Les réactions des politiques étaient partagées après l’interview accordée lundi soir par le président de la République Béji Caïd Essebsi à la chaîne de télévision privée Al-Hiwar Attounsi.
Certains l’ont qualifiée de “profonde” et de “porteuse de messages à l’ensemble des acteurs politiques”.
D’autres ont estimé que le président de la République “n’a pas apporté de solutions et ne maitrisait pas les pièces du jeu politique, prouvant ainsi son incapacité de s’acquitter de ses prérogatives constitutionnelles”.
Le dirigeant de Nidaa Tounes, Ridha Belhaj a déclaré, mardi, à l’agence TAP, que l’intervention du président de la République était “profonde et porteuse de nombreux messages”.
Les messages contenus dans l’interview, selon Belhaj, concernent notamment la question démocratique et l’impulsion du processus de transition démocratique dont en particulier l’engagement du président de la République à tenir les élections dans les délais.
Pour sa part, le porte-parole d’Ennahdha, Imed Khemiri, a déclaré à l’agence TAP, que “le mouvement Ennahdha n’a pas rompu ses relations avec le président Caïd Essebsi et n’a pas demandé à le faire”.
Selon lui, le mouvement “Ennahdha reste attaché au consensus national et à la poursuite du dialogue avec le président de la République”.
Il a ajouté qu'”Ennahdha demeure fidèle aux accords issus de la rencontre de Paris” (une rencontre en 2013, à Paris entre Rached Ghannouchi, président d’Ennahdha, et Béji Caïd Essebsi, au cours de laquelle ils ont convenu d’entamer un dialogue après la crise politique qu’a connue le pays).
Béji Caïd Essebsi avait annoncé, lundi soir, dans une interview télévisée, la fin du consensus avec le Mouvement Ennahdha.
“Il n’y aura désormais plus de consensus entre Caïd Essebsi et Ennahdha (…) Ennahdha a décidé la semaine dernière de mettre fin au consensus, à sa demande”.
De son côté, le secrétaire général du Courant populaire et dirigeant du Front populaire, Zouheir Hamdi a dit retenir de l’interview de Béji Caïd Essebsi que le conflit au sein de la coalition au pouvoir a été tranché en faveur du chef du gouvernement Youssef Chahed et d’Ennahdha.
Cela signifie d’après lui, qu'”Ennahdha monopolise le pouvoir et se sert du chef du gouvernement comme une vitrine provisoirement, probablement jusqu’à que qu’elle trouve une autre alternative”.
Et d’ajouter: le fait que le président de la République reconnaisse la gravité de la situation économique notamment aux niveaux de l’endettement et du déficit commercial, prouve l’échec de tout un système.
Béji Caïd Essebsi n’a proposé aucune issue positive; il constitue une partie intégrante de ce système, a regretté Zouheir Hamdi.
Pour le secrétaire général d’Al Joumhouri, Issam Chebbi, le président de la République laisse entendre dans son interview télévisée qu’il était dans l’incapacité de proposer des solutions pour sortir de la crise que traverse le pays et s’est contenté d’en poser le diagnostic sans plus.
“L’incapacité de Béji Caïd Essebsi de proposer des solutions montre qu’il ne maitrisait pas toutes les pièces du jeu politique et qu’il s’est contenté d’analyser les faits”, a-t-il dit.
Sur la relation entre le chef du gouvernement Youssef Chahed et le directeur exécutif de Nidaa Tounes Hafedh Caïd Essebsi, Issam Chebbi a estimé que le président de la République a utilisé tout son talent d’orateur pour défendre le rôle de son fils (Hafedh Caïd Essebsi) “bien qu’il soit le premier responsable de la dégradation de la vie politique et du blocage des rouages de l’Etat”.
Le seul point positif évoqué dans l’interview, a conclu Issam Chebbi, est l’engagement de Béji Caïd Essebsi à organiser les élections dans les délais et son intention de ne pas amender la Constitution avant les élections.
“Ce qui est déjà rassurant et garantit un tant soit peu de stabilité”, se réjouit-il.
Quant à Ghazi Chaouchi, secrétaire général du parti Courant démocrate (Attayar), le contenu de l’interview du président de la République a montré “son incapacité à trouver des solutions aux crises que connait le pays”.
Caïd Essebsi a admis qu’il “ne méritait pas la confiance que lui a accordé le peuple, vu son incapacité à exercer ses prérogatives constitutionnelles notamment à travers l’activation de l’article 99 de la Constitution alors même qu’il a déclaré dans l’interview que le gouvernement a perdu sa légitimité”.
Corroborant cet avis, le député de l’Union patriotique libre (UPL) et membre du nouveau groupe parlementaire “Coalition nationale”, Tarak Ftiti a estimé que l’interview du chef de l’Etat n’a pas envoyé de messages rassurants au peuple et n’a pas traité des véritables questions qui le préoccupent.
Selon lui, l’interview a comporté plusieurs contradictions et des inexactitudes comme le fait de parler de “tourisme partisan” ou d’absence de légitimité pour le gouvernement alors que le parlement lui a accordé la confiance lors du vote de confiance pour l’actuel ministre de l’Intérieur.