Il faut être naïf pour croire que les actes terroristes perpétrés en Tunisie, dont les victimes du dernier acte à Jendouba ont été deux agents de la Garde nationale, un autre des services pénitentiaires et un simple citoyen, sont l’œuvre du hasard.
Ils font plutôt partie d’un plan bien réfléchi par ceux qui ambitionnent de reprendre les rennes du pouvoir pour fragiliser encore plus un Etat dont presque tous les ministères ont été dotés de structures parallèles. Et à leur tête, le plus important celui de l’intérieur. Mehdi Jomaâ, chef du gouvernement devrait peut être réfléchir et sérieusement à mettre en place une commission nationale pour une inspection approfondie du ministère. Son rôle serait d’enquêter dans le détail sur ce qui s’y passe depuis que les activistes des droits de l’homme l’ont démembré en faisant une proie facile pour les prédateurs du pouvoir attendant l’occasion de s’en saisir, cellules dormantes à l’appui.
La commission devrait avoir pour principale mission de se renseigner sur le devenir des rapports et données établis par des agents spécialisés dans la question terroriste et sécuritaire, transmis à qui de droit et qui n’ont pas trouvé écho chez Ali Larayedh successivement ministre de l’Intérieur et Chef du Gouvernement après le 14 janvier ainsi que Chez Wahid Toujani, directeur général de la Sûreté nationale.
De source confidentielle, on dénonce même le grand nombre de vrais faux passeports livrés ainsi que celui des autorisations de port d’armes. Un haut responsable en aurait livré à lui seul 180. A quel titre ? Des fusils de chasse pour une battue de sangliers ou plutôt la traque de nos forces de police et de nos forces armées ?
Toujours de source confidentielle mais confirmée publiquement par les syndicats de la police nationale, la structure parallèle installée au ministère de l’Intérieur serait très active, il y aurait des CD comprenant des informations et des écoutes qui seraient régulièrement envoyés au siège d’un parti parait-il assez puissant et actif sur terrain.
Qui croire et quoi croire ? Que des individus prêtent allégeance à un parti, une idéologie ou même échangent leurs services contre monnaies sonnantes et trébuchantes aux dépends de la sécurité nationale et en échange du sang des innocents? Cela dépasse notre logique en tant que Tunisiens épris de paix et de sérénité.
Ce qui nous dépasse est surtout le fait que l’on n’ait pas pris en considération ce que les fins limiers du M.I disaient, redisaient et répétaient à longueur de journées, semaines et mois depuis deux années sur l’évolution des groupuscules terroristes qui gagnaient du terrain en organisation et en moyens. Les rapports de renseignements seraient clairs, détaillés avec noms et adresses. On y aurait même établi, preuves à l’appui, que des armes d’assaut avaient été distribuées à Daouar Hicher, Sidi Hassine et Cité Ettadhamen.
Malgré cela, le ministère n’avait pas bougé d’un pouce justifiant sa position par le fait qu’il ne fallait pas reproduire les bavures du régime Ben Ali. En guise de bavures, c’est le peuple, les innocents et les forces sécuritaires du pays qui trinquent et payent pour des prétendues préoccupations de préservation des droits de l’homme (sic). D’ailleurs, en désespoir de cause, les responsables sécuritaires, pour la plupart compétents et hautement qualifiés ont été obligés de recourir aux syndicats de police, dont ce n’est pourtant pas le rôle, pour qu’ils s’expriment publiquement sur la question terroriste.
«Notre ministère est démembré, il a besoin d’être restructuré. Il faut également renforcer les structures de base et rétablir leur confiance en leurs supérieurs. Aujourd’hui, il y a une absence totale de discipline et une peur des représailles au cas où le parti Nahdha reprendrait le pouvoir» dénonce un haut cadre qui préfère taire son nom.
Pour lui, il va falloir un tremblement de terre pour sauver le ministère, car les cellules dormantes du parti islamiste seraient toujours aussi actives au national comme à l’international : « Du coup, les services de renseignement étrangers n’ont plus confiance en nous et ne nous livrent pas les informations les plus importantes quant aux mouvements des terroristes ».
A ce jour, nombre de responsables sécuritaires au Ministère de l’Intérieur se posent des questions sur le degré d’implication de certains de leurs pairs dans les assassinats politiques de feu Chokri Belaïd et El Haj Al Brahmi. Ils affirment que les opérations terroristes perpétrés aujourd’hui sur le sol national ne sont pas le fait du hasard mais la preuve d’un plan pré-établi pour prendre en otage le gouvernement Mehdi Jomaâ. «Ainsi, le Chef du Gouvernement se sentira obligé de garder les mêmes têtes en attendant que déstabilisé par l’insécurité et remis en cause par le peuple, ce gouvernement soit poussé vers la porte de sortie et les structures parallèles mises en places auparavant dans tous les ministères prennent la relève».
Les actions des terroristes suivent un mouvement ascendant. Raoued et ensuite Jendouba. Les exécutants étaient identifiés par les services de police. Ils sont descendus exprès de Chaambi, suite à la désignation du nouveau ministre délégué à la sureté nationale lequel familiarisé aux missions renseignement risquait de leur porter du tort. « Depuis deux ans, nous dénonçons l’avantage pris par les mouvements extrémistes et terroristes sur le terrain en Tunisie, et nous lançons des appels pour prendre nous-mêmes les devants et éviter d’entrer dans le cercle vicieux de l’Action/Réaction. Les décideurs au ministère de l’Intérieur ont joué aux autistes et ont même limogé certains d’entre nous, avançant leurs retraites et procédant à des mouvements au sein du corps sécuritaire pour éloigner les plus éveillés d’entre eux des centres de décisions et les empêcher d’accéder aux informations”.
Le pire qui puisse arriver aujourd’hui est que suite aux faux barrages, les terroristes descendent dans les petits patelins et les villes pour semer la terreur et ensuite passent à la vitesse supérieure, celle des kidnappings et des bombes déposées dans les grandes surfaces ou les centres urbains peuplés.
Amel Belhadj Ali