Dream City 2017 : La médina de Tunis, un lieu de mémoire en mouvement

Munis de cartes explicatives des divers parcours créations organisés dans le cadre de la manifestation Dream City, des festivaliers parfois perdus arpentent les ruelles de la médina d’habitude peu fréquentées durant cette période de l’année.

La médina de Tunis, cœur historique de la capitale tunisienne dévoile, ainsi, ses secrets et ses mystères pendant les cinq jours (4-8 octobre 2017) de la 6ème édition du festival Dream City et se révèle comme un lieu de mémoire en mouvement, dans une ville tournée vers l’avenir au delà des défis qui la guettent.

Malgré un temps pluvieux jeudi après-midi, les ruelles de la médina de Tunis, ses souks, ses monuments et ses quartiers s’animent et s’activent aux rythmes d’un festival qui met la vieille ville au centre d’une panoplie de créations artistiques multidisciplinaires, à la fois pointues et populaires. La médina se met en scène et s’illumine grâce aux œuvres d’artistes tunisiens et étrangers qui laissent voir son dynamisme et sa perpétuelle transformation.

Cachée derrière les bazars et le bruit rythmé du marteau des artisans de cuivre de la rue de la Mosquée de la Zitouna, l’auberge Zitouna devenue “wkala” au fil des années puis fermée et laissée à l’abandon se transforme, le temps du festival, en un espace d’expression d’une jeunesse rongée par la pauvreté et en quête de liberté. “A contre jour”, l’œuvre de l’artiste tunisienne visuelle Héla Ammar se dévoile à travers un éclairage en semi obscurité afin de mettre à nu les rêves et la détresse de la jeunesse des quartiers de la médina minée par la précarité et par une seule obsession “la Harga”.

Au fil des rues, un public hétérogène ,composé de touristes, de lycéens, d’étudiants ou de retraités, se laisse transporté par les odeurs des épices et des encens du Souk El Attarine où expose à la caserne portant le même nom, l’artiste canadienne Erin Manning. Dans “la couleur du temps”, l’artiste investit le patio de l’ancienne caserne devenue bibliothèque pour rendre hommage aux tisseurs et vendeurs d’épices de la ville.
Des fils jaunes et blancs en soie ou en coton traversent les arcades de patio et se mélangent avec la couleur jaune et l’odeur du curcuma dispersé sur le sol.

Dans le café du Souk Chaouachine, les rires et le bavardage des jeunes clients insouciants attablés se mêlent aux quelques boutiques encore ouvertes des chaouachias. Affrontant une médina en mouvement et mondialisée, les chaouachias tentent de résister à la transformation du souk et son adaptation aux besoins actuels de la population. A la place des chaouachias, des boutiques de bijoux, des restaurants populaires ou cafés investissent les espaces à la demande d’une clientèle qui délaissent ce couvre-tête traditionnel pour de nouvelles tendances vestimentaires.

Contre l’oubli et pour la sauvegarde de l’identité, la chachia est au centre de l’exposition “Tafkik” (démontage) de l’artiste tunisienne Sonia Kallel. Dans son travail artistique et documentaire autour de la fabrication de la chéchia, l’artiste expose au Palais Kheireddine une oeuvre qui lui ont pris quatre ans de travail. Archives, témoignages d’artisans et de fabricants se mêlent à une interprétation moderne de l’artiste autour de la fabrication du couvre tête rouge. A travers une chachia dessinée sous forme d’algorithme, Sonia Kallel interpelle son public, une manière pour elle de souligner que la survie de ce savoir-faire ancestral réside dans son ouverture à la technologie et à la modernité.