Tunisie – Sit-in – TV nationale – Intervention Lotfi Zitoun : Ils lèvent le camp

Coïncidence ? Heureuse en tout cas. Car les deux heures de négociations de Lotfi Zitoun, ministre conseiller du chef du gouvernement et chargé des dossiers politiques avec les sit-inneurs pro-Ennahdha, « révoltés » contre la « subjectivité » de la télévision tunisienne face aux « grandes réalisations » du gouvernement, semble avoir donné leurs fruits. Belle performance là où ni bon sens, ni statut d’un symbole de la souveraineté nationale comme la télévision publique, n’ont pu venir à bout de la ténacité d’individus qui se sont donnés pour mission « divine » l’assainissement des médias publics de la presse de la honte !

Ce matin, les contestataires professionnels, puisque nous les voyons partout où les forces démocratiques et progressistes manifestent, ont levé le camp. Ils sont partis où ? Dieu seul le sait. Espérons qu’ils n’ont pas été appelés à d’autres missions. Car du côté « officiel », ils jouiraient de l’estime et de la compréhension de nos hauts responsables y compris Lotfi Zitoun qui voulait mardi 24 avril convaincre fonctionnaires et journalistes de la Télévision nationale de la légitimité du sit-in.

Heureusement qu’il a convaincu les sit-inneurs « légitimes » de partir pour qu’enfin la série noire des violences et agressions verbales et physiques à l’encontre des travailleurs de la télévision publique se termine.

« Depuis le 24 février date où les sit-inneurs ont occupé la place devant la télévision, nous avons dû souffrir, en tant qu’employés, tant bien que mal leur présence », témoigne Amel Chahed, productrice et présentatrice de programmes : « Même si c’est très difficile pour quiconque de supporter les regards agressifs d’individus qu’on ne connait ni d’Eve ni d’Adam à l’entrée et la sortie de son lieu de travail.

Nous essayions pourtant de nous en accommoder. Sauf les fois où on insultait les femmes ou on tapait sur leurs voitures en signe de provocation. Les vendredis on criait les noms de nos collègues dans des hauts parleurs les accusant d’être à la solde des rcdistes et de « sahafa banafsagia ». Les deux derniers jours ont été les plus durs pour nous, c’était insupportable, inhumain. Nous assistions carrément à un combat de rues dans lequel nos confrères humiliés et parfois violentés réagissaient à leur tour ».

Amel Chahed a vécu très mal ces derniers jours car jamais au grand jamais, elle n’aurait pensé qu’on laisserait la télévision publique, en pâture à des individus, lesquels, pour oser s’attaquer de manière systématique à tous ceux et celles qui entrent et sortent de la télévision publique, doivent eux-mêmes être très loin de l’objectivité médiatique et de la crédibilité qu’ils prétendent défendre avec autant d’ardeur…

Le fait est, et au-delà de toutes les carences dont peut souffrir la télévision publique, que nous observons aujourd’hui une véritable volonté de la part de ses cadres techniques et journalistes pour évoluer dans le bon sens, malgré des moyens assez limités. Une volonté qui n’est pas perçue positivement par leurs détracteurs, lesquels, sans s’en rendre compte préfèrent garder l’ancien modèle en changeant tout simplement de personnes et de noms.

Car au final que reproche-t-on au téléjournal si ce n’est un ordre des informations qui ne sied pas? Comme l’a dit avec véhémence un Nahdhaoui dans un reportage télévisé : « Ceux qui ne parlent ou plutôt qui ne louent pas les actions du gouvernement qui représente la volonté du peuple, ne reconnaissent pas le peuple et par conséquent doivent « dégager »…Balivernes ! Lorsque l’on sait que l’on diffuse les informations selon leur importance et l’intérêt qu’elles représentent pour le public comme enseigné à l’Institut de presse et suivant le principe de la pyramide inversée !

Q’attend tout ce beau monde qui s’est tout d’un coup découvert « critique professionnel des médias » comme l’honorable Samir Ben Amor du CPR qui reprochait aux journalistes de la télé de ne pas couvrir les activités de Moncef Marzouki, Président de la République ? Que l’on revienne à l’époque Ben Ali ? Epoque où personne n’avait droit à l’image à part lui et où personne ne pouvait prétendre à une quelconque reconnaissance publique de peur de lui faire de l’ombre ?

Est-ce ce modèle là que l’on voudrait reproduire pour que ceux qui siègent au Palais de Carthage et au Palais du gouvernement admettent que les médias publics assurent du mieux qu’ils peuvent et de ce que leur permettent les moyens de bord ? Soit la mission d’informer?

S’il ne s’agit que de cela, nous médias, serions les premiers à regretter une « révolution » qui faute de nous affranchir aurait servi à nous enchainer encore plus. Car en politique, il n y a pas de sacré, tous ceux qui s’y mêlent y laissent des plumes dès le moment qu’ils sont devenus des hommes et des femmes publiques. On peut les admirer, les critiquer, les ignorer, les aimer ou les honnir, c’est la facture à payer, lorsqu’on accède au pouvoir.

Les médias pour leur part et principalement ceux publics sont sensés servir en premier et dernier lieu les contribuables. Les gouvernements passent, les peuples restent

Amel Belhadj Ali

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