Les participants à l’émission “New Arab Debates” organisée lundi soir à Tunis ont affirmé que le printemps arabe est loin d’être achevé et que les réalisations de la Tunisie sur la voie du processus de transition démocratique seront un modèle qui aura un impact positif sur l’ensemble des pays arabes qui ont connu une révolution.
“New Arab Debates” est une émission télévisée produite, depuis 2011, par le journaliste britannique Tim Sebastian. La nouvelle émission réalisée, lundi soir, intitulée “Le printemps arabe est-il achevé?”, a été animée, dans sa version en anglais par M.Sebastian alors que la version arabe a été assurée par la journaliste égyptienne May Cherbini.
Près de 80% du public présent au débat a affirmé que malgré les difficultés la Tunisie avance à pas surs vers l’instauration d’un modèle démocratique exceptionnel alors que près de 20% du public a estimé que le printemps arabe s’est transformé en “un Cauchemar” pour les peuples arabes après que les révolutions pacifiques se soient transformées en tueries fratricides, effusions de sang et rivalités intellectuelles et sectaires.
La version en arabe du face à face télévisuel a invité l’expert en histoire islamique Neji Jalloul qui a défendu la thèse de la fin du printemps arabe s’opposant à Khalil Amiri, fondateur de l’institut arabe de la gouvernance et chargé de mission auprès du gouvernement démissionnaire, qui a soutenu l’idée que les révolutions arabes ont été couronnées de succès.
M. Néji Jalloul, qui avait démissionné du bureau exécutif du parti républicain en septembre 2013, a soutenu que le printemps arabe s’est soldé par un échec. “La révolution en Tunisie qui s’est fondée sur les revendications de l’emploi, de la dignité et de la liberté n’a pu réaliser aucun de ses objectifs alors que nous enregistrons l’augmentation de la pauvreté et du nombre des affamés. Le pays exporte désormais la prostitution”, a-t-il dit. “Au moment où nous revendiquons plus de dignité pour le pays, nous constatons que les ambassadeurs et les consuls basés à Tunis violent l’intégrité et la souveraineté nationale. Les décisions de l’Etat sont dictées par des parties étrangères”, a t-il accusé.
L’expert en histoire islamique a constaté une déviation de la révolution tunisienne vers des questions marginales avec des accusations d’apostasie et un intérêt croissant pour les tenues vestimentaires des femmes, l’excision et djihad el niqah. La lutte pour le développement s’est transformée en une guerre contre le terrorisme, a-t-il ajouté.
L’intervenant a estimé que l’économie tunisienne se trouve actuellement au fond du gouffre puisque 50% de l’économie dépend des circuits parallèles non organisés dont les rouages sont gérés par les réseaux de contrebande. “Nous sommes devenus un peuple de mendiants. Les dettes de la Tunisie ces deux dernières années dépassent de loin les prêts contractés par le pays depuis l’indépendance” a t-il dit.
M.Jalloul s’est interrogé sur le bien fondé des affirmations avancées par “certains optimistes” qui considèrent l’adoption de la Constitution en Tunisie comme une réalisation alors qu’il s’agit d’un document inspiré de “la pensée des frères musulmans” fruit d’un consensus des constituants autour d’un seuil minimal au niveau des différents articles de la constitution.
De son côté, M. Khalil Amiri a critiqué cette vision en affirmant que “la Tunisie est sur le point de réaliser un des objectifs les plus importants, s’agissant de la constitution, qui aura un impact fructueux sur l’ensemble de la région arabe. Il cite à cet égard des articles publiés dans la presse américaine qui affirment que la Tunisie, source d’inspiration pour les révolutions arabes, a donné la preuve que l’instauration de la démocratie au Moyen-Orient est loin d’être un mirage.
Il a rappelé que la Constitution tunisienne est adoptée par consensus et non pas sur la base de la loi de la majorité et de la minorité, affirmant que cette approche témoigne de l’adhésion de l’élite politique à une démarche qui place l’intérêt national et l’édification d’un modèle démocratique au-dessus de toutes autres considérations de manière à rendre du printemps arabe une réalité concrète.
M. Amiri a renié l’idée d’un échec de l’économie nationale indiquant que tous les indicateurs confirment la croissance de l’investissement et la régression du taux de chômage malgré les difficultés aux plans national et international.
L’intervenant a considéré que l’instauration du processus démocratique a un coût et nécessite du temps soulignant que durant la période post-révolution le gouvernement et l’opposition ne disposaient pas de l’expertise démocratique nécessaire. Nous constatons aujourd’hui une plus grande confiance et une meilleure maîtrise du processus en vue de l’instauration d’une démarche démocratique fondée sur le respect de la différence et du pluralisme.
“Les relations entre le gouvernement et l’opposition se sont améliorées avec le dialogue national ce qui présage du succès de la révolution tunisienne” a estimé M. Amiri.
Les participants parmi le public ont affirmé que la révolution tunisienne est loin d’être celle “des affamés” mais qu’elle était une révolution de la jeunesse, de la liberté et de la dignité. Ils se sont interrogés sur les dessous de “l’exclusion des jeunes” et le non respect, par les acteurs politiques, des principes de la révolution.
Ils ont également affirmé que le printemps arabe est encore à ses débuts et que la révolution se poursuivra jusqu’à la réalisation de ses objectifs.
“New Arab Debates”, dans sa version en arabe et en anglais est diffusée par la chaîne allemande Deutsche Wella TV ainsi que certains et ses partenaires dans le monde arabe, dont Hannibal TV.