Tunisie – Augmentation des prix – Affaire Baghdadi : Les révélations de Houssine Dimassi confirmées

Les relations entre les deux pays prennent des couleurs. Le président du CNG libyen, Youssef El-Megaryef, en visite officielle, a annoncé une aide de 200 millions de dollars. C’est curieux mais cela rappelle bien à ce qu’avait annoncé Houssine Dimassi, ancien ministre des Finances, avant qu’il rende le tablier. S’agit-il d’un deal ou d’un programme ordinaire de coopération?

En temps de transition démocratique, les voies de la coopération internationale, ainsi que de la diplomatie, à l’instar des voies du Seigneur, pour les gens communs que nous sommes, restent bien impénétrables. Mais c’est curieux comme les rebondissements de l’actualité nous rappellent certains oracles qui nous ont secoués tant elles ils paraissaient invraisemblables. Les temps de transition sont des temps magiques et produisent bien des miracles.

UGH ! Houssine Dimassi a parlé

Avant de quitter son ministère Houssine Dimassi, connu autant pour son franc parler que pour son parler vrai, avait laissé «fuiter» quelques informations sensibles. Il nous avait annoncé que le litre de Super allait prendre cent millimes à la pompe. Mal lui a pris. Il fut couvert d’un déluge de démentis. On a attendu quelques mois, et vlan! L’essence a flambé.

Par malchance, ce n’était pas la seule de ses prédictions. Il avait laissé entendre que le lait y passerait à son tour. Toujours plongés dans l’expectative, on a sagement attendu quelques mois, et voilà que le lait a bu la tasse.

L’ancien ministre, prévenant tout de même pour notre moral fragile de consommateur en temps de transition, nous avait fait l’amitié de ne pas nous accabler et de nous annoncer la pénurie. Et elle se produisit tout de même. Et on a rationné le lait. Certains commerçants en ont profité pour renouer avec leurs vieux réflexes pour exiger les ventes liées, «le lait avec le yaourt», par exemple. Chassez les «bonnes combines» du commerce et elles reviennent, à la première pénurie.

Houssine Dimassi avait également pesté contre l’emballement des crédits pour les ménages. On a attendu quelques mois, et l’encadrement du crédit nous est tombé dessus. Il a bien laissé entendre que les graciés de l’amnistie générale allaient «toucher». Et voilà que les comptes de collecte, nationale qu’étrangère, viennent d’être activés.

L’ennui c’est qu’il nous a parlé d’un mystérieux marché pour la livraison de Mahmoudi Baghdadi laissant entendre que l’opération se dénouerait contre un généreux don de 200 millions de dollars. Et on sait qu’il fut couvert d’opprobre et que ce n’était que pure spéculation. On a attendu, et voilà que -surprise!- le président du CNG libyen, qui n’était pas encore aux affaires au moment où Houssine Dimassi avait «lâché le morceau», qui ne sait donc pas que nous avons été mis au courant quelques mois auparavant, annonce un prêt libyen en faveur de la Tunisie d’un montant de 200 millions de dollars. Bingo! Le compte est on ne peut plus bon. Le chiffre tombe pile. Et pour une coïncidence, c’est une bien belle coïncidence.

Qu’est-ce que vous dites de ça? L’ennui est que la révélation de l’ancien ministre ne s’est vérifiée qu’à moitié. Dans l’intervalle, la générosité libyenne a été divisée de moitié. La moitié des 200 millions devra être restituée. Sans intérêt, toutefois. C’est toujours ça de gagné, vous me direz! Nos frères, voisins et amis libyens sont près de leurs sous. Il faut dire que les temps sont durs, pour tous y compris pour les pays pétroliers. Ah, maudite crise.

Loin de tout décryptage malveillant

Il ne sert à rien de remuer les anciens souvenirs et de rester collé aux histoires du passé. Mais c’est le passé qui nous rattrape et c’est le verdict rendu par le tribunal administratif qui a réveillé l’affaire. C’est le président de la République qui a raison et le tribunal a reconnu que lui seul avait le pouvoir de décider de la restitution de l’ancien homme de confiance de Kadhafi, Mahmoud Baghdadi. Et, il se trouve donc que le président a été débordé par le gouvernement. Alors on entend de-ci de-là des voix pour dire qu’afin de calmer l’ire du président, on lui a offert la tête de l’ex-gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Kamel Nabli. Et, on a laissé au président le privilège d’annoncer que nos frères libyens y allaient de leur obole.

La somme peut paraître maigre mais la conjoncture est peu propice. L’économie libyenne ne carbure pas à fond. Et cela dure depuis 2011. Et cette année là, nous n’avons pas ménagé notre hospitalité avec nos frères, voisins et amis. Et bien au-delà de l’hospitalité, c’est l’exception tunisienne que nous saluons ici, car les autorités de l’époque ont eu la délicatesse d’organiser les sessions d’examens pour les jeunes écoliers libyens. Belle leçon d’amitié. Il ne s’agit pas de la monnayer, mais simplement de la mettre en valeur. Les jeunes libyens se souviendront que c’est dans le besoin qu’on reconnait les siens et qu’au moment de leur rude épreuve, la Tunisie leur a ouvert les bras de fort belle manière. C’est bien cet élément de solidarité effective qui marquera les esprits des deux côtés. Et c’est plus précieux que tout le reste.

Article publié sur WMC

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