Des partis politiques, des associations et des organisations de la société civile ont, dans des déclarations publiées entre vendredi et samedi, exprimé leur rejet de la proposition d’amendement de la loi électorale présentée par des députés. Ils estiment que la tentative de retirer au Tribunal administratif la compétence de statuer sur les conflits électoraux et de la confier à la justice judiciaire à seulement deux semaines de l’élection présidentielle, constitue une atteinte à l’Etat de droit en Tunisie.
A noter que le parlement a renvoyé le projet d’amendement de la loi électorale, soumis par 34 députés des différents groupes et des hors groupe, devant la commission de la législation générale, accompagné d’une demande d’examen en urgence.
Le Réseau tunisien des droits et des libertés considère que la tentative d’annuler le rôle du Tribunal administratif menace directement le rôle des la Justice dans la garantie de l’intégrité et l’opération électorale.
Cette démarche constitue une violation criante des fondements de la démocratie, de la Justice et de l’Etat de droit en Tunisie. Le peuple ne restera pas les mains croisées devant les tentatives d’affaiblissement des institutions qui garantissent ses droits et libertés, lit-t-on dans la déclaration du Réseau qui annonce un “état d’urgence populaire” et l’organisation d’un rassemblement de protestation ce dimanche à partir de 14h00 devant le théâtre municipal de Tunis.
Le réseau regroupe 8 organisations dont la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), Coalition Soumoud, l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), l’Association Aswat Nissa et le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES). Le réseau comprend aussi le Parti des Travailleurs, le Courant démocrate, Afek Tounès, le Parti socialiste, Al Massar, Ettakatol et Al Qotb.
De son côté, le mouvement “Hak” a mis en avant l’inconstitutionnalité de cette initiative, en se basant sur les articles 75 et 76 de la Constitution du 25 juillet 2022 et sa non conformité avec la loi organique relative à l’instance électorale en ce qui concerne la compétence abseolue du Tribunal administratif pour statuer sur les conflits électoraux.
Selon le mouvement “Hak”, cette initiative porte atteinte à la crédibilité de l’opération électorale et ferme les voies de recours contre les résultats de l’élection présidentielle.Le parti Travail et réalisation a indiqué que la proposition de loi vise à “exclure le Tribunal administratif du traitement des litiges électoraux”, estimant qu’il s’agit de pratiques qui exposent la stabilité, l’avenir et la réputation internationale du pays au danger.
Le mouvement Ennahdha a réclamé le retrait de l’initiative législative relative à l’amendement de la loi électorale, dénonçant ce qu’il a qualifié de “scandale politique”.
De son côté, le parti Al Massar a fermement condamné “la poursuite de cette démarche irresponsable visant à saper le système judiciaire et l’Etat de droit, en recourant à l’élaboration de textes ayant pour but de dépouiller le Tribunal administratif de ses prérogatives en ce qui concerne le contrôle de l’intégrité des élections et de leurs résultats”.
Pour I Watch, amender les règles juridiques liées aux élections pendant le déroulement de l’opération électorale constitue une violation grave aux bonnes pratiques en matière d’élections qui interdisent l’amendement de la loi électorale pendant l’année électorale.
La commission de la législation générale du parlement se réunira le lundi prochain pour entendre, dans un premier temps, des représentants des députés ayant déposé la proposition de loi.
La commission entendra, ensuite, à partir de 14 heures, des représentants du ministère de la Justice, conformément au calendrier des travaux parlementaires publié ce samedi sur le site officiel du parlement.
La proposition de loi publiée sur le site officiel du parlement suggère des propositions d’amendement de la loi électorale au niveau de ses 46,47 et 49, de 86 à100 et l’article 145.
Pour l’essentiel, le projet d’amendement propose que les recours contre les décisions de l’Instance supérieure indépendante pour les élections se font désormais devant la Cour d’appel de Tunis à la place du Tribunal administratif.