ARTICLE 19 appelle les autorités tunisiennes à retirer les accusations portées contre des rappeurs et une journaliste, se disant profondément préoccupée “face à la détérioration des libertés en Tunisie”.
Dans une Déclaration rendue publique par son bureau à Tunis, dont une copie est parvenue, jeudi, à l’agence TAP, Article 19 demande l’ouverture d’une enquête sur les incidents qui ont suivi le procès du rappeur Alaa Yakoubi (“Weld El 15”), le 13 juin 2013, et les « attaques violentes » à l’encontre des journalistes et de ceux qui protestaient contre la décision du Tribunal, après le prononcé du verdict d’emprisonnement contre “Weld El 15”.
L’organisation internationale des droits humains déclare suivre « avec une profonde préoccupation » l’affaire des rappeurs Ayman Fekih et Mustapha Fakhfakh et celle de la journaliste Hend Meddeb, inculpés suite aux « échauffourées » avec la police dans le cadre d’un mouvement de soutien à “Weld El 15”, lors du procès de ce dernier.
Les deux rappeurs et la journaliste devront comparaître devant le juge d’instruction, le 7 octobre prochain, pour outrage à un fonctionnaire public (art 125 du code pénal) et outrage public à la pudeur (art 226).
La journaliste franco-tunisienne, Hend Meddeb, avait « préféré » quitter le pays avant son audition par le procureur de la République qui devait avoir lieu le 17 juin, par « crainte pour son intégrité physique et par manque de confiance en la justice » de son pays, avait-elle expliqué dans une lettre ouverte le 16 juin.
ARTICLE 19 dénonce, également, la condamnation de “Weld El 15”, le 13 juin, à deux ans de prison ferme pour avoir chanté une chanson jugée insultante pour la police. « La peine infligée à Yakoubi, est totalement injustifiée et disproportionnée par rapport à la nature de l’acte commis », estime l’organisation qui se dit consternée de « l’imposition de peines sévères fondées sur des dispositions du code pénal dans des affaires relatives à la liberté d’expression, alors même que le Décret-loi 115 (…), dont les dispositions sont plus conformes aux normes internationales, pourrait trouver à s’appliquer ».
Par ailleurs, ARTICLE 19 exprime son profond regret quant au verdict (quatre mois et un jour de prison) prononcé le 12 Juin 2013 à l’encontre de deux ressortissantes françaises et une allemande appartenant au groupe Femen, pour avoir manifesté seins nus à Tunis, estimant que “le tribunal aurait dû tenir compte du fait que l’expression en question était de nature politique”.
La Directrice exécutive d’ARTICLE 19, Agnès Callamard, considère, dans cette même Déclaration, que « Ces procès et agressions sont en réalité une attaque contre la liberté d’expression, de la presse, et de la création, libertés qui ont été durement acquises par les Tunisiens après le 14 Janvier et qui sont garanties par les traités internationaux ». Et d’ajouter « On assiste ici à une violation flagrante des engagements internationaux de la Tunisie en ce qui concerne les droits humains ».