Affaire “Bernard Tapie – Crédit Lyonnais” : Le patron d’Orange, Stéphane Richard, en garde à vue

Le patron d’Orange et ancien directeur de cabinet de Christine Lagarde à Bercy,  a été placé, ce lundi 10 juin 2013, en garde à vue pour “octroi d’un avantage injustifié” dans l’affaire qui oppose Bernard Tapie au Crédit Lyonnais. C’est en tout  ce qu’ont rapporté plusieurs médias ce matin.

Il lui est reproché d’avoir donné son feu vert à l’arbitrage privé, qui a permis à Bernard Tapie d’obtenir, en juillet 2008, 403 millions d’euros pour solder le litige sur la vente d’Adidas, puis d’avoir refusé d’exercer un recours contre l’arbitrage. Il a indiqué avoir agi sur ordre de Christine Lagarde.

L’affaire Bernard Tapis-Crédit lyonnais

Au début des années 1990, Bernard Tapie met en vente Adidas, entreprise qu’il a achetée en 1991 et dont il veut se défaire en 1993, une fois devenu ministre.

L’homme d’affaires demande au Crédit lyonnais de s’occuper de la vente de ses parts de la société. La banque réalise d’importantes plus-values en revendant Adidas à l’industriel Robert Louis-Dreyfus, mais ne le signale pas à l’ancien propriétaire. Bernard Tapie le découvre.

S’estimant lésé, il attaque en justice.

A l’époque, l’État détient encore des parts du Crédit lyonnais. Par ailleurs, en 1996, lorsque Bernard Tapie se lance dans une bataille judiciaire contre la banque, celle-ci vient d’éviter la faillite. Un organisme public, le Consortium de réalisation (CDR),  est chargé de gérer son passif après sa faillite,  en 1993. De l’argent public est donc en jeu.

Après neuf ans de procès repoussé, la cour d’appel de Paris condamne le CDR à payer 135 millions d’euros de dommages et intérêts à Bernard Tapie en octobre 2005. Un an plus tard, la Cour de cassation casse le jugement. Le camp Tapie propose alors le recours à un tribunal arbitral pour régler l’affaire plus rapidement. Le CDR accepte, avec l’aval de Christine Lagarde, alors ministre de l’Economie et des Finances, qui deviendra par la suite directrice du Fonds monétaire international (FMI).

Le CDR a finalement été condamné à payer 285 millions d’euros à l’homme d’affaires. Avec les intérêts, il a perçu au total 403 millions d’euros. Après déduction des créances et des arriérés fiscaux, Bernard Tapie a touché au total entre 200 et 220 millions d’euros.

Pourquoi ce tribunal arbitral a été contesté?

Un tribunal arbitral est un tribunal privé, hors de la procédure judiciaire, composé de manière exceptionnelle pour des contentieux particuliers. Des juristes sont alors nommés pour trancher le litige et s’entendent sur les conditions du jugement.

Dans l’affaire Tapie-Crédit lyonnais, son recours pose problème pour plusieurs raisons. D’abord parce qu’il est rarissime qu’un tribunal arbitral soit mis en place alors que le litige a déjà été porté devant des juridictions ordinaires. Ensuite, parce qu’il s’agit d’un tribunal privé, alors que des fonds publics sont en jeu.

De nombreuses irrégularités ont également entaché la formation du tribunal arbitral. On prête notamment à deux des trois juges des liens avec Bernard Tapie, ce qui lui aurait permis d’obtenir un jugement favorable et d’importantes indemnités.

Avec le Monde