Les régions de l’intérieur du pays qui ont souffert durant de longues décennies de la marginalisation, sont devenues « le joker gagnant » sur lequel misent tous les partis politiques pour remporter la course vers le Palais du Bardo.
Des régions comme Kasserine, Sidi Bouzid, Gafsa, Siliana, le Kef, Béja et d’autres gouvernorats, berceaux de la Révolution tunisienne, constituent pour les partis politiques, toutes tendances confondues, la voie devant les mener vers le Palais du Bardo lors des élections législatives (2014).
Les données de l’institut national de la statistique (INS) révèlent que le taux de pauvreté dans la région du centre ouest (32,3%) est plus du quadruple de celui enregistré dans la région du Sahel (8%).
Ce taux a triplé dans les régions du nord ouest et du sud ouest ainsi que de l’est, atteignant respectivement 25,7%, 21,5% 17,9%, alors que ce taux ne dépasse pas 1,9% dans le Grand Tunis.
Les différents partis politiques ont élaboré des programmes spécifiques pour leurs listes dans les régions lesquels (programmes) n’ont pas donné de solutions concrètes aux problèmes auxquels font face ces régions comme la lutte contre la pauvreté, le renforcement de l’emploi, l’exploitation des richesses de la région dans le processus de développement, outre la construction des hôpitaux et des universités.
Ces programmes qui se ressemblent entre eux n’ont pas présenté une nouvelle approche et des méthodes innovantes pour résoudre les problématiques des régions à la lumière des difficultés économiques auxquelles le pays sera confronté au cours des prochaines années, selon les déclarations des membres de l’actuel gouvernement.
Au niveau de leurs programmes nationaux, tous les partis politiques se sont accordés à dire que le développement régional, locomotive du développement et de l’emploi, doit occuper le centre de la politique économique du pays. La plupart ont appelé à l’application du principe de la discrimination positive des régions conformément à la nouvelle constitution tunisienne qui stipule une classification à trois niveaux, à savoir la municipalité, le gouvernorat et le district.
Makram Montassar, professeur d’économie à l’université, estime que «le simple encouragement financier et fiscal au développement régional et la révision du découpage administratif sont insuffisants pour booster le développement régional et créer des emplois».
«Il faut adopter une nouvelle approche basée sur l’octroi aux régions du pouvoir de décision et de planification», a-t-il indiqué.
S’agissant de la révision du découpage administratif et municipal, il a affirmé que «les études réalisées dans le cadre de l’Institut tunisien des études stratégiques (structure publique) ont prouvé qu’il était beaucoup plus efficace de réduire le nombre de municipalités afin que leur nombre soit proche de celui des délégations (entre 240 et 264) contrairement aux appels des partis appelant à augmenter leur nombre.
L’Etat n’a pas la capacité de maîtriser un grand nombre de municipalités, a-t-il indiqué, ajoutant que pour être plus efficaces, les interventions au profit du citoyen nécessitent une meilleure maîtrise du nombre de municipalités, tout en maintenant les gouvernorats actuels.
S’agissant des districts, Montassar a estimé que le meilleur classement est celui qui prend en considération le nombre d’habitants, les spécificités démographiques, les ressources naturelles et économiques. Cette approche devra se diriger vers le classement du pays en 5 districts à savoir (le sud, Sfax et le centre ouest, Nabeul et Kairouan, Zaghouan et le Grand Tunis et Bizerte avec le nord ouest.
La mission du district consiste à assurer une planification stratégique de l’économie de la région alors que le gouvernorat se chargera de gérer les aspects sociaux de la région.
Le parti Nidaa Tounes (socio-libéral) promet un programme de développement pour la promotion du développement régional dans les différentes régions sur 10 ans, moyennant des investissements estimés pour le premier quinquennat à 50 milliards de dinars (provenant des secteurs public et privé à hauteur respectivement de 30 et 20 milliards de dinars).
Pour ce parti, il est nécessaire de préserver le découpage administratif actuel des régions, tout en oeuvrant à consacrer la démocratie locale et l’autonomie financière des régions. Le Front populaire (gauche) appelle dans son programme économique, à adopter une nouvelle carte de développement conforme aux priorités et qui tranche avec la centralisation et la bureaucratie bénéficiant de larges prérogatives et des budgets indépendants consacrant la décentralisation.
De son coté, le parti El Joumhouri a souligné la nécessité de promouvoir le développement région sur trois axes géographique notamment Béja/ Jendouba/le Kef/Siliana d’une part, Zaghouan/El Fahs/Kairouan/Sidi Bouzid, d’autre part, et la région du Sahael/Kairouan/Sbeitla et Kasserine. Cette démarche permettra de décloisonner les régions de l’Ouest et développer progressivement l’industrialisation à l’intérieur du pays. Le parti propose la réalisation d’un débat national sur le découpage administratif et propose un nouveau découpage sur 6 district.
Le parti Ennahdha qui a gouverné pendant 2 ans et exercé le pouvoir législatif pendant 3 ans s’est contenté de proposer de revoir le découpage administratif de manière à créer des districts horizontaux possédant une harmonie en ce qui concerne la géographie, la population et l’économie.
Il propose également la création de grands pôles urbains dans les régions intérieures, tout en consacrant 20% des investissements publics au développement régional.
Il en est de même pour son ancien partenaire au pouvoir “le forum pour le travail et les libertés-Ettakatol (social-démocrate) dont les propositions ne consistent qu’en l’enracinement du principe de la discrimination positive comme le stipule la Constitution.
Il s’agit, également, pour ce parti d’oeuvrer à créer un équilibre en matière de développement entre les régions et les catégories et ce, en mettant en place des mécanismes efficients tant administratifs que techniques. Ces mécanismes devraient permettre de booster les investissements public et privé, de créer des projets de développement et des postes d’emploi dans les régions marginalisées, outre la valorisation des richesses dont elles regorgent.
En revanche “Afek Tounes” (libéral) a réservé une grande partie de son programme au développement régional, concernant notamment les districts qui, selon ce parti doivent regrouper dans des districts nationaux les gouvernorats partageant les mêmes frontières et une infrastructure complémentaire aux plans économique et social.
Afek suggère de tenir compte des spécificités géographiques et de la présence de matières premières dans le district lors de l’élaboration des politiques sectorielles, tout district pouvant, toutefois, améliorer son programme dans une forme discutée au préalable avec l’Etat et les autres districts du pays.