Covid-19 :  Le confinement n’est pas la meilleure des réponses à la pandémie, estime Dr Maher Haffani

Par : Autres

Le 30 janvier 2020, le Directeur général de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a déclaré que la propagation du COVID-19 constituait une urgence de santé publique de portée internationale et a émis des recommandations temporaires.

L’Observatoire national des maladies nouvelles et émergentes a été réactif et a émis à la date du 04 Février 2020 un communiqué signifiant la surveillance de près l’épidémie de maladie respiratoire causée par un nouveau coronavirus, nommé «2019-nCoV».

Des mesures ont été prises par le Ministère de la Santé avec élaboration d’un plan de prévention, de préparation et de riposte au risque d’introduction du «2019-nCoV» en Tunisie et un manuel de procédures a été élaboré.

Voyons ce qu’il en est en Tunisie !

La pandémie de Covid-19 se développe officiellement dans notre pays depuis le 2 mars 2020.

Le 13 mars, le chef du gouvernement annonce la fermeture des cafés, restaurants et discothèques à partir de 16 heures ainsi que la suspension des prières collectives et l’annulation des congrès et des manifestations culturelles.

Le 18 mars, fermeture des frontières terrestres et aériennes, l’interdiction des rassemblementset la mise en place d’un régime à séance unique. Le couvre-feu est instauré, de 18 heures à 6 heures, sur tout le territoire national.

Enfin, le 20 mars, est annoncé un confinement total ainsi que l’interdiction de tous déplacements entre les agglomérations.

Depuis et alors que la rive Nord de la Méditerranée s’enfonce dans des complications plus redoutables de la pandémie, nous n’enregistrons à ce jour, 14 avril 2020, soit 41 jours depuis le début de la pandémie dans notre pays, « que » 707 cas avérés et déplorons malheureusement 31 décès.

A vu des moyens assez limités de la prise en charge des patients potentiellement graves, nous avons opté pour la prévention et la prise de mesures draconiennes.

Démystifions le Corona virus !

Aujourd’hui partout dans le monde, nombreuses sont les explications scientifiques à propos du mode de fonctionnement du virus et ses atteintes au système respiratoire. L’explication la plus récente et la plus convaincante médicalement reste la thrombo-embolie pulmonaire d’origine infectieuse provoquant le décès de certains patients.

Nous avons aussi appris que le traitement antibiotique de ces patients était très efficace.

Alors, à ce stade, plusieurs questions s’imposent.

1. Quelle a été la réelle contribution des professionnels de la santé dans notre pays réputé exportateur des services de santé ? Ne pouvions-nous pas mettre à contribution ce formidable vivier pour prendre en charge nos patients atteints par le covid-19 et reconnaître l’embolie pulmonaire comme étant la conséquence d’un état septique ?

Notre pays est réputé rengorger de cliniciens et pourtant ! Qu’est-ce qui empêche nos spécialistes de nous éclairer un peu plus et mieux sur cette pathologie ?

Avions-nous les moyens pour parfaitement explorer nos patients ? Avons-nous protégé suffisamment nos professionnels de la santé pour qu’ils puissent exercer leur métier avec le minimum de risque ?

2. La quasi-totalité des intervenants du secteur médical, depuis le début de cette pandémie et son avènement dans notre pays, ont été obnubilés par les différentes informations recueillies çà et là mais jamais et à aucun moment nous n’avons entendu le moindre commentaire concernant les syndromes grippaux avec une composante respiratoire particulièrement tenace qui ont débuté début décembre.

Savons-nous à quel point notre population était déjà immunisée avant la déclaration des mesures exceptionnelles ?

Cela donnerait une explication plausibleau faible impact de cette virose dans notre pays. Le fin mot de l’histoire nous aurait été fourni par la vulgarisation des tests (quitte à le faire payer par le citoyen) et non pas sa pratique au compte-goutte et la centralisation des examens.

3. Nous avons peut-être bien géré le volet préventif (reste à prouver car les attroupements quotidiens étaient flagrants) mais a-t-on des études qui prouvent une réelle différence entre les conséquences de cette pandémie au covid-19 et celle d’autres épidémies grippales que nous subissons périodiquement depuis des années ? Cela aurait pu aider aux prises de décision.

4. A-t-on la moindre idée de l’état de santé mentale de notre population suite à ce mois de confinement et de ses conséquences (surtout dans les franges les plus démunies) sociales et financières ?

5. Avions-nous objectivement les moyens des pays occidentaux (couverture sociale, indemnisations des professions libérales, etc.) pour nous permettre l’immobilisme durant un mois entier ? Qui va combler les pertes économiques occasionnées par ce confinement ?

6. Si nous sommes conséquents avec nos données et tenant compte du nombre tout de même assez limité de patients covid-19 positifs déclarés et des décès (si nous faisons confiance à ces chiffres), nous sommes en droit de se poser la question relative au maintien de l’état d’alerte actuel et pourquoi ne pas envisager de le baisser d’un cran tout en recommandant la pratique ambulatoire des tests par les prescripteurs.

Les cas positifs seraient déclarés et traités parune couverture antibiotique adéquate pour éviter les complications pulmonaires de cette infection virale.

Le confinement drastique n’est pas la meilleure réponse au covid-19, prévention, mesures barrières et information sont indispensables.

Dr Maher Haffani