La course effrénée des promesses électorales des partis politiques en lice pour les législatives, prévues le 26 octobre courant, se poursuit avec des visions variées et des programmes prometteurs, élaborés pour attirer le plus grand nombre de votes mais qui manquent toutefois de réalisme, selon les experts.
Ces promesses ont touché tous les domaines dont ceux de la santé et de l’emploi, deux secteurs sensibles qui nécessitent des réformes radicales, d’après les experts, qui estiment qu’il s’agit de promesses irréalistes dans la majorité des cas ou ne pouvant être concrétisés dans une période de cinq ans.
Le Parti Nidaa Tounes s’est intéressé au volet social dans son programme électoral et estime pouvoir réduire le taux de chômage avec la création de 90 mille emplois en moyenne par an.
Pour favoriser l’insertion des demandeurs d’emploi dans les entreprises, deux programmes seront mis en oeuvre: “le Contrat unique de formation (initiation/insertion) et le Contrat “Emploi pour l’avenir” ainsi que l’adoption d’une politique d’encouragement à l’entrepreneuriat et à la création d’entreprise.
S’agissant de la promotion sociale, les prévisions tablent sur la garantie d’une couverture maladie universelle qui demeure le seul garant de l’accès aux services de santé pour tous. Il s’agit aussi d’accélérer l’accès aux soins pour les populations défavorisées en prenant en charge les personnes ne disposant actuellement d’aucune couverture maladie.
Parmi les actions à entreprendre, selon ce parti, étendre le congé de maternité à quatre mois à partir du 9e mois au lieu de 2 mois actuellement, la mise à niveau des services d’urgences dans les hôpitaux universitaires et les hôpitaux régionaux des zones prioritaires.
De son côté, Le Front Populaire envisage un nouveau plan de développement qui permettra de diminuer le taux de chômage, améliorer le niveau de vie et l’infrastructure dans le pays.
Il s’agit de réaliser des sessions de formation sectorielles de mise à niveau et d’intégration professionnelle des diplômés du supérieur selon les demandes réelles du marché de l’emploi en vue de faciliter leur intégration dans le milieu professionnel.
Le programme électoral du Front Populaire promet aussi une allocution de recherche d’emploi selon des conditions et des mesures précises visant à inciter les chômeurs à rechercher des emplois et à réviser le code du travail pour mieux défendre les droits des travailleurs et des salariés en tenant compte des changements intervenus sur le marché de l’emploi.
Concernant la santé, la priorité est accordée à la santé préventive avec le souci de retracer la carte sanitaire nationale suivant les besoins réels des régions, instaurer une réforme du système de la santé publique au niveau national afin de garantir des prestations sanitaires de qualité supérieur proches du citoyen.
Le programme comporte également la création d’une Instance Nationale de contrôle des prestations sanitaires dans les secteurs public et privé.
Pour Le Mouvement Ennahdha, la priorité est de développer les prestations de santé surtout dans les établissements de première ligne (hôpitaux locaux et centres de la santé de base) et d’élargir le taux d’accueil dans les hôpitaux pour passer, dans les cinq prochaines années, de 21 à 26 mille lits. Le programme du parti prévoit aussi de développer la carte médicale des régions intérieures pour réaliser l’équilibre régional et la création d’un système informatisé intégré de la santé outre l’utilisation d’un identifiant unique et d’un dossier électronique pour chaque citoyen.
Il s’agit également de l’organisation et du suivi des droits des patients dans les hôpitaux avec une amélioration de la qualité d’accueil et des conditions d’hospitalisation et d’attente tout en veillant à renforcer le taux de production locale de l’industrie nationale des médicaments à 60pc contre (49pc actuellement d’après le programme d’Ennahdha).
Ennahdha vise également à réduire le taux de chômage à moins de 10pc à moyen terme, à augmenter le taux d’employabilité de 2,1pc actuellement à 3pc et à réduire le taux de chômage des jeunes et des diplômés du supérieur à plus de la moitié.
Le Mouvement vise également à créer un fonds d’assurance du chômage permettant de protéger les travailleurs licenciés et les entreprises économiques des mutations. ce fonds sera financé par plusieurs parties, dont l’Etat.
Pour le Parti Al Jomhouri, il s’avère nécessaire de mener une politique offensive de l’emploi à travers quatre axes: le premier concerne l’accès au crédit des moyennes et petites entreprises. Le second concerne les grands travaux de l’Etat (infrastructures et équipements publics). Le troisième touche l’appui institutionnel et financier aux activités de services de moyen et haut niveau. Le quatrième a trait à la décentralisation appelée à créer à la fois de la valeur ajoutée et de nombreux emplois dans l’ensemble des domaines de la vie économiques.
Le programme d’Al Jomhouri vise à Garantir à terme l’Universalité de l’accès aux soins et à améliorer durablement la santé de l’ensemble de la population à travers le réaménagement du système de santé publique, la création de pôles hospitalo-universitaires (4) ayant chacun son autonomie de gestion et la révision du cursus des études médicales et l’itinéraire de l’étudiant de manière à revaloriser le statut de l’interne et du résident.
“Chaque pôle englobera un ou plusieurs CHU à raison de 1 lit pour mille habitants” précise le programme qui ajoute qu’une nouvelle carte sanitaire de la Tunisie doit être élaborée afin de doter toutes les structures d’une efficacité optimale et garantir les soins et la disponibilité des médicaments essentiels en particulier dans les structures de première ligne.
“L’absence de médecins spécialistes dans les régions sera palliée au niveau du concours de résidanat: En dehors du quota annuel, un nombre d’étudiants sera défini pour choisir volontairement de travailler dans des hôpitaux régionaux” souligne le parti dans son programme électoral.
Parmi les solutions présentées pour lutter contre le chômage, l’Union pour la Tunisie propose la création d’un Observatoire dédié aux métiers et aux compétences qui aura un rôle de veille stratégique afin de détecter les besoins réels du marché de l’emploi et réguler l’offre et la demande.
Le parti Ettakatol espère garantir une couverture territoriale équitable de l’infrastructure de santé publique, garantir une couverture maladie pour tous les Tunisiens et augmenter le plafond annuel de couverture des dépenses maladie des enfants et des parents à charge de 50pc.
Son programme promet aussi de réviser les législations traitant de la toxicomanie en introduisant une graduation des peines pour les consommateurs de drogues et alourdir les peines pour les trafiquants.
Concernant le secteur de l’emploi, Ettakatol parle de la création d’une Caisse d’Assurance contre la perte d’emploi annoncée dans le contrat social signé le 14 janvier entre les partenaires sociaux et oeuvrera à créer une caisse solidaire d’Assurance chômage financée conjointement par les employeurs et les salariés et une contribution de l’Etat.
Pour M.Mongi Smaili, expert économique au service des études et de documentation à l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), l’emploi est lié au taux de développement les promesses des partis en terme d’employabilité et de réduction du taux de chômage est “théoriquement plausible mais demeure loin de la réalité”, a-t-il estimé.
D’après l’expert “les taux de croissance et d’employabilité avancés par les programmes des partis sont difficiles à réaliser étant donné la situation économique Mondiale et régionale difficile”. Il précise toutefois que les partis devraient en premier lieu s’intéresser à rétablir la confiance des investisseurs et bailleurs de fonds dans la Tunisie, relancer l’économie Tunisienne en présentant une vision raisonnable et réaliste accompagné d’un programme de réformes économiques structurelles et diffuser un message d’espoir, de confiance et d’optimisme.
“Les partis doivent apprendre à être réalistes et à élaborer des programmes électoraux capables de sortir la Tunisie de la situation difficile où elle se trouve depuis des années. La priorité aussi est le retour à la valeur travail qui constitue un garant de la reprise de la croissance” a-t-il soutenu.
De son côté, Pr.Habib Achour, ancien Directeur Général de la Santé au ministère de la Santé, a précisé à l’Agence TAP que la priorité actuellement est de définir le minimum imposable de prestations de santé dans chaque région du pays, ce qui n’est pas le cas actuellement, a-t-il estimé, et que les propositions présentées doivent porter sur l’instauration d’un système de soins équitable au profit des citoyens de toutes les régions et la lutte contre la décentralisation.
Il s’agit aussi d’améliorer certaines prestations de santé dans les établissements publics comme l’accueil des patients demeure en deçà des attentes, a-t-il dit, soulignant que ces partis doivent miser sur la formation continue dans le domaine de la santé pour les cadres médicaux et paramédicaux afin qu’ils soient au diapason des nouveautés et avancées scientifiques dans le secteur.
Il a rappelé que la Tunisie dispose de plusieurs points forts dans le domaine de la santé comme le taux d’accueil de patients dans les établissements de santé (nombre de lits) et le cursus de formation médicale des jeunes qui devraient être maintenu, selon ses dires, dans la mesure où ils sont conformes aux normes Européennes et Mondiales, précisant que les partis devraient s’intéresser davantage dans leurs programmes à l’amélioration constante des prestations de santé et des conditions d’accueil, d’hospitalisation et de suivi des citoyens dans ces établissements.