Trois ans après le déclenchement de la révolution tunisienne, les dossiers de torture n’ont pas encore été ouverts, ont regretté les participants à la manifestation organisée jeudi à l’initiative de la présidence de la République à l’occasion de la célébration de la Journée nationale de lutte contre le torture.
Ils ont appelé à la conjugaison des efforts pour dévoiler les dossiers de torture et juger les personnes impliquées dans de telles pratiques inhumaines. Ils ont également plaidé pour l’identification de mécanismes adequats permettant de combattre ce fléau soit à travers la promotion des législations ou l’association des composantes de la société civile à ce combat.
« Durant des décennies sous la dictature, la torture a été pratiquée de manière systématique dans les geôles du ministère de l’Intérieur, de la garde nationale, de la douane et dans les prisons », a déploré la présidente de l’Organisation nationale de lutte contre la torture, Radhia Nasraoui. Nasraoui a ajouté qu’en dépit des efforts déployés depuis le départ du président déchu visant l’instauration de nouvelles traditions, il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine, ce qui commande, a-t-elle dit, de développer la coopération entre l’Etat et la société civile dans le cadre de la loi pour combattre ce fléau. Selon l’avocate, la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH) a reçu près de 390 plaintes de torture tel que l’a annoncé son président.
Ceci, a-t-elle précisé, sans compter les 300 autres plaintes parvenues à l’Organisation de lutte contre la torture sans pour autant que les dossiers des victimes soient ouverts ou que les inculpés soient traduits en justice. Pour sa part, le professeur de droit Omar Boubakri, a indiqué que la législation tunisienne ne reconnaissait pas le crime de torture avant l’amendement du code pénal en 1999 par l’ajout d’un article qui définit ce crime et détermine les sanctions.
Toutefois, s’est-il félicité, la Tunisie post-révolution a connu un saut qualitatif en matière de lutte contre la torture à travers la mise en place de mécanismes appropriés, citant la ratification du protocole additionnel à la Convention internationale contre la torture et l’inscription dans la nouvelle Constitution d’un article prohibant la torture morale et physique. Les familles des victimes de la torture prenant part à la manifestation ont accusé les autorités et la société civile de mener une politique sélective dans le traitement des dossiers des victimes, appelant à la réhabilitation de leurs proches et demandant de juger les tortionnaires.