Deux musiciennes, deux sont professeures à l’institut supérieur de musique de Tunis (ISM). Pour la première fois elles se sont rencontrées en duo où seul le dialogue des doigts, entre cordes et claviers, a livré un langage musical inédit riche en tonalités et d’une sensibilité extrême où les notes ont été retentis en hommage aux victimes de la barbarie terroriste du 18 mars 2015. Nathalie Tchernikh est une pianiste russe.
De nationalité tunisienne, Khadija El Afrit est docteur en musicologie et qanouniste (cithariste).
Dans une fusion inédite entre le qanun et le piano, le duo a hypnotisé le public pour l’emporter dans un voyage de compassion et de solidarité à partir d’un musée dont la nouvelle vocation est de défier la terreur. C’est du Musée National du Bardo qu’il s’agit.
Depuis ce lieu de mémoire et d’histoire, les deux artistes ont choisi de donner un concert dont le métissage en est le symbole, et dont l’amitié est le message. C’est dans ce lieu de partage, que les deux musiciennes, et pour cette deuxième soirée des Nuits du Bardo, ont voulu donner sens à la puissance, la liberté d’expansion et au triomphe.
En revisitant les répertoires classiques allemand, russe, français et roumain dans un arrangement propre à la pianiste russe, le duo a interprété, dans une profonde méditation “Ave Maria” la mélodie du compositeur français Charles Gounod (1818-1893) sur le premier prélude du premier livre du clavier bien tempéré du compositeur allemand Bach (1685-1750).
Avant de passer à un air chargé de douleur “Séparation” du compositeur russe Mikhail Glinka (1804-1857). Une sélection en hommage à la mémoire des victimes des ennemis de la vie.
Et c’est pour relever le courage, imposer la résistance et vaincre le désespoir que les deux artistes ont terminé leur prestation avec une composition plus rythmée, l’œuvre la plus célèbre “Hora Staccato” du compositeur roumain de la première moitié du 20ème siècle Grigoras Dinicu.
De cette ode à la vie, Khadija El Afrit a déclaré à l’agence Tap “l’idée de cette prestation revient à Nathalie. On a foncé depuis un mois avec des répétitions quotidiennes.
Notre objectif était de montrer qu’au-delà de nos différences culturelles et religieuses, on peut par l’art véhiculer l’espoir et transmettre les meilleures des valeurs humaines: amour, partage, respect, coexistence et complicité profonde”.
Main dans la main, les deux artistes dont les deux pays ont été endeuillés par les événements du 18 mars 2015 ont quitté le podium avant de céder la place à un spectacle folklorique de Mauritanie.
Un hymne à la vie et à la liberté qui s’est achevé avec une véritable transe des membres de la communauté mauritanienne où danse, joie, bonheur et art de vivre ont triomphé au Musée du Bardo scintillant de lumières et de couleurs.