Tunisie : Quatre ONG pour une protection accrue des droits humains

“La nouvelle Constitution de la Tunisie doit répondre aux normes internationales en matière de droits humains et aux obligations de ce pays au regard du droit international “, selon quatre organisations de défense des droits humains, à savoir: Al Bawsala, Amnesty International, Human Rights Watch et le Centre Carter.

Ces organisations ont salué vendredi, dans un communiqué conjoint, les efforts de la Commission des consensus au sein de l’assemblée nationale constituante,(ANC) pour parvenir à des arrangements avant le début du vote de la constitution et éviter les éventuels blocages lors des débats en plénière. Ces organisations qui avaient suivi dès le début, le processus d’élaboration de la constitution ont appelé l’ANC, à l’occasion du début de la discussion article par article du projet de Constitution, à prendre en compte les propositions de modifications du projet de constitution proposées, faites en juillet 2013, à savoir:

– La révision de la disposition sur la peine de mort dans la nouvelle Constitution. Les quatre organisations s’opposent à la peine de mort en toutes circonstances parce que constituant, selon elles, une violation du droit à la vie et du droit de ne pas subir de traitement inhumain, cruel ou dégradant.

– L’amendement de l’article 19 afin que tous les traités “dûment approuvés et ratifiés” par la Tunisie, sans exception, soient hiérarchiquement supérieurs aux législations nationales,

– L’amendement de l’expression “les droits de l’homme suprêmes, nobles et universels” dans le Préambule, en supprimant les termes “suprêmes” et “nobles”, pour éviter qu’ils soient interprétés comme impliquant une une hiérarchisation des droits de l’homme universels. La terminologie “suprêmes/nobles” avait été introduite dans le 4e draft en remplacement d’une référence controversée aux “spécificités culturelles du peuple tunisien”.

– La Consécration des principes d’égalité et de non- discrimination devant la loi et leur application à toute personne relevant de la juridiction nationale tunisienne, les nationaux comme les étrangers. L’article 20 devrait préciser que la discrimination, directe et indirecte, est interdite pour des raisons de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou autre, d’origine nationale ou sociale, de propriété, de naissance ou toute autre situation, et que les lois ou politiques étatiques discriminatoires sont inconstitutionnelles.

– L’égalité des chances et en droits entre les hommes et les femmes. La Constitution devrait préciser que les hommes et les femmes sont égaux et ont droit à la pleine égalité en droits et dans les faits, ainsi qu’à l’égalité des chances dans tous les domaines de la vie, qu’ils soient civils, culturels, économiques, politiques ou sociaux, tels que définis dans les normes internationales relatives aux droits humains.

– Le renforcement de l’article 48 en incluant une disposition obligeant les juges à toujours avoir à interpréter les textes de loi, y compris la Constitution, de manière plus favorable à l’application d’un droit ou d’une liberté fondamentale, en précisant qu’ils doivent tenir compte de l’interprétation des traités relatifs aux droits humains par tous les organes conventionnels, en tant que norme minimale. – La garantie des droits économiques, sociaux et culturels, en précisant que la Tunisie a l’obligation d’assurer progressivement le plein exercice de ses droits, en utilisant le maximum de ressources disponibles dans le pays, notamment en prévoyant des mécanismes spécifiques pour mettre graduellement en œuvre ces droits.

– Spécifier que les droits considérés comme intangibles, ou absolus, par le droit international, tels que l’interdiction de la torture et de l’esclavage et le droit à la liberté de conscience demeurent protégés et interdire leur restriction en vertu des pouvoirs d’urgence. – Mentionner clairement une interdiction des traitements ou peines cruels, inhumains et dégradants et faire respecter le principe de non-refoulement, c’est-à-dire le retour forcé vers un pays où il y’a un risque sérieux de persécution.

Intégrer dans l’article 104 les normes internationales sur l’indépendance de la magistrature, notamment l’affirmation sans équivoque de la garantie d’inamovibilité, ainsi que les garanties relatives à la nomination, l’évolution de la carrière et la discipline. et préciser que la révocation des juges n’est possible que pour faute grave, à la suite de garanties d’un procès équitable et lorsqu’elle est décidée par un haut conseil de la magistrature. De plus, le chapitre sur le pouvoir judiciaire devrait inclure des garanties solides de l’indépendance du parquet vis-à-vis du pouvoir exécutif.

Ces organisations ont appelé également l’ANC à adopter le texte du projet recommandé par la Commission des Consensus, afin de supprimer les restrictions excessives sur les droits et libertés dans la majorité des dispositions, y compris la liberté de circulation, la liberté d’expression et information, et la liberté de manifestation.

Ils ont également proposé l’adoption du texte présenté par la Commission des Consensus concernant les dispositions transitoires, notamment, l’octroi à la Cour Constitutionnelle, et ce, dès sa création qui doit se faire dans l’année qui suit les élections législatives, et la doter d’un pouvoir total pour contrôler la constitutionalité des lois (chapitre 10) et l’extension du droit de saisine de la cour au premier ministre ainsi qu’à 30 membres de l’Assemblée des Représentants du Peuple, en plus du Président de la République comme prévu initialement.