Mehdi Mabrouk : Nous aurions souhaité que la foire du livre se tienne dans de meilleures conditions

“C’est par le livre et non par l’épée que l’Humanité vaincra le mensonge et l’injustice, conquerra la paix finale de la fraternité entre les peuples”, écrivait Emile Zola (1840-1902).

Mais “que voulez-vous que je lui apprenne? Il ne m’aime pas”, disait avant lui Socrate, dans l’une de ses plus belles citations, car pour ce philosophe grec, l’un des inventeurs de la philosophie morale, la réponse semble évidente: “Si vous êtes beau, restez digne de votre beauté et si vous êtes laid, faites oublier votre laideur par votre savoir”.

Un jour après les funérailles de Socrate “le Tunisien”, l’un des six martyrs de la garde nationale assassinés le 23 octobre lors des affrontements de Sidi Ali Ben Aoun (Sidi Bouzid), la Tunisie a vécu ce matin au rythme de l’ouverture de la Foire internationale du livre de Tunis, “une ouverture qui constitue en elle-même, en ce deuxième jour de deuil, un grand défi” a fait savoir le directeur de la 30ème édition, la deuxième après la révolution du 14 janvier 2011.

Dans une atmosphère amère baignée de tristesse, le palais des congrès du Kram, qui abrite le grand rassemblement du livre en cette période de l’année, a ouvert aujourd’hui ses portes pour tous les amis du livre et du savoir.

L’ouverture officielle s’est déroulée en présence des ministres de la Culture, Mehdi Mabrouk, des Affaires religieuses, Noureddine Khademi, ainsi que du directeur général de l’Alecso, Abdallah Mhareb, et des membres du corps diplomatique accrédité en Tunisie, mais en l”absence du chef du gouvernement qui devait inaugurer la foire, a constaté une journaliste de l’agence TAP sur les lieux.

En effet, et à la lumière de la conjoncture dans le pays, la scène politique devrait connaître aujourd’hui le démarrage du dialogue national entre gouvernement et opposition pour une “sortie de crise”.

Cela dit, ce rendez-vous purement réservé aux livres et à la lecture, a été ouvert dans les délais, mais “nous aurions souhaité qu’il se tienne dans de meilleures conditions”, a fait remarquer le ministre de la Culture.

Malgré le contexte difficile “rien ne justifierait de renoncer à l’événement car la célébration du livre est le meilleur des remèdes contre l’inquiétude et le pessimisme”, a-t-il noté, rappelant dans ce contexte que cette conviction constitue le principe moteur du ministère de la Culture et la continuité de son action dans l’organisation de l’ensemble des manifestations notamment estivales pendant les moments de tension extrême faisant allusion aux événements sanglants du Mont Chaambi (29 juillet 2013, assassinat de huit soldats par des terroristes).

Aujourd’hui, dans cette atmosphère de tension extrême, la Foire a été inaugurée dans l’espoir “d’ouvrir un nouvel horizon dans lequel la culture fécondera la vie, ancrera l’espoir et permettra de construire une rationalité autant éloignée des carcans qu’elle sera proche des êtres profonds”, selon ses propos.

“La culture ne peut à elle seule guérir notre époque des maladies qui la rongent. Cependant, le livre a ce pouvoir de constituer une fondation essentielle pour le progrès”. C’est pourquoi, a-t- il précisé, “la désaffection par rapport au livre et à la lecture est un indice de ces maux qui nous rongent et qu’il convient de combattre aussitôt que possible”.

Pour ces raisons, “notre peuple a besoin de plus de livres encore pour pouvoir réaliser ses espoirs et ses multiples attentes”.

Et “si cette sortie de la culture catastrophique demeure encore possible, c’est parce que le livre représente toujours un enjeu vital au coeur même de la catastrophe”, a écrit Ezzeddine Gaha dans son mot introductif car “tant qu’il y aura des livres, des créateurs libres, des éditeurs et des diffuseurs engagés, il y aura de l’espoir”.

Il est à signaler que tous les spectacles d’animation prévus aussi bien à l’avenue Habib Bourguiba que dans l’enceinte de la foire ont été annulés. Seules les activités intellectuelles sont maintenues. Le programme culturel de la journée du 25 octobre comporte les activités suivantes:

12H00-13H30: Rencontre avec Jelloul Azzouna 15H00-17h00: Table ronde sur le thème ” Questions autour du livre d’art en Tunisie” 15H30-17hOO: Rencontre avec Ali Louati 16H00-17H30: Conférence de Ibrahim lo sur “L’état du livre au Sénégal” dans le cadre “Sénégal, invité d’honneur”. 17h-19H30 : soirée poétique avec la participation de Tahar Bekri, Kamel Ayadi, Kamel Ghali, Azzouz Jemli, Hemant Divate (Iran), Sabri Rahmouni, Majda Dhahri, Chaker Laybi (Irak) et Walid Tlili.