Il y a un an, le parti islamiste modéré Ennahda remportait une nette victoire lors des élections désignant l’Assemblée constituante tunisienne. Dans un entretien accordé au Monde, au siège du parti à Tunis, Rached Ghannouchi défend son action.
On vous accuse de tenir un double discours vis-à-vis des salafistes dont vous avez dit : “Ce sont nos enfants”…
Il faut éviter le discours de l’ennemi de l’intérieur. Nous avons l’expérience de Ben Ali qui a détenu des dizaines de milliers de militants d’Ennahda et diabolisé le parti. Puis, le régime est tombé et Ennahda est maintenant au pouvoir. Si nous voulons diaboliser les salafistes, dans dix ou quinze ans, ce seront eux qui seront au pouvoir… C’est pour cela que nous leur parlons en tant que citoyens, et non comme des ennemis.
Quels sont pour vous les points importants qui vont différencier la future Constitution tunisienne de la précédente ?
La nouveauté, c’est la séparation entre les pouvoirs, la fin du pouvoir absolu, la garantie des droits de l’homme et des droits sociaux. Il n’y a rien contre l’islam, ni contre les droits de l’homme. J’ai vécu vingt ans en exil en Grande-Bretagne, où il n’y a pas de Constitution mais où ces droits et l’indépendance de la justice sont assurés. L’importance, c’est cela.
La coalition au pouvoir dominée par Ennahda vient d’annoncer un accord sur le futur régime, mi-parlementaire, mi-présidentiel, et l’organisation, le 23 juin, des prochaines élections. Cela vous semble réaliste ?
Après avoir évalué la situation avec minutie, nous avons établi ce calendrier mais c’est une proposition encore en discussion. C’est à l’Assemblée constituante que reviendra le dernier mot.
Ennahda est au pouvoir depuis un an, quel bilan en tirez-vous ?
Les demandes des cinquante dernières années ne peuvent être réalisées en un an. Le premier objectif de la révolution, la liberté, est acquis : aucun parti n’est interdit, aucun média, et il n’y a pas de procès politique. Pour le deuxième objectif, la justice sociale, cinq ou dix ans ne suffiront pas.
Source: Le Monde
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Un mal, dans tous les cas…