La chaîne de télévision qatarie Al Jazeera va diffuser, jeudi 23 octobre 2014 à 20h (heure tunisienne), soit 72 heures avant la tenue des élections législatives, un numéro de l’émission d’investigation «La boîte noire», consacrée à l’assassinat de l’opposant politique Chokri Belaid.
Dans une interview accordée, mardi 21 octobre à Express Fm, le frère du martyr Abdelmajid Belaïd a déclaré qu’Al Jazeera n’a contacté aucun membre de la famille du martyr ni du comité de défense.
Il a également indiqué que ce reportage veut faire croire aux citoyens que les RCDistes, Nidaa Tounes et Kamel Letaïef… pourraient être derrière l’assassinat de Chokri Belaid. C’est une manœuvre pernicieuse afin de blanchir les terroristes d’Ansar al Chariâa, présumés auteurs de ce crime politique.
De son côté, Radhouane Masmoudi, président du Centre d’études sur l’islam et la démocratie et proche du mouvement Ennahdha, a appelé, via son compte Facebook, la chaîne Al Jazeera à reporter la diffusion du documentaire sur l’assassinat de Chokri Belaïd, prévu pour le jeudi 23 octobre afin de ne pas influer le processus électoral et ses résultats.
«La chaîne pourrait diffuser cette enquête, quand bon lui semble, mais après les élections», a-t-il conclu.
Comme nous l’avons souligné concernant l’émission de M6 (Enquête exclusive), nous estimons que, déontologiquement et éthiquement, tout organe d’information digne de ce nom devrait s’interdire d’une telle diffusion au moment même où l’avenir de la Tunisie se joue. Bien entendu il y a la liberté d’informer, mais le “quand“ et le “comment“, c’est important.
Dans le cas d’Al Jazeera, compte tenu de sa proximité –supposée ou réelle- avec le parti islamiste tunisien, Ennahdha, diffuser cette émission pourrait s’avérer à double tranchant. D’abord, en voulant “disculper“ Ennahdha et ses proches, comme l’a souligné du reste le frère de Belaïd, cela pourrait donner l’effet inverse. Car, dans le subconscient collectif tunisien, il est difficile de concevoir que la chaîne qatarie puisse diffuser une émission “négative“ sur Ennahdha.
Ensuite, Al Jazeera, en chute libre en Tunisie, pourrait, par cette diffusion, augmenter le sentiment de rejet qu’ont les Tunisiens de cette chaîne.
Alors, si la direction de la chaîne n’a pas tenu compte de tous ces enjeux, nous espérons, pour notre part, que les Tunisiens sauront faire la part des choses. Ils doivent surtout considérer que la démocratie naissante en Tunisie fait peur dans le monde arabe.
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