Le parti islamiste Ennahdha a rendu public, lundi 23 novembre 2020, un rapport détaillant ses recommandations liées à la situation socioéconomique actuelle en Tunisie.
On y relève notamment ses appels pour :
- la tenue d’un dialogue économique et social national,
- la révision des hypothèses budgétaires,
- la rationalisation des dépenses,
- l‘optimisation des importations,
- le renforcement du contrôle sur l’évasion fiscale,
- la lutte contre toutes sortes de corruption,
- l’instauration de la stabilité législative pour rassurer les investisseurs,
- la publication du Code fiscal tunisien,
- la tenue d’un dialogue entre le gouvernement et la Banque centrale pour le financement du déficit budgétaire sous couvert de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP),
- la réduction de la pression fiscale estimée à 25,4% en 2020,
- l’encouragement du recouvrement des créances fiscales,
- la souscription d’un emprunt national en devises auprès des Tunisiens à l’étranger,
- l’émission d’un emprunt national de 1 milliard de dinars en Bons de Trésor,
- l’augmentation du plafond de la contribution des étrangers aux bons de trésor,
- l’arrêt de l’hémorragie de l’endettement extérieur,
- l’augmentation du budget du ministère de la Santé,
- l’octroi de plus d’attention au secteur agricole.
Il est à noter que les points essentiels qui expliquent la détérioration continue de la situation économique en Tunisie depuis 2011 ont été esquivés dans ce rapport, et aucune allusion ne leur y est faite. Continue-t-on chez Ennahdha à vouloir contre vents et marées vivre dans le déni ? C’est ainsi que dans les recommandations prescrites dans le rapport, il n’est fait à aucun moment référence au climat politique détérioré notamment à l’ARP, ni à la perte de crédibilité de toute la classe politique qui sont à l’origine de la majorité des blocages et des échecs de l’économie tunisienne.
L’effritement de la confiance entre le peuple et la classe politique rend la majorité des recommandations du rapport caduques et les transforme en vœux pieux. C’est le cas par exemple pour la contribution souhaitée des Tunisiens Résidents à l’Etranger (TRE) à un emprunt en devises ou celle des Tunisiens résidents en Tunisie à un emprunt national en Bons du Trésor.
Aucune allusion n’a été faite non plus dans le rapport et ses suggestions à l’économie parallèle qui représenterait plus de 50% de l’économie nationale, ou à la contrebande, deux fléaux majeurs sans l’éradication desquels l’économie tunisienne ne pourra jamais se relever.
D’autres recommandations ne sont que des lapalissades auxquelles tout le monde appelle mais Ennahdha ne dit pas ce qu’elle propose pour y parvenir concrètement. C’est le cas quand elle recommande par exemple la lutte contre la corruption.
Au même moment, une majorité dans l’opinion publique ainsi que bon nombre d’observateurs et d’experts pensent que seul l’assainissement du climat politique, notamment à l’ARP, et la tenue d’un dialogue économique et social national indépendant, tenu en dehors de la mainmise des partis politiques et de l’ARP, pourrait déboucher sur la définition de véritables actions crédibles pour aller vers une sortie de crise autour d’un consensus majoritaire, viable, pouvant permettre d’arrêter un plan d’action à moyen terme et offrir la stabilité politique nécessaire pour laisser le temps à sa concrétisation.