La création du Fonds de la dignité au profit des victimes de la dictature a déclenché une vive polémique et figurait à la Une des quotidiens tunisiens parus mardi 31 décembre. Elle a soulevé des interrogations sur la manière dont l’article y afférent a été ajouté à la loi de finances 2014.
Ladite loi a été adoptée, tard dans la nuit de dimanche à lundi, par l’Assemblée nationale constituante(ANC) avec 99 voix pour, 10 contre et 14 abstentions. L’ajout de l’article portant création du Fonds de la dignité au profit des victimes de la dictature avait suscité une vive polémique lors de sa discussion par les députés. Cette proposition a été approuvée par 87 constituants, et rejetée par 13 autres contre 19 absentions.
« Un poignard dans le dos » titre « La Presse » dans son édition d’aujourd’hui qui précise en sous titre « Les constituants nahdhaouis imposent leur volonté et se partagent le butin de la révolution.
Tollé général ». « Sur les 217 constituants que compte l’ANC issue des élections du 23 octobre 2011, seuls 87 constituants sont pour la création de ce Fonds et n’ont pas hésité à bafouer la loi de finances 2014 pour y ajouter un article auquel les concepteurs du budget pour le prochain exercice n’ont jamais pensé », ajoute le journal en substance.
Sur ce point, le ministre des Finances, Elyes Fakhfakh, avait estimé que le présent article était inadéquat quant à la forme, arguant de l’existence de lois régissant la création des fonds spécifiques. « Halte à l’imposture !» titre, pour sa part, le journal en langue arabe « Le Maghreb » qui écrit :« En Tunisie, il y a des parties qui veulent remporter une victoire dans une bataille qu’elles n’ont pas menée et qui veulent aujourd’hui en cueillir les fruits non seulement sur le plan moral mais au niveau matériel aussi ».
Et Le Maghreb d’ajouter qu’il est incompréhensible que les députés du parti au pouvoir se permettent tard dans la nuit, inopinément et sans dialogue préalable, de faire passer un amendement qui « accorde à des milliers de leurs partisans des avantages pécuniaires alors que le pays compte des centaines de milliers de chômeurs et environ deux millions de personnes sous le seuil de la pauvreté ».
« Le Fonds de la dignité : projet tramé la nuit, d’une valeur d’un milliard de dinars » titre « Al Chourouk » à la Une qui s’interroge si ce Fonds constitue un pas juridique (vers la consécration de la justice transitionnelle) ou une réparation pour les islamistes ? « ANC : Hold-up à minuit passé » ironise « Le Quotidien » qui relate les « violentes protestations » contre cet article y compris par le bloc Ettakatol, malgré un vote à une majorité confortable, juge le journal.
Pour sa part, « Le Temps » rapporte les propos du chef du gouvernement provisoire Ali Larayedh lors du débat sur le projet de la loi de finances 2014 qui a indiqué que « c’est un sujet très délicat qui nous permet de nous réconcilier avec le passé et de colmater les brèches. Le fonds devra démarrer au début de l’année 2014 ».
Traitant du même sujet, « Assabah » estime que le Fonds provoque une fissure entre Ennahdha et Ettakatol. Assabah rapporte les propos du député Jalel Bouzid (Ettakatol) qui a exprimé l’indignation de son parti de la manière avec laquelle ont été présentés les nouveaux articles qui ont donné lieu à des dérives.
D’après lui, les propositions des députés doivent être en harmonie avec la philosophie générale du projet proposé par le gouvernement. Le même journal cite le député d’Ennahdha Néjib Mrad pour qui cette affaire est « montée de toutes pièces » d’autant, a-t-il argumenté, qu’Ennahdha a respecté les dispositions juridiques en vigueur pour présenter cette proposition.