L’Agence France-Presse (AFP) a publié un communiqué alarmant concernant la situation dramatique de ses correspondants encore présents dans la bande de Gaza. Pour la première fois depuis sa création en 1944, l’agence redoute que ses journalistes puissent mourir de faim, tant les conditions de vie sont devenues inhumaines.
Depuis le départ de ses journalistes permanents début 2024, l’AFP s’appuie sur un réseau de collaborateurs locaux composé d’un rédacteur indépendant, de trois photographes et de six vidéastes freelances. Ces derniers, parmi les rares à encore documenter la réalité sur le terrain, travaillent dans un isolement quasi total : les médias internationaux sont interdits d’accès à Gaza depuis près de deux ans.
Leurs témoignages, rares et de plus en plus désespérés, dressent un tableau effroyable. Bashar, qui collabore avec l’AFP depuis 2010 et qui est devenu le photographe principal en 2024, a confié sur les réseaux sociaux ne plus avoir la force physique de poursuivre son activité journalistique. Il vit dans les ruines de sa maison à Gaza-ville avec sa mère, ses frères, sœurs et la famille de l’un de ses frères. Sans meubles, sans électricité ni eau courante, il tente de survivre grâce à l’aide sporadique de proches. La faim ronge son foyer, au point que son frère aîné s’est effondré d’épuisement et de malnutrition.
Les maigres salaires que l’AFP parvient à leur verser peinent à couvrir les prix exorbitants du marché local, aggravés par un système bancaire à l’arrêt et des intermédiaires financiers qui ponctionnent près de 40% des transferts. L’agence est dans l’incapacité de leur fournir du matériel ou même le carburant nécessaire pour leurs déplacements. Circuler en voiture les expose à devenir une cible pour l’aviation israélienne ; alors ils se déplacent à pied ou en charrette tirée par des ânes.
Ahlam, installée dans le sud de la bande de Gaza, continue malgré tout de témoigner : chaque sortie pour couvrir un événement, réaliser une interview ou documenter un drame est un risque de ne jamais revenir. Son principal défi reste l’accès à l’eau et à la nourriture, presque introuvables.
Ces journalistes, pourtant jeunes, voient leurs forces décliner de jour en jour. Ils n’ont parfois plus l’énergie de transmettre des informations, tant leur corps est affaibli. Leurs appels à l’aide deviennent quotidiens, poignants, et l’AFP craint à chaque instant d’apprendre la mort de l’un d’eux.
Bashar a écrit récemment : « Pour la première fois, je me sens vaincu… Plus de trois ans de cauchemar, et nous n’avons plus les mots pour expliquer au monde que nous vivons chaque jour entre la mort et la faim… J’espère que Monsieur Macron pourra m’aider à sortir de cet enfer. »
Ahlam, elle, refuse de renoncer : « J’essaie de continuer à donner la parole aux gens, à documenter la vérité malgré toutes les tentatives de la faire taire. La résistance n’est pas un choix, mais une nécessité. »
Jamais auparavant l’AFP n’avait connu une telle situation : voir ses propres journalistes menacés de mourir non pas à cause des combats, mais de la faim. Une perspective insoutenable pour l’agence, qui en appelle à une intervention urgente pour sauver ceux qui risquent de disparaître sans avoir pu achever leur mission essentielle : informer le monde.




