Massacre de chiens à Djerba : Cette barbarie doit cesser

La très belle image qu’avait donné, auprès du monde entier, le chaton embarqué, en juin dernier, sur un bateau clandestin en direction de l’Italie sur l’amour des tunisiens pour les animaux de compagnie, a été, définitivement, gommée des esprits, après l’insoutenable vidéo, massivement partagée, le 22 juillet 2020, sur les réseaux sociaux. Cette vidéo faisait état du massacre, dans un refuge d’animaux, à Djerba, de dizaines de chiens dont une chienne qui allaitait encore ses bébés.

Abou SARRA

L’atrocité de ce crime a provoqué une forte indignation à l’étranger et en Tunisie. Réagissant à chaud, plusieurs européens ont, d’ores et déjà, appelé à boycotter l’Île des Lotophages, ce qui risque de porter un coup fatal à cette station touristique déjà lourdement impactée par le coronavirus Covid-19).

Nous pensons que le ministre du Tourisme aurait dû se rendre sur les lieux du drame pour rassurer les touristes et leur expliquer qu’il s’agit d’un acte individuel isolé qui ne représente guère tous les Tunisiens, même s’il faut reconnaître qu’un tel drame n’est pas nouveau en Tunisie.

Il intervient après le lynchage à coups de pierre jusqu’à la mort, au mois de mars 2017, au zoo du Belvédère, d’un crocodile. Ce drame avait indigné le monde entier et terni l’image des tunisiens, présentés comme « des barbares ».

D’autres massacres n’ont pas être médiatisés. Ils ont eu lieu dans le silence le plus total. A titre indicatif, selon des témoignages concordants cités par Hager Ben Cheikh, ancienne députée, un phoque a été tué, à la même période et dans les mêmes conditions que le crocodile, au zoo du Belvédère.

L’administration est aussi responsable

Force est de constater que ces massacres d’animaux dans des zones protégées ne sont pas uniquement perpétrés par des jeunes sauvageons désœuvrés sans aucune éducation mais également par les autorités officielles.

De jour comme de nuit, des policiers et des chasseurs rémunérés par les municipalités, abattent, jusqu’à ce jour, les chiens errants qui, il faut s’en rendre compte, sont très nombreux en Tunisie. Ces campagnes d’abattage sont menées officiellement dans l’objectif de lutter contre le fléau de la rage et sa propagation. Pour l’administration, il n’y a pas de choix « l’abattage des chiens errants est un mal nécessaire ».

Mais de plus en plus, les associations de protection des animaux dénoncent les méthodes trop violentes de l’administration et mettent la pression sur elle pour qu’elle lance, régulièrement, des campagnes de vaccination.

L’action des défenseurs des animaux est insuffisante

Des manifestations sont organisées, régulièrement, depuis le soulèvement du 14 janvier 2011 par les défenseurs des animaux. Objectifs : garantir dans la Constitution les droits des animaux et appliquer la loi locale en vigueur sur la maltraitance des animaux.

D’après l’Association SOS Animaux Tunisie, cette dernière loi « punit ceux qui torturent les animaux d’une peine d’emprisonnement de 15 jours et d’une amende de 4 500 DT. Malheureusement, elle n’est jamais appliquée », estime l’Association.

Néanmoins, il faut admettre que ces manifestations, tout autant que l’action des défenseurs des animaux, demeurent insuffisantes. Les associations de protection des animaux ne font pas assez pour sensibiliser les tunisiens au bien fondé de la nécessaire protection des animaux et aux conventions internationales élaborées sur cette question.

Agir sur l’éducation des jeunes

En règle générale, la jurisprudence internationale, définit tout animal de compagnie, « en tant qu’être vivant qui a des sentiments, et qui a le droit de vivre dans la dignité et le respect. Et tout propriétaire d’animal de compagnie, en tant que personne qui aime les animaux et responsable de son bien-être, a le droit d’être respecté par la société en général ».

Mieux, le droit international stipule que « les droits des animaux de compagnie et de leurs propriétaires doivent être défendus par la loi, à l’instar des droits de l’homme. Les animaux de compagnie ont le droit de bénéficier d’un espace digne au sein de la société ».

Les droits des animaux sont consignés dans une convention internationale : la Déclaration Universelle des Droits de l’animal. Cette Déclaration, proclamée, le 15 octobre 1978, à la Maison de l’UNESCO, à Paris constitue une prise de position philosophique sur les rapports qui doivent désormais s’instaurer entre l’espèce humaine et les autres espèces animales. Son texte révisé par la Ligue internationale des Droits de l’animal en 1989, a été rendu public en 1990.

L’idéal serait toutefois d’agir sur l’éducation et d’inculquer aux jeunes l’amour des animaux et leur respect. Car rien ne justifie l’atrocité avec laquelle, ces chiens sont abattus, dans un refuge d’animaux, à Djerba. Rien n’explique le massacre d’un crocodile et d’un phoque à coups de pierre dans une zone surprotégée comme le zoo du Belvédère. Si cette barbarie persiste, aucun touriste n’oserait plus visiter la Tunisie.

A bon entendeur.