Insultes, menaces et violence : le témoignage glaçant de Nawres Zoghbi arrêtée au Caire

C’est un témoignage bouleversant que Nawres Zoghbi, jeune militante tunisienne, a partagé ce lundi sur sa page Facebook après son retour de l’Égypte. Les mots sont forts, empreints de douleur, d’indignation et de fierté. Son récit, poignant et détaillé, met en lumière les dérives sécuritaires et les atteintes aux droits humains que peuvent subir celles et ceux qui osent encore brandir haut le drapeau de la solidarité avec la Palestine.

À son arrivée au Caire, Nawres et sa camarade ont été retenues de force pendant plus de six heures au sein de la direction de la sécurité de la capitale égyptienne. Ce n’est pas moins de soixante agents des forces de sécurité, dont une unité d’élite équivalente aux commandos, qui ont été mobilisés. L’atmosphère était tendue, les visages fermés. Nawres décrit un véritable piège sécuritaire, où l’humiliation, l’intimidation et la violence physique étaient de mise.

Les deux jeunes femmes ont refusé de livrer leurs téléphones portables, demandant à parler à l’ambassadeur de Tunisie en Égypte. La réponse glaçante d’un haut responsable égyptien, qualifié de « nasr » (aigle, un titre symbolique chez les forces de l’ordre), est tombée : l’ambassadeur tunisien serait informé et aurait donné son accord pour leur détention. Une affirmation qui, si elle est avérée, suscite un profond malaise sur le rôle et la position des autorités tunisiennes dans la protection de leurs ressortissants à l’étranger.

Au cours de leur interrogatoire, Nawres et sa compagne ont été traitées de « putes », de « traîtresses », de « criminelles » et même de « pions étrangers », uniquement parce qu’elles étaient deux femmes voyageant seules et qu’elles affichaient un soutien sans faille à la cause palestinienne. Elles ont ensuite été transférées comme des criminelles dans un fourgon fermé, entourées de chaînes métalliques, vers un lieu qu’on leur a simplement désigné comme étant « le dépôt », c’est-à-dire un centre de rétention préliminaire.

Nawres raconte avec une émotion palpable le moment où sa mère, en Tunisie, a dû acheter un billet d’avion pour qu’elle puisse être expulsée de manière « officielle » via l’aéroport. En Égypte, les autorités vous « rapatrient » uniquement si vous prenez en charge les frais de votre propre expulsion.

Dans la salle de détention de l’aéroport, les conditions étaient moins violentes, mais toujours dégradantes. Cependant, un moment d’humanité surgit enfin : on leur autorise l’accès aux toilettes. Nawres y retrouve alors l’un de ses compagnons de route, Seif, qu’elle serre dans ses bras avec soulagement. « C’est à ce moment-là que j’ai senti que j’étais enfin en sécurité », confie-t-elle.

Assise dans l’avion qui la ramène vers la Tunisie — un vol payé grâce au sacrifice de sa mère — Nawres laisse couler ses larmes. Mais même dans les heures les plus sombres, l’espoir, la résistance et la dignité ne l’ont jamais quittée. Dans la salle de détention, elle et ses camarades ont scandé « Free Palestine » et inscrit sur les murs le mot d’ordre : Caravane Al-Soumoud.

Elle conclut son témoignage avec fierté : « Je suis Nawres Zoghbi, citoyenne tunisienne. Mon crime : avoir voyagé en Égypte et avoir cru à la boussole de la Palestine. »

Ce témoignage résonne comme un cri d’alerte. Il rappelle que le simple fait de militer pour une cause juste peut aujourd’hui vous exposer à l’arbitraire, à la violence et à la répression. Nawres Zoghbi, par son courage et sa dignité, incarne cette jeunesse arabe debout, libre et solidaire, qui refuse de se taire.

La question reste en suspens : qui protège aujourd’hui les citoyennes et citoyens engagés ? Et surtout, jusqu’à quand le soutien à la Palestine sera-t-il considéré comme un crime ?