indépendance, Habib Bourguiba, s’en méfiait depuis ce mois de décembre 1962 quand fut découvert le complot dans lequel étaient impliqués de jeunes officiers qui lui reprochaient d’avoir jeté l’armée comme chair à canon dans la bataille de Bizerte sans moyens et sans stratégie claire.

Ainsi, tout au long de son règne, elle n’a eu droit qu’au strict nécessaire. Elle fut marginalisée et, à l’occasion, utilisée pour mater les émeutes populaires et rétablir l’ordre, ce qui n’était pas à proprement parler son rôle.

Pourtant, officier supérieur lui-même, Ben Ali ne portait pas non plus l’armée dans son cœur. Il était habité par la crainte de subir ce que lui avait fait subir à son prédécesseur et il n’a eu de cesse de confiner ses frères d’armes les plus méritants dans des emplois civils pour mieux les avoir à l’œil. Il avait même créé de toute pièce l’affaire de Baraket Assahel pour mettre hors d’état de nuire les officiers qu’il soupçonnait de pouvoir contester son autoritarisme. On est allé jusqu’à le rendre responsable du crash d’hélicoptère qui avait décapité l’armée en avril 2002 avec la mort d’officiers supérieurs parmi les plus gradés, dont le général Abdelaziz Skik, chef d’Etat-major de l’armée de terre. Ce qui ne fut jamais confirmé.

Par Raouf Ben Rejeb

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