Tunisie : Appel à une mobilisation pour connaître la vérité sur le sort de Chourabi et Ktari

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L’organisation Reporters Sans Frontières (RSF), le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT), le Centre de Tunis pour la liberté de la presse (CTLP) et le comité de soutien de Sofiene Chourabi et Nadhir Ktari ont appelé vendredi à une mobilisation nationale, régionale et internationale pour connaître la vérité sur le sort des deux journalistes tunisiens enlevés en Libye depuis septembre dernier.

Lors d’un point de presse tenu à Tunis, Yasmine Kacha, responsable du bureau de RSF en Tunisie a dénoncé le manque de volonté politique et l’inertie des autorités tunisiennes et libyennes dans la gestion de l’affaire de Sofiene Chouabi et Nadhir Ktari.

« Nous demandons aussi au parlement tunisien d’ouvrir une commission ad-hoc qui effectuerait des investigations poussées sur le cas de sofiene et Nadhir à travers l’audition des membres du gouvernement précédent et actuel pour savoir ce qui s’est passé », a-t-elle ajouté.

Yasmine Kacha a signalé que l’autre demande s’adresse à la justice qui a ouvert une enquête en janvier 2015 sur l’affaire des deux journalistes.

« Nous réclamons que ce travail soit poursuivi mais aussi pour qu’une enquête soit ouverte sur la gestion de cette affaire par l’administration tunisienne et par toutes les personnes qui auraient eu des informations sur les deux journalistes tunisiens », a-t-elle précisé.

Elle a, par ailleurs, appelé la société civile et les médias tunisiens et étrangers à se mobiliser pour faire pression au niveau international et connaître la vérité sur le sort de Sofiene et de Nadhir outre le renforcement de la coopération internationale au niveau des autorités.

« RSF compte aussi demander au rapporteur des Nations Unies sur la Libye d’ouvrir une enquête sur le cas de Chourabi et Ktari mais aussi sur tous les crimes qui ont été commis contre les journalistes en Libye », a-t-elle fait savoir, rappelant que plus de 100 agressions et 5 assassinats ont été enregistrés en Libye en 2014 outre une dizaine d’agressions et un assassinat en 2015.

Intervenant à cette occasion, Kais Mabrouk, Directeur de la chaîne First TV a indiqué que Sofiene Chourabi, animateur et producteur de l’émission « Doussiyat » sur cette chaîne et son confrère Nadhir Ktari s’étaient rendus en Libye dans le cadre d’une mission d’investigation portant sur la situation à la frontière tuniso-libyenne.

« Ils sont entrés en Libye avec leurs passeports tunisiens et n’étaient pas munis de matériel douteux », a- t-il fait observer, indiquant que leur mission devait prendre fin le 8 septembre 2014 et depuis ce jour la chaîne a perdu tout contact avec eux. Zied Dabbar, membre du SNJT a souligné que les déclarations contradictoires des autorités libyennes et tunisiennes ont créé une crise de confiance.

« Cette affaire a été politisée par la Libye et par la Tunisie et on a donné la priorité au maintien des bonnes relations diplomatiques entre les deux pays au détriment de la découverte de la vérité », a-t-il ajouté, estimant qu’il y a une intention de clore le dossier et de considérer Sofiene et Nadhir comme assassinés.

Zied Dabbar a appelé la Tunisie à achever toutes les étapes juridiques et judiciaires en se référant au traité de Rome signé par la Tunisie et ce, avant d’internationaliser l’affaire.

Pour sa part, Mahmoud Dhaouadi, président du CTLP a souligné que la convention de 1962 entre la Tunisie et la Libye a prouvé son insuffisante, appelant à faire pression au niveau régional et international. « Certaines parties au niveau régional (de l’Egypte à l’Algérie) peuvent avoir de l’influence sur certaines parties en Libye et permettre de connaître la vérité », a-t-il dit.

Il a aussi estimé que les parties officielles libyennes doivent assumer leur responsabilité dans ce dossier. Dans ce contexte, il s’est interrogé sur les raisons de ne pas avoir auditionné l’ancien ministre de l’Intérieur libyen Omar Al-Sinki qui avait déclaré le 4 novembre 2014 que Chourabi et Ktari seraient libérés dans 15 jours alors qu’ils n’ont pas été retrouvés à ce jour.

« Le juge d’instruction devait aussi organiser un point de presse pour expliquer les difficultés rencontrées lors de sa mission en Libye », a-t-il noté, considérant que les services secrets tunisiens pourraient connaître certaines données sur cette affaire.

Assistant à la conférence de presse, Samia Kamerji, tante de Nadhir Ktari a appelé à la protection des personnes accusées par l’assassinat des deux journalistes et d’avoir recours au tribunal international de La Haye pour révéler la vérité sur le sort des deux journalistes.

« Les accusés peuvent faire des déclarations fausses sous la pression et nous n’avons plus confiance en le gouvernement libyen ni tunisien », a-t-elle dit Souad Chourabi, mère de Sofiene a affirmé que depuis le 8 septembre 2014, elle n’a pas entendu la voix de son fils. « J’ai, quand même, un fort pressentiment qu’il est en vie », a-t-elle confié à l’agence TAP.

Mme Chourabi, a aussi révélé que ni elle ni sa famille n’ont bénéficié d’un soutien moral ou psychologique de la part du gouvernement.