“Avec l’insécurité de deux ans et en particulier à la suite des événements de Mont Chaambi et l’assassinat de Brahmi en juillet 2013, le tournage prévu en Tunisie du film dramatique et biographique ” Queen of the Desert” ou ” La reine du Désert” du grand metteur en scène allemand Werner Herzog avec pour rôles principaux Nicole Kidman, Damian Lewis, Robert Pattinson et James Franco a été détourné vers le Maroc” a confié avec regret le producteur tunisien Tarak Ben Ammar à l’envoyée de TAP à Cannes.
Lors de sa visite au stand tunisien au Village International et à la suite d’une rencontre avec le ministre de la culture Mourad Sakli et de l’ambassadeur de Tunisie en France, le producteur a tenu à signaler que la star hollywoodienne Nicole Kidman qu’il venait de rencontrer à la 67ème édition du festival de Cannes, avait elle-même exprimé son regret de ne pas faire ce biopic sur la vie de Gertrude Bell, l’archéologue et aventurière britannique qui travaillait sous couverture au Moyen Orient au début du XXème siècle, en pleine Première guerre mondiale, où elle est chargée par son gouvernement de rejoindre T.E. Lawrence (alias Lawrence d’Arabie, lui aussi espion et chef de guerre mystique) pour rallier les tribus arabes à la cause de la Triple-Entente- et au passage d’installer la dynastie Hachémite en Irak.
Environ 70 films tournés en 40 ans ont dépensé en devises étrangères en Tunisie 700 millions de dollars
C’est bien dommage, a-t-il insisté, de ne pas pouvoir assister à la naissance de ce film sur notre plateau de tournage où Robert Pattinson aurait pu y venir pour incarner le rôle de Lawrence d’Arabie ainsi que Nicole Kidman dans le rôle de Gertrude Bell. Ces deux personnages sont considérés les principaux responsables de la création de l’Irak moderne. Dans le sillage, a-t-il rappelé, le chef d’oeuvre d’aventure historique britannique réalisé par David Lean en 1962 avec Peter O-Toole dans le rôle de Lawrence, a rencontré un immense succès et remporté sept oscars. Ce film tourné en partie au Maroc, Jordanie et en Syrie a aidé à propulser Omar Chérif au rang de légende du cinéma. Une version remontée a été présentée au Festival de Cannes 1989 avec 21 minutes inédites supplémentaires.
Maintenant, s’interroge-t-il, “comment voulez vous qu’on puisse convaincre un grand metteur en scène de venir au sud tunisien quant il lit à la une “Douz, Chaambi… Terrorisme, Salafistes…”.
Disposant des plus grands studios au monde arabe et en Afrique, la Tunisie considérée depuis les années 1900, un plateau de tournage idéal est aujourd’hui désertée alors que la force de la Tunisie depuis son indépendance était sa stabilité faisant d’elle une terre pacifiée et donc une destination prisée des grands metteurs en scène, producteurs et des célèbres stars du grand écran.
Depuis les années 70, se rappelle-t-il, plus de 75 grands films sont venus en Tunisie pour ne citer que Roberto Rossellini, Franco Zeffirelli, Roman Polanski, Steven Spielberg, Georges Lucas, Guido Chieza, Jacques Malaterre, Jean Jacques Annaud etc. De ce fait la Tunisie a été depuis ce temps et jusqu’aux années 2000, leader en Afrique du Nord, en Afrique et dans le Monde Arabe. Toutefois, une petite interruption s’est déclenchée avec la révolution. Le producteur témoigne ” En tournant L’Or Noir de Jean Jacques Annaud, pendant la révolution, on est allés avec l’acteur espagnol Antonio Banderas, promouvoir cette révolution populaire du pays pour réassurer également les autres vétérans de l’image”. Malheureusement, et avec les troubles sécuritaires, les producteurs, réalisateurs et les vedettes ont eu peur de venir. Ils ont tout simplement opté pour d’autres destinations et donc pour d’autres plateaux de tournage.
Toutes les prémices sont là aujourd’hui doublées d’une volonté politique et d’une coalition entre les partis pour se rattraper
Il ne faut pas oublier que le cinéma est une industrie, a-t-il expliqué. En terme de chiffres, les 70 films et plus tournés en Tunisie en quarante années ont dépensé en devises étrangères en Tunisie 700 millions de dollars et employé 860 mille Tunisiens.
Tout cela s’est fait dans une économie basée sur la sécurité, l’accueil impeccable, les meilleurs techniciens tunisiens formés avec les plus grands metteurs en scène, et grâce aussi à la qualité des services dans les hôtels, transports et aéroports.
L’insécurité a posé vraiment problème. “Personnellement j’avais au moins un carnet de commandes de trois films par an. Aujourd’hui tous les films ont changé de destination pour aller camper au Maroc, Portugal, Grèce, Espagne et en Bulgarie” a mentionné Tarak Ben Ammar.
Aujourd’hui, il est de notre devoir à tous de réconforter ensemble ici à Cannes et ailleurs nos amis pour relancer la Tunisie Terre de Tournage et créer de la sorte de la richesse et de l’emploi. Donc la priorité consiste à sécuriser la population parce que chaque Tunisien doit être le gardien de sa terre, de son peuple et de sa culture. Et le cinéma, a-t-il précisé, ne peut pas exister dans un pays instable.
Le festival de Cannes constitue en effet, une sorte de foire, un lieu de rencontres avec les producteurs, les réseaux des amis dans le métier, les stars du cinéma et les metteurs en scène, pour se rencontrer et discuter de films affaires et développer des idées.
Développer la notion du Ciné-Tourisme est nécessaire: la Parade électro de Nefta en est un exemple intelligent
Avec une lueur d’espoir, il confie “à travers des centaines de rendez-vous pendant dix jours de 08H00 à 24H00, on essaie tous ensemble de relancer et de promouvoir la Tunisie terre de tournage surtout que tout est rentré dans l’ordre : on a une Constitution et un gouvernement, de bons signes pour se rattraper, dit-il avec grand soulagement.
Cela dit, Il existe d’autres manières pour contribuer à cette sorte de boosting , le Ciné-tourisme. La Parade électro organisée au mois de février 2014 en est un des exemples les plus éloquents. Organisé à l’initiative intelligente des ministères du Tourisme et de la culture, l’événement “les Dunes électroniques de Nefta” a-t-il insisté a fait revivre le site touristique “Ong Jmal”, ce décor atypique à l’origine du succès de la saga-fiction “La guerre des étoiles” de Georges Lucas. Mais encore, cette manifestation a fait le buzz dans le monde entier.
A l’heure actuelle, a-t-il conclu, toutes les prémices sont là, doublées d’une volonté affichée du gouvernement de remettre le pays en marche ainsi que de la pacification entre les grands partis politiques, pour se mettre ensemble au service du pays et du peuple où pendant deux ans “le politique était sur le devant de la scène et l’économie, ignorée, ne nous a pas perdu de vue”.