Abderrazek Sahli, l’artiste, l’œuvre et la mémoire bien vivants

Sur le chemin de sable piqueté de figuiers de barbarie qui emmenait vers sa résidence à Bir Bouregba près de Hammamet, ou bien dans son atelier où on le voyait parler et finir l’une de ses œuvres, l’artiste plasticien Abderrazek Sahli (1941/2009), semble toujours bien vivant entre ses amis et ceux qui l’on côtoyés de près ou de loin.

Un documentaire (10 minutes), intitulé «Rezga», réalisé par Farid Bouslema, ami de Abderrazek Sahli, juste avant la disparition de ce dernier en février 2009, a été projeté, samedi au “B’chira art Center” à Sidi Thabet (gouvernorat de l’Ariana), en présence d’un cercle d’amis et d’artistes proches venus lui rendre un hommage émouvant.

«Quand on fait des études de beaux arts, on n’est pas encore un artiste», témoignait Sahli devant la caméra de son ami, ajoutant qu’avec l’expérience «on se rend compte que la peinture est beaucoup plus une question de création que de couleurs».

Teintés de beaux souvenirs, les témoignages de ses amis présents ont évoqué, l’homme et l’artiste, «un bon vivant, espiègle et triste à la fois, qui narguait les malheurs du monde avec son humour teinté de tendresse, de fraîcheur et de révolte.»

Dans un texte à neuf mains, ses amis écrivent aussi de «ce soixante-huitard disparu à la fleur de l’âge, laissant derrière lui une œuvre dont l’insolence et l’intelligence incarnent une volonté profondément philosophique exercée dans l’acte de peindre, de dire, de faire, de survivre et de résister».

Julien Blaine, artiste et poète français, a présenté une performance où il interprété un trio de chants d’un hymne à la planète terre, en hommage à son ami Sahli, qui fût l’un des performeurs sur la scène parisienne des années 70.

Pour son ami l’artiste Tao, «c’est lui qui m’a inspiré que la performance, ce n’est pas faire bien les choses mais c’est plutôt le fait de créer quelque chose qui n’a jamais existé auparavant». La singularité de Sahli, est qu’il «a petit à petit trouvé son code partant de son originalité et de son patrimoine pour atteindre l’universel».

Le plasticien Sami Ben Ameur, a, pour sa part, parlé ” d’un artiste qui voulait transgresser les normes, qui donnait de l’oxygène à la pratique artistique”. “Ses références sont de l’art pictural mais dans une dimension contemporaine”, précise encore l’artiste. Outre sa vocation d’artiste, Rzouga comme on aime le surnommer, était cet « homme humble, simple et au grand cœur ».

L’une des artistes présentes qui était également sa voisine, évoquait le souvenir d’un Sahli qui «aimait ses amis, manger, recevoir et partager».

Cette notion de partage chez lui allait de paire avec sa qualité plurielle faisant de lui «un artiste, un poète, une œuvre et un héritage», ont souligné ses amis, ajoutant «qu’il avait une attitude contestataire face à la toile, face aux gens, face à la vie».

Ils regrettent que l’œuvre colossale de cet artiste ne soit plus visible “ni dans les galeries, ni dans les espaces culturels, ni dans les musées tunisiens, bien que plusieurs de ses tableaux sont exposés dans des musées du Qatar, du Maroc et ailleurs”.