En prélude aux JTC 2013 qui s’ouvrent demain jeudi 22 novembre, un colloque scientifique international “D’art et de religion” se tient depuis le 19 novembre et s’est poursuivi jusqu’à aujourd’hui avec au programme une série d’interventions données par des universitaires, maîtres érudits, artistes et chercheurs tunisiens, marocains, sénégalais, jordaniens, saoudiens, égyptiens et algériens.
Les témoignages étaient différents, en parlant des rapports de complémentarité ou d’antagonisme entre la religion et l’art dans ses multiples expressions et formes. L’art et la religion sont ils des ennemis? Est ce que l’art contemporain est source de provocation? Existe-il des relations conflictuelles entre ces deux notions?
Dans sa communication “Art et religion, entre symbiose et antinomie”, le professeur Yadh Ben Achour a mis en exergue les liens étroits entre ces deux concepts, expliquant que si les religieux et les politiciens avaient cherché à tout prix d’exclure les artistes, plusieurs créateurs comme Botticelli ou encore Leonard Da Vinci, avaient tenté à travers leurs oeuvres de libérer l’art, des interdits religieux.
A ce propos, le conférencier a évoqué la scission profonde entre l’art et la religion en Islam, ajoutant que de multiples actes de violence ciblant les espaces culturels et les artistes ont eu lieu, à l’époque contemporaine. “Par exemple, en Tunisie, des agressions ont été commises contre des artistes plasticiens au palais El Abdellia à la Marsa et des cinéastes à la salle CinéAfric’Art à l’Avenue Habib Bourguiba à Tunis”, a rappelé Yadh Ben Achour.
Selon Hayat Amamou, universitaire tunisienne, spécialiste de l’histoire de l’islam, l’image du coran telle que représentée dans la calligraphie arabe, est unique. L’art de la calligraphie arabe a-t-elle relevé est devenu un “art officiel” qui s’est développé pour tirer ses lettres de noblesse du sacré en représentant le langage coranique. En effet, cet art par excellence a été le moyen pour les artistes musulmans à présenter des oeuvres sans déranger sinon tomber en conflit avec les théologiens qui ont interdit certaines autres formes artistiques telles que la photographie et la sculpture qu’ils considèrent une sorte d’apostasie.
Elle a, par ailleurs, fait savoir que la calligraphie arabe a trouvé son esthétique et sa valeur en puisant des versets coraniques dans leur notion de sacré. C’est ainsi d’ailleurs que le calligraphe a réussi à trouver sa place et à susciter l’admiration et le respect des hommes de religion qui ont une vision exceptionnelle pour cet art qui s’est épanoui pour devenir une forme artistique par excellence de la civilisation islamique.
Ceci n’est cependant pas le cas pour le cinéma ou la photographie. Dans sa communication sur le thème “L’interdiction de l’image dans l’lslam, la grande hérésie”, le critique d’art Habib Bida a relevé qu’il n’existe pas dans les versets du coran ce qui interdit l’art, tout comme il n’existe pas ce qui autorise l’incarnation du sacré”. Sur ce point, a-t-il ajouté, les théologiens ne sont pas d’accord à ce sujet, car certains considèrent que l’émergence des arts en général est le résultat de la restriction.
Or, pour Youssef Seddik, cette illusion est due à l’absence d’une vraie et profonde lecture du Coran. Dans son intervention intitulée “re-présenter est-il la seule raison?”, le conférencier a estimé que l’Islam n’a jamais posé de restriction pour l’exercice libre d’une expression artistique. Cela dit, les rapports entre l’art et la religion demeurent un sujet d’actualité brûlante. Ce sujet, de l’avis unanime des participants, ne cessera de faire couler beaucoup d’encre car plusieurs ne sont pas parvenus à saisir le secret de l’art et la beauté de la religion.