Mehrzia Labidi, ex-vice-présidente de l’Assemblée nationale constituante (ANC), déclarait que “La voix de Béji CAID ESSEBSI est celle du passé”, dans ce cas on pourrait comprendre à contrario que la voix de Rached GHANNOUCHI est celle du futur. Mais de quel futur?
L’islamisation de la Tunisie par le bas, nouvelle stratégie du parti ENNAHDHA, à la suite de son 10ème congrès (mai 2016) semble être une imposture, une supercherie, cautionnée par le président de la République.
La 1ère stratégie de ENNAHDHA pendant le règne de la TROIKA fut une tentative de sa part d’islamiser le pays par le HAUT, avec tous les pleins pouvoirs que lui avaient accordé les résultats des élections à l’Assemblée nationale constituante (gouvernements JEBALI, LAARIADH, KHADMI -ministre des Affaires religieuses qui a laissé faire les mosquées investies par ANSAR ACHARIAA-, Habib KHEDERHI -dans la rédaction de la première version de la Constitution du 01 juin 2013… chaque ministre nahdhaoui avait un rôle dans la mise en place de cette stratégie, annoncée d’ailleurs par Hamadi JEBALI: le VIe Califat.
Ennahdha agissait sur trois plans :
1- Le 1er volet est politique assuré par Rached GHANNOUCHI,
2- Le 2ème volet est celui de la prédication assuré par les durs du parti : ELLOUZ et CHOUROU, et sur un plan plus politique KHADMI, ministre des Affaires religieuses,
3- Le 3ème volet, le plus dangereux et qui a coûté cher à notre pays, est le volet militaire et terroriste assuré par ANSAR ACHARIAA commandée par ABOU IADH, qu’on a laissé s’enfuir de la mosquée EL FATH sous les ordres de Ali LAARIADH, alors ministre de l’Intérieur.
Toutefois, cette stratégie a échoué : 2 événements, le premier national et le second international, se sont produits successivement durant l’été 2013 :
A) Sur le plan interne, le soulèvement du Bardo à la suite de l’assassinat de Mohamed BRAHMI. La société civile s’est bien mobilisée (partis de gauche associations, des indépendants, etc.), ce qui a conduisit Mustapha BEN JAAFAR, président de l’ANC, à suspendre les travaux de cette dernière.
B) Sur le plan extérieur, la 2ème Révolution égyptienne, ou le coup d’Etat militaire, a fait peur aux Nahdhaouis, fait “flipper les Nahdhaouis qui voyaient venir la fin de leur règne à l’instar des Frères musulmans en Egypte et du président MORSI.
C’est dans ces conditions que le gouvernement Ali LAARIADH abandonna le pouvoir au profit de Mehdi JOMAA, par suite du dialogue national conduit et parrainé par le quartet.
Le 10 congrès du parti Ennahdha, qui s’est déroulé les 19, 20 et 21 mai 2016 à Radès, le vendredi 19 mai pour la séance d’ouverture puis à HAMMAMET, n’a pas rompu avec le référent religieux.
D’ailleurs, le soir de l’ouverture du congrès, les grands ténors du parti ENNAHDHA déclaraient et je les cite : “Nous n’avons pas dénigré nos références religieuses, nous procédons uniquement à une spécialisation de l’action de notre mouvement : la séparation du politique et de la prédication“.
Sadok CHOUROU n’a jamais été inquiété, un grand fondamentaliste du parti ENNAHDHA, ainsi que Habib ELLOUZ, qui vont jouer un rôle important dans la nouvelle stratégie d’ENNAHDHA, l’islamisation de la TUNISIE par le bas.
Ils vont assurer la PREDICATION, soit dans des associations ou institutions et jouer un rôle de courroie de transmission avec le parti. Ainsi, l’Islamisation de la Tunisie se fera par le bas, nonobstant le rôle que pourraient jouer les imams nahdhaouis dans les mosquées et les directives éventuelles du ministre des Affaires religieuses.
D’ailleurs, le programme de l’actuel ministre sur 3 ans est de faire apprendre le coran à 100.000 jeunes, qui seront certainement une pépinière pour le parti ENNAHDHA.
Le parti ENNAHDHA voulait redorer son blason, apparaître sous un visage nouveau aux yeux de l’opinion publique nationale et internationale. Nous sommes désormais un parti moderne et démocrate, un slogan repris par tous les dirigeants du parti, notamment le Mejliss ACHOURA.
Désormais, la priorité pour nous est l’action économique, déclarait le chef du parti, Rached GHANNOUCHI.
Le président de la République, Monsieur Béji CAID ESSEBSI s’est inscrit dans cette nouvelle démarche d’ENNAHDHA, en assistant à son congrès, il a même pris la parole en 2ème lieu après Abdelfettah MOUROU, pour féliciter le parti ENNAHDHA de sa mutation.
La question qui demeure posée : “Monsieur Béji Caid ESSEBSI a-t-il vraiment cru au nouveau discours de ENNAHDHA qui semble avoir renoncé à l’ISLAM POLITIQUE”?
Connaissant le parcours et l’expérience politique de Monsieur Béji CAID ESSEBSI, il semblerait que ce dernier voulait préserver l’unité nationale et éviter au pays une guerre civile. C’est donc la voix de la sagesse et non la voix du passé, comme le disait Mehrzia LABIDI.
Khaled Ferid Bensoltane