Les envois des fonds par les migrants tunisiens, estimés à 5% du PIB et 28,7% de l’épargne nationale en 2012, ne sont pas utilisés à bon escient pour le développement de l’économie nationale en raison du coût élevé de leur transfert lequel peut atteindre 13% du montant transféré, a indiqué M.
Chedly Ayari, Gouverneur de la Banque centrale de Tunisie(BCT). «D’où l’intérêt, a-t-il dit, de réduire ces coûts de transfert, au vu de l’importance de ces fonds dans la préservation des équilibres macro-économiques du pays et le maintien de la balance commerciale, notamment en cette conjoncture difficile».
Et d’ajouter, que les transferts des migrants, qui représentent 10% de la population tunisienne, sont restés relativement stables, malgré la crise financière touchant presque tous les pays d’acceuil, à la différence des autres sources d’entrée de devises, en l’occurrence les IDE et les recettes touristiques.
Ces envois ont atteint 3,539 millions de dinars (MDT) en 2012, contre 2,822 MDT en 2011, soit en progression de 25,4%, a précisé M. Ayari, à l’ouverture d’un atelier organisé mercredi, à Tunis, par la BCT et la Banque Africaine de développement(BAD) sur «la réduction du coût des transferts d’argent des migrants et l’optimisation de leur impact sur le développement». Il a fait savoir que la BCT réfléchit, actuellement, à la possibilité de lancer, en 2014, des emprunts obligataires réservés aux tunisiens résidents à l’étranger pour le compte de l’Etat, en vue d’affecter l’épargne mobilisée au financement de projets de développement.
M. Ayari a rappelé que la BCT, a invité, en Janvier 2013, les banques tunisiennes à supprimer toute clause d’exclusivité, que comportent les contrats conclus entre les sociétés internationales de transfert d’argent et les opérateurs sur le marché (banques, poste ), lesquelles constituent l’un des principaux facteurs contribuant à la hausse du coût des transferts. Ces clauses sous-entendent, en fait, le monopole de réalisation de l’opération par une seule et unique société de transfert, selon le Gouverneur.
«La levée de la clause d’exclusivité ne permet pas à elle seule de réduire les coûts de transfert, elle doit être accompagnée d’autres mesures à caractère réglementaire et institutionnel», a estimé pour sa part, M. Naceur Bourenane, représentant de l’Association Epargne sans frontière (ESF), spécialisée dans l’information et la sensibilisation aux techniques financières au service du développement. Ces mesures concernent l’ouverture du marché des transferts d’argent à la concurrence et la modernisation du cadre réglementaire de manière à favoriser la diversification de l’offre de services et de produits financiers, a souligné M.
Bouranane en présentant les résultats de l’étude de l’ESF sur “les coûts de transfert des fonds des migrants dans la région du Maghreb et la zone franc”. A cet effet, il convient d’optimiser l’utilisation des TIC, via notamment, le « mobile banking », le développement de la monétique et de l’« e-banking », a-t- il dit. Elaborée par ESF sur demande du groupe de la BAD, dans le cadre de son initiative Migration et développement et pilotée par la BAD et l’Agence française de développement (AFD), cette étude a pour objectif d’identifier les moyens à même de réduire les coûts de transfert des migrants et l’optimisation de leur utilisation dans le Maghreb et la zone Franc. L’étude a ciblé cinq pays, en l’occurrence, le Maroc, la Tunisie, le Sénégal le Cameroun et Comores.
Se prononçant sur les opportunités d’investissement des tunisiens à l’étranger en Bourse, M. Mohamed Bichiou, directeur général de la bourse de Tunis, a fait savoir que la part des investissements des migrants en bourse demeure marginale, en raison notamment, de la méconnaissance des placements boursiers, de l’étroitesse du marché, des risques liés au taux de change et des coûts élevés relatifs aux transactions boursières (courtage, commissions..). Il a suggéré, à cet effet, d’engager des actions de sensibilisation et de promotion à l’intention des tunisiens à l’étranger, de favoriser les doubles cotations des entreprises tunisiennes sur les places boursières étrangères et de lancer des fonds dédiés au financement de projets spécifiques (infrastructure, développement régional).