Confinement oui… Mais Les chiffres sont alarmants : les personnes contaminées un peu partout dans le monde ne cessent de se multiplier à une vitesse vertigineuse à couper le souffle.
Le monde autour de nous s’écroule. Aucune réponse sanitaire n’est salutaire à part la consigne de confinement imposée comme unique prévention sans plus.
L’attente est plus que terrifiante : rester chez soi pour briser la chaîne de contamination. Le choix est similaire à un ordre sans appel.
Disciplinée mais enragée
Ce matin, je sens la colère qui m’envahit, me déchire et me démolit, et une nausée ravageuse qui me remplit d’un tel dégoût que j’en frémis.
Etre obligée de rester cloîtrée chez moi sans pouvoir venir en aide à ceux qui en ont besoin me révolte. Le privilège de retrouver un refuge pour penser, repenser sa vie et ses choix, se reposer, admirer la nature qui reprend tous ses droits et méditer n’est pas donné à tout le monde. La nature que nous avons tant maltraitée, nous offre paradoxalement ses plus belles œuvres toutes en harmonie et en splendeur. Et pourtant, on se plaint, et on se lamente sur le manque de sociabilité et de loisirs.
Pire encore, on se permet de critiquer et de maudire ceux qui ne respectent pas le confinement et pour cause…
Le confinement suppose des moyens
Aucune compassion pour ces journaliers qui se trouvent au chômage, et qui du coup n’ont plus rien à offrir à leurs familles.
Ceux qui errent dans la rue la peur au ventre ! La peur de rentrer bredouilles avec un couffin tristement vide et de ne pas pouvoir se remplir le ventre.
Et ces retraités, qui s’entassent devant les bureaux de poste pour recueillir les miettes d’une retraite de misère.
Ces ouvrières et ces femmes de ménages qui sont exploitées et exposées aux dangers de contamination dans les quelques transports publics qui fonctionnent encore… et ces sans abris livrés à eux-mêmes.
Ceux-là mêmes qui vivent dans la nuit sombre de la misère. Ces gens-là n’ont pas le privilège de se confiner, et si c’est le cas, ils vivent dans un espace exigu où la promiscuité tue. Dans un espace où absence de nourritures et de produits nécessaires pour la propreté manquants dévoile la précarité des conditions de leur vie au quotidien. Bref, les pires conditions pour un confinement.
Sans oublier ces femmes battues par leurs conjoints qui lancent des appels de détresse alors que la situation devient insupportable et le climat de violence atteint des proportions alarmantes.
La violence contre les femmes, cette plaie ouverte dans une société où l’impuissance d’une certaine catégorie d’hommes trouve son purgatoire dans la violence exercée à l’encontre des femmes !
Et pourtant… Chaque matin, sur nos radios on entend parler des bonnes recettes de cuisine proposées aux femmes en quête du bonheur familial…
Violence et précarité…
Des inégalités sociales qui reviennent à la surface pour cause d’épidémie ! Et de nouveau… On appelle à la solidarité. A une générosité sociale qui ne peut en aucun cas se substituer à
la bonne gouvernance de l’Etat.
L’élan de solidarité a ses propres limites ! Et ce qui est effrayant c’est indiscutablement ce dysfonctionnement de nos institutions républicaines; un dysfonctionnement aggravé par la prolifération de mauvaise gestion où la corruption trouve refuge.
Depuis le temps où on parle de guerre contre la corruption, défiant toute logique, la corruption s’érige en système. 10 ans après, le changement vers le développement et la démocratisation sociale et politique piétine et se perd dans des processus parallèles. Une
révolution mutilée qui accouche d’un enfant schizophrène, sadique et sans mémoire.
Dichotomie de l’impuissance
Triste encore est ce discours d’un président hors pair. Il nous inflige la pire des tortures avec des mots qui sonnent faux ; le rythme est exaspérant, sans âme ni vision. Le président nous demande où est passé l’argent. Il s’adresse au peuple !
Lui, le chef de l’Etat, le symbole de son unité, le garant de son indépendance et de sa continuité, lui qui veille au respect de la Constitution. Lui qui a le pouvoir de prendre les mesures nécessaires face à un péril éminent menaçant institutions de la nation et la sécurité… Ne s’agit-il pas des articles 72 et 80 de la Constitution de la deuxième République, ou comme beaucoup de mes compatriotes bienveillants j’aurais perdu le discernement?
Entre une Assemblée des représentants du peuple (ARP), et un pouvoir exécutif bicéphale, nous citoyennes et citoyens sommes-nous les boucs-émissaire d’un système défaillant ?
Il suffit de se rappeler le dernier projet de loi relatif à la modification des articles 245 et 247 du code pénal pour prendre conscience de la gravité des intentions et de la démarche de nos chers députés.
– Museler la liberté d’expression
– Tirer profit des privilèges
– Assurer ses profits personnels
– Se vendre au plus offrant (tourisme parlementaire)
– Légiférer pour leur propre intérêt (passeport diplomatique).
C’est désormais ce qui caractérise un député tunisien qui se respecte…
QUE FAIRE ? Nous otages de nos propres erreurs, les rescapés d’une révolution confisquée à l’assaut d’une pandémie qui risque de nous achever …
Monia El Abed