Tunisie – BCE à propos du projet de loi d’immunisation de la révolution : ” Ceux qui l’ont décidé n’ont pas de morale”

 «Priver un Tunisien d’exercer ses droits politiques revient à lui enlever la nationalité. C’est le but du projet de loi sur l’immunisation de la révolution qui sera soumis aux membres de la Constituante demain jeudi 27 juin alors même que ceux qui proposent ce projet n’ont pas participé eux-mêmes à la révolution et que les jeunes qui se sont révoltés ne l’ont pas fait par souci identitaire, religieux ou parce qu’il y en a dont les rites d’ablution ne correspondent pas aux rites habituels. La révolution doit et ne peut être immunisée que par les enfants du pays et les jeunes qui l’ont faite…», a déclaré Béji Caïd Essebsi, président du Mouvement Nida Tounes lors de la conférence organisée par l’Alliance pour la Tunisie, mercredi 26 juin 2013 à propos du projet de loi sur l’Immunisation de la révolution.

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60.000 Tunisiens pourraient bien être exclus sous prétexte qu’ils traitaient avec le gouvernement Ben Ali ou qu’ils travaillaient sous ses ordres. Tant qu’ils y sont, les initiateurs du projet d’immunisation devraient également intégrer dans leurs listes les personnes qui se sont adonnées à des actes terroristes au début des années 90 et d’autres qui jusqu’à aujourd’hui terrorisent les honnêtes citoyens en voulant leur imposer un mode de vie qui ne leurs correspond pas… «Ces gens-là ne sont ni conscients des priorités du pays ni de l’impact d’un tel projet sur la Tunisie alors même que nous devons tous nous unir pour faire face à de grandes difficultés socio-économiques et sécuritaires et offrir une image plus valorisante des dirigeants, lesquels aujourd’hui pêchent par de leur immaturité et leur incompétence», a expliqué le président de Nida Tounes.

Il a indiqué qu’aucun parti ne peut gouverner tout seul, ni Ennahdha ni un autre parti, et que ceux qui veulent faire passer la loi sur l’exclusion sont dans une logique de règlements de compte.

«D’ailleurs, ce parti qui exerce le pouvoir depuis octobre 2011 s’est gratifié d’une année d’exercice supplémentaire alors qu’il illustre parfaitement la formule «Jorribat fa-fachalat» (il a essayé et a échoué). Ceux qui ont proposé ce projet ne veulent pas qu’il y ait des élections dans le pays, et pour preuve,  l’Instance indépendante pour l’organisation des élections n’a pas encore été mise en place. La Tunisie n’est pas née du néant, il y a des hommes et des femmes qui l’on construite. Nier leur rôle ou leur mérite dans l’édification de la Tunisie ne peut, aujourd’hui, que traduire la volonté des dirigeants en place de faire marcher le pays à reculons… C’est ce que l’Alliance pour la Tunisie refuse. Nous avons déjà appelé à l’organisation d’un sit-in le 29 juin devant la Constituante pour exprimer notre refus catégorique pour une telle décision».

Une décision qui rappelle celle prise par l’Allemagne nazi pour écarter les juifs du pouvoir, et par l’Afrique du Sud pour instaurer l’apartheid et exclure les noirs, ou encore celle d’Israël qui exerce la discrimination face aux Palestiniens, a déploré BCE. «J’avais confiance en une maturité politique inexistante de fait».

Samir Taieb, porte-parole du parti Al Massar, a déclaré pour sa part que le projet d’immunisation de la révolution est très dangereux pour le pays et entrave le processus de justice transitionnelle de fait paralysé depuis des mois».

«Maandokomch Aklakh», «ceux qui dirigent aujourd’hui la Tunisie n’ont pas de morale ou un sens de l’éthique», a dénoncé BCE se référant à l’adhésion d’Ennahdha aux principes de la démocratie et à la neutralisation politique des lieux de culte, dans la «Déclaration sur le processus de transition» signée le 15 septembre 2011 par 11 partis politiques membres de la Haute l’Instance pour la sauvegarde de la révolution. «Il n’a même pas respecté ce pacte signé en toute liberté, par contre, il exerce aujourd’hui le pouvoir avec arrogance».

Les Rcdistes, a-t-il ajouté, ont le droit de revendiquer une place dans l’espace politique et aux urnes de décider. «Cela ne veut pas dire que c’est pour les attirer à Nida tounes».

Nous estimons en tant qu’Alliance pour la Tunisie, que personne n’a le droit d’exclure l’autre, le PSD est un parti historique. Moi-même j’en étais membre alors que je n’avais que 11 ans, a tenu à préciser Mohamed Néjib El Chebbi, d’Al Joumhouri.

«Le retour des Rcdistes est tout simplement un épouvantail que l’on sort à chaque fois que l’on veut intimider les Tunisiens. Le peuple tunisien doit tourner la page et la justice doit jouer son rôle. Personne ne doit se mettre en position de juge et parti ou décider qu’une personne doit être privée de ses droits plutôt qu’une autre, a scandé Mohamed El Kilani, président du Parti socialiste, d’autant plus que ces manœuvres de diversion surexploitées d’Ennahdha ne leurrent plus personne. A chaque fois, on sort des dossiers des tiroirs et on en fait une montagne juste pour mettre les gens sur de fausses pistes.

Jusqu’à aujourd’hui, nos mains sont tendues à Ennahdha et ses alliés pour sauvegarder les hauts intérêts de la Tunisie, mais nous n’accepterons aucune surenchère sur les principes fondamentaux se rapportant au respect des libertés et droits de l’Homme et aux ambitions démocratiques et égalitaires pour notre pays».

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