Tunisie : Le président de la LTDH entendu au sujet du projet de loi anti-terroriste

Le président de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, Abdessattar Ben Moussa, trouve “encore insuffisante et vague” la qualification de crime terroriste dans le projet de loi en cours d’examen en commission, ce qui, met-il en garde, élargit considérablement le champ de l’interprétation, au risque de “diluer” le concept même d'”acte terroriste” et de mal définir le crime terroriste.

Dans une déclaration de presse au sortir d’une audition par la commission de législation générale et celle des droits et libertés à l’Assemblée nationale constituante, Ben Moussa a souligné que le projet de loi sur la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent doit “garantir l’adéquation entre la lutte contre le crime terroriste et le respect des droits de l’Homme”.

Il a dit avoir plaidé, lors de son audition, pour la création d’un pole judiciaire rattaché au Tribunal de première instance de Tunis et spécialement en charge des crimes terroristes, notamment pour assurer la protection des témoins et garantir l’efficacité et la célérité du jugement des affaires terroristes, soulignant la nécessité de veiller à réunir les conditions d’un procès équitable, notamment en termes de débat contradictoire, de publicité des audiences et de garantie des droits de la défense.

Il trouve aussi le texte en cours d’examen “plus répressif que dissuasif, “au détriment de l’impératif d’accorder le plus grand intérêt à la prévention du terrorisme dans les établissements scolaires, les maisons de culture et les mosquées, notamment au moyen de la lutte contre les idées destructrices et l’apologie de la violence et de la haine. Ben Moussa a en outre réaffirmé l’opposition de la LTDH à la peine de mort, faisant remarquer que le maintien de cette peine dans le droit tunisien pourrait être invoquée comme prétexte pour ne pas extrader des terroristes présumés réfugiés à l’étranger.

Lui aussi entendu par les deux commissions parlementaires au sujet du même texte, le batonnier du Conseil de l’ordre des avocats Mohamed Fadhel Mahfoudh, a souligné la nécessité de faire en sorte que le texte en question met en place des dispositions permettant les recours en invalidation des jugements, au nom du principe du procès équitable.

Il a déclaré avoir fait un certain nombre de recommandations en faveur d’un rôle actif de l’avocat aux différentes étapes des investigations et de l’instruction et de l’implication du Barreau dans la lutte anti-terroriste, outre la consécration des garanties de la défense et le respect du secret professionnel, avec l’assurance qu’il ne peut être levé que dans des cas exceptionnels et sur autorisation préalable du Conseil de l’ordre.

Mahfoudh a surtout insisté sur le fait que le nouveau texte appelé à se substituer à la loi de 2003 doit impérativement être en harmonie avec le corpus universel des droits de l’Homme et respectueux des droits fondamentaux de la personne.