Tunisie – Politique : Rached Ghannouchi mis à nu !

«Ne vous fiez pas à votre victoire d’aujourd’hui, Ennahdha était il y a quelques années enfouie sous les décombres, si ce n’est que le peuple voulait cette religion qu’elle porte. Les Laïcs sont encore là contrôlant les médias, l’économie, l’Administration et l’armée. Nous ne pouvons nous fier, ni à l’armée ni à la police. Que vous soyez nombreux ne doit pas vous donner de l’assurance. Les autres (les laïcs) détiennent toutes les structures de l’Etat »…

Doit-on expliquer les grands mouvements de mutations ainsi que les nouvelles nominations qui ont eu lieu ces derniers mois autant au ministère de l’Intérieur qu’à celui de la Défense nationale par la position du premier responsable du parti Ennahdha qui s’exprime clairement lors de cette rencontre filmée à son insu au mois d’avril dernier avec des fidèles dont des salafistes ?

Les propos du chef du parti Ennahdha ont été condamnés par Mohamed Bennour, porte-parole du parti Ettakattol, principal allié du parti islamiste qui a déclaré sur les ondes de Mosaïque FM : « ces déclarations sont dangereuses et notre parti est catégoriquement contre. Nous sommes très rassurés en ce qui nous concerne que l’armée et la police ne soient pas sous l’emprise des partis. Et nous considérons le salafisme djihadiste très dangereux et en totale contradiction avec la démocratie ».

Rached Ghannouchi n’est pas de cet avis, puisqu’il rassure les salafistes en leur disant : « Aujourd’hui, nous avons un ministère des Affaires religieuses et pas seulement une mosquée et nous avons un gouvernement bien à nous. Je voudrais rassurer les jeunes salafistes et les inciter à plus de patience. Celui qui veut lancer une radio a désormais la possibilité de le faire, celui qui veut une télévision y serait d’autant plus autorisé. Vous pouvez organiser des camps, inviter des prêcheurs. Tout cela vous est permis, alors pourquoi autant d’impatience ? ».

Rached EL Ghannouchi prévient ses disciples sur le risque de se montrer trop confiants quant aux réalisations politiques d’Ennahdha citant à ce propos l’exemple algérien: « Rappelez-vous l’Algérie, nous étions sûrs qu’il n’y aurait pas de retour en arrière, nous avions les épaules solides avec 80% des voix. Il s’est avéré que notre appréciation était fausse. Les mosquées ont été mises de nouveau sous l’autorité des laïcs et les islamistes sont devenus des parias. Ceci pourrait aussi bien arriver en Tunisie si nous ne sommes pas vigilants. Car l’élite laïque en Tunisie est plus puissante que celle d’Algérie et l’islam algérien est plus fort que l’islam tunisien ».

Pour Rached Ghannouchi, le sage est celui qui sait préserver une conquête, la mettre en sûreté et la consolider dans l’attente d’autres acquis et victoires : « Ce que nous avons réalisé en une année est à peine concevable et cette réalisation n’est pas encore définitive. Voyez les complots qu’on organise autour de nous, ces groupements qui se rassemblent tour à tour contre l’islam et contre nous. Alors au lieu de faire peur aux gens, il faut sécuriser nos acquis et les renforcer. Nous devrions commencer par affermir notre tissu associatif et implanter nos écoles partout sur le territoire national. Les gens ne connaissent pas l’islam. Ceux, parmi nous, qui gouvernent aujourd’hui ne connaissent rien aux rouages de l’administration. Tous ceux qui travaillent sous leurs ordres complotent contre eux. Il va aussi falloir du temps avant qu’il y ait des personnes qui travaillent pour eux et non contre eux »…

Un peu plus loin dans sa conversation très révélatrice pour ce qui est de ses véritables desseins, Ghannouchi s’exprime clairement sur sa position d’introduire la chariaa dans la Constitution : « Y a-t-il urgence à mettre la chariaa dans la Constitution ? Avons-nous intérêt à nous lancer dans cette bataille ? Aujourd’hui, nous disons au peuple tunisien ‘’dhahirian’’ (en apparence), que l’islam est la religion d’Etat. Pour ce qui est de la Chariaa, il y a une partie de l’élite tunisienne qui détient le pouvoir et qui en a peur ».

Amer Laarayedh, chef du bureau politique Ennahdha, invité sur les ondes de Mosaïque FM, estime pour sa part qu’il y a eu une volonté délibérée de déformer les propos de Rached, lequel, comme de tradition, ne pensait pas ce qu’il disait ou a été mal compris. « Car son objectif était plutôt de calmer les ardeurs des salafistes » (sic…).

Ceci dit, que cette vidéo ait été filmée au mois d’avril ne change rien au cœur du problème et à l’objectif ultime de Rached Ghannouchi : implanter un Emirat islamiste en Tunisie. Et à l’entendre parler, on n’a pas besoin d’être très perspicace pour comprendre ce que dissimule son discours « modéré ».

Le peuple tunisien a souffert pendant trop d’années des duperies des uns et des autres pour qu’il croit aveuglement ce que les nouveaux gouvernants lui débitent à longueur d’année, de mois et de jours. Assez de mensonges, la Tunisie mérite mieux et plus.

Amel Belhadj Ali

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