Le président du Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), Zied Dabbar, a estimé que le secteur de la presse en Tunisie est « économiquement sinistré », soulignant que 80 % des entreprises de presse dans le pays sont menacées de fermeture.
Intervenant lors d’une rencontre sous la thématique « Les journalistes, acteurs de l’économie des médias », organisée mardi à Tunis par le Syndicat, Dabbar a relevé que le nombre des médias en Tunisie ne dépasse actuellement pas 45, dont plusieurs menacés de fermeture, essentiellement en raison de difficultés économiques. Il a rappelé qu’après la révolution, environ 145 entreprises de presse étaient actives dans le pays, dont 80 dans la presse écrite.
Dans ce contexte, il a souligné que la réduction du nombre d’entreprises de presse a entraîné un recul de la qualité du produit journalistique.
Selon le président du SNJT, le rôle du journaliste a été partiellement remplacé par les créateurs de contenu, en plus de la mainmise du capital sur les rédactions et de la transformation de certains espaces médiatiques en organes pour certaines parties, notamment en période électorale.
Dabbar a déclaré que « 80 % des citoyens ont perdu confiance dans les médias en raison des commentateurs médiatiques (chroniqueurs), dont une grande partie s’est transformée en porte parole du pouvoir et de la propagande ».
Il a affirmé que l’une des solutions pour sauver le secteur de la presse consiste dans la réhabilitation du secteur par les journalistes eux même, à travers le soutien à la création de leurs propres entreprises médiatiques et la mise en place de sociétés de presse par actions, en s’inspirant d’expériences menées dans d’autres pays. Il a appelé à soutenir le journaliste entrepreneur, en tant que citoyen et contribuable qui a droit à des facilités juridiques et institutionnelles.
Dans le cadre de cette rencontre, le directeur de l’Institut de presse Sadok Hammami, a présenté une étude intitulée « Les journalistes, acteurs d’une économie médiatique en mutation », portant sur les transformations que connaît le secteur des médias, en mettant l’accent sur les journalistes en tant qu’acteurs économiques actifs.
Hammami a observé que, bien que la société tunisienne soit numériquement avancée, elle accuse un retard au niveau du cadre institutionnel et économique et dans l’adoption de l’innovation. Il a estimé que la responsabilité de l’État consiste à mettre en place un environnement favorable à l’innovation numérique.
L’étude a mis en évidence une augmentation du taux d’accès à Internet, passé de 64 % en 2020 à 84,3 % en 2025.
Elle a également indiqué que le nombre d’utilisateurs de la plateforme TikTok en Tunisie a atteint environ 6 millions, tandis que le nombre d’utilisateurs d’Instagram a enregistré une hausse de 6,2 % par rapport aux années précédentes, pour atteindre environ 5,6 millions d’utilisateurs.
La plateforme Facebook continue de dominer le paysage numérique en Tunisie, avec près de 7,3 millions d’utilisateurs.
L’étude a par ailleurs présenté plusieurs expériences internationales où le journalisme entrepreneurial est devenu un secteur à part entière au sein de l’économie des médias. Elle a également mis en lumière l’émergence de nouveaux concurrents des journalistes, notamment les influenceurs, ce qui affecté la confiance du public envers les institutions médiatiques, au profit d’une confiance accrue envers les individus. Cette évolution a poussé de nombreux journalistes à se transformer en influenceurs et conduit certaines institutions à encourager cette tendance, selon Hammami.




