«L’Etat assure la protection des droits de la femme en tant qu’associé réel à l’homme dans le développement de la patrie, leurs rôles se complètent au sein de la famille. L’Etat garantit l’égalité des chances entre l’homme et la femme dans la prise de différentes responsabilités. L’Etat garantit la lutte contre toute forme de violence faite aux femmes.» »* c’est la version qui a été retenue et sera présentée au vote à l’assemblée constituante en plénière.
Une version qui nie l’existence de la femme en absence de celle de l’homme puisqu’elle la définit par rapport à lui “en tant qu’associé réel à l’homme”.
Selon la TAP, il s’agit d’une maladresse de rédaction pour certains constituants. «Une maladresse de rédaction» bien intentionnée non seulement peut changer le cadre juridique régissant les relations homme-femme mais en plus, remet en cause le principe d’égalité et se retrouve ainsi en contradiction avec l’article 22 qui stipule que « les citoyens sont égaux dans leurs droits et leurs libertés et “devant” la loi, sans discrimination d’aucune sorte ». Une constitution discriminatoire, limitant les droits et les libertés (avec un projet de loi criminalisant l’atteinte au sacré déposé par Ennahdha) et contradictoire et retreignant les droits de la femme. Est-ce pour cela qu’on pour cela qu’on a voté le 23 octobre dernier ?
Dire qu’au lendemain du 14 janvier, je pensais qu’il était temps de réviser le Code du Statut Personnel. «Le CSP était une avancée en 1956, en 2011 il y a certainement des choses à revoir maintenant, comme l’inégalité dans l’héritage ou devant le tutorat de l’enfant mineur» me disais-je toute naïve. Dire qu’au lendemain des élections, et quand les étrangers me posaient la fameuse question «Alors avec des islamistes au pouvoir, vous ne vous sentez pas menacée en tant que femme? » je répondais que les droits de la femme tunisienne sont une ligne rouge et qu’aucune femme tunisienne n’accepterait de céder ses acquis.
Je n’aurai pas cru que quelques mois plus tard, des femmes, Tunisiennes, ne se définiront pas en tant que «citoyenne à part entière» mais en tant que complémentaire à l’homme. Oui, «complémentaires », c’est ce qu’énonce le projet de l’article 28 de la nouvelle constitution. Cet article qui a été voté dans la Commission des droits et liberté (12 voix contre 8), m’a non seulement choquée mais a aussi été une vraie claque qui m’a fait rendre compte que le statut de la femme tunisienne est réellement menacé. Et c’est pour cela que la manifestation du 13 août est importante. Car cette année, on ne fêtera pas l’émancipation de la femme tunisienne, on avertira quant à sa régression. Ce projet d’article doit être retiré. La femme tunisienne n’échangera pas égalité contre complémentarité. Le 13 août, soyons tou(te)s au rendez-vous. C’est l’avenir de la femme, et de toute une société qui est en jeu.
PS: Deux versions ont été proposées dans la commission des droits et libertés. La version retenant 8 voix et par conséquent rejetée stipule que : «L’Etat garantit les droits de la femme et ses acquis dans tous les domaines, il est interdit de promulguer des lois pouvant y porter atteinte de quelque manière que ce soit. L’Etat se doit de lutter contre toutes les formes de discrimination ou de violence physique ou psychique contre la femme».
Blog : Sarah Ben Hamadi