Le Forum Tunisien pour les Droits Economiques et Sociaux (FTDES) organise mercredi 26 octobre une conférence de presse au cours de laquelle sera présentée la première étude du centre tunisien des Etudes et des recherches sur le Terrorisme intitulée : «Terrorisme en Tunisie à travers les dossiers judiciaires» et l’annonce de la création du centre en question.
Il y a quelques mois, Imen Kochbati, sociologue démographe à la faculté des sciences humaines et sociales de Tunis, 9 avril et l’une des initiatrices de l’Etude avait présenté une conférence à la maison de Culture Ibn Rachik ou elle mettait en lumière les conditions de recrutement, d’endoctrinement et d’enrôlement des terroristes.
D’après la sociologue, «le phénomène du terrorisme djihadiste, n’est pas nouveau mais ce qui a changé c’est son ampleur et ses spécificités».
Il y a tout d’abord les vétérans comme les anciens détenus des affaires terroristes anciennes en Tunisie tels que l’affaire de Slimane ou encore ceux qui ont participé aux guerres en Afghanistan, en Irak et ces dernières années en Syrie. Il y en a même d’après les informations recueillis par la sociologue qui avaient des antécédents d’affaires terroristes en Europe et aux USA tel que les attentats de 11 septembre 2001.
En Tunisie comme dans nombre de pays arabes et européens et principalement la France où ce phénomène a pris des proportions alarmantes depuis 2011, il y eut l’endoctrinement dans les prisons : des détenus repentis à la recherche de nouveaux repères ou d’une autre forme de reconnaissance sociale et d’un statut dans leur communauté.
«La majorité des jeunes, explique Madame Kochbati, appartient à une tranche d’âge qui ne dépasse pas les 35 ans ce qui est dangereux car cette tranche d’âge représente 26 % de la population tunisienne et devrait en principe être préparée à prendre la relève sur les générations précédentes. Il y a également le phénomène de la marginalisation économique qui rends les jeunes plus vulnérables et des recrues faciles pour les Djihadistes terroristes…sans oublier les déçus de la «révolution», des leaders politique, et un désenchantement quant à leur avenir en Tunisie.
Nombre de gourous explique Imen Kochbati “considèrent que la population tunisienne a des prédispositions à écouter les discours religieux extrémistes et ensuite à devenir des combattants djihadistes”.
Parmi les constats tirés de l’étude réalisée par l’équipe de sociologues qui a initié tout le travail sur le Terrorisme en Tunisie à travers les dossiers judiciaires, est qu’il existe nombre de variables :
- Le jeune âge, l’appartenance à un milieu économique et social précaire, une connaissance de la religion sommaire et sélective des épisodes de l’histoire du musulman conquérant ou du musulman colonisé sans un travail de réflexion ;
- Un bagage culturel pauvre ce qui engendre le manque d’ouverture, de tolérance et la méconnaissance de l’autre ;
- Des personnalités fragiles caractérisées par un sentiment d’impuissance face à un avenir flou et un présent insécurisant, mais aussi un relâchement des liens avec l’entourage proche, la famille ou l’école.
Finalement, une grande partie des jeunes enrôlés dans les mouvements djihadistes et terroristes observent une posture dévalorisante de leur rôle dans la société et des représentations négatives du rôle de l’Etat et de l’institution sécuritaire ce qui explique son leur prédisposition à être en confrontation avec cette dernière et qui en fait leur ennemie.
«Il faut toutefois ajouter à ce mélange explosif d’éléments aussi déstabilisants les uns que les autres, un autre très important, c’est celui des « daaeya » des gourous qui sont capables de manipuler des personnalités déjà fragilisées par différentes variables. Conclusion ceux qui ont ces traits de caractères et qui subissent ces variables ne peuvent en général qu’être des projets de futurs terroristes. Ceux qui ont pu y échapper ont vu l’un ou plusieurs de ces variables cassés lors de cet endoctrinement ».
Plus de détails sur cette étude, la première du genre réalisée en Tunisie, seront donnés aux médias lors de la conférence de presse du mercredi 26 octobre.
Amel Belhadj Ali