Une cour d’appel militaire tunisienne a confirmé le jugement rendu contre l’ancien conseiller auprès du président, déclaré coupable de diffamation, et l’a condamné à une peine encore plus lourde, ce qui constitue selon Amnesty International un nouveau coup porté à la liberté d’expression dans le pays depuis que le président Ben Ali a été chassé du pouvoir.
Le 4 janvier, le tribunal, qui siège dans la capitale à Tunis, a alourdi la peine infligée en première instance à Ayoub Massoudi, la faisant passer de quatre à 12 mois d’emprisonnement avec sursis. Cet homme avait été reconnu coupable d’avoir porté atteinte à la réputation de l’armée et diffamé un fonctionnaire.
Il a aussi été privé de certains droits civiques, se voyant notamment interdire de servir dans l’armée, de travailler dans la fonction publique ou d’obtenir des distinctions de la part de l’État.
Ayoub Massoudi a été inculpé après avoir critiqué publiquement l’extradition vers la Libye de l’ex-Premier ministre libyen Al Baghdadi al Mahmoudi en juin 2012.
« Le verdict encore plus sévère prononcé contre cet homme fait clairement savoir que les autorités ont l’intention de réprimer durement les personnes critiques à leur égard, a déclaré Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International.
« Ce jugement doit être annulé immédiatement, car il vise uniquement à sanctionner une personne qui a exercé son droit fondamental à la liberté d’expression. Par ailleurs, les juridictions militaires ne devraient jamais servir à juger des civils. »
Le droit à un procès équitable d’Ayoub Massoudi, tout comme son droit à la liberté d’expression, a été bafoué, a expliqué Amnesty International, puisque cet homme a été jugé devant la justice militaire tunisienne.
L’un des deux représentants de l’État qu’il a été accusé de dénigrer, le ministre tunisien de la Défense, préside également le Conseil supérieur de la magistrature militaire, organe chargé de superviser les nominations, avancements, révocations et sanctions disciplinaires des juges militaires. L’autre est le chef d’état-major des forces armées, le général Rachid Ammar. Les fonctions occupées par ces deux hommes permettent de douter sérieusement de la capacité de la justice militaire à traiter l’affaire concernant Ayoub Massoudi de façon équitable et indépendante.
Amnesty International engage également les autorités tunisiennes à annuler l’interdiction de sortie du territoire prononcée contre cette homme avant l’ouverture de son procès.
En juin 2012, Amnesty International avait indiqué que l’extradition de l’ex-Premier ministre libyen était contraire au droit international relatif aux droits humains.
« Le jugement rendu à l’encontre d’Ayoub Massoudi prouve une nouvelle fois que le gouvernement tunisien limite le cadre d’exercice de la liberté d’expression, a dit Hassiba Hadj Sahraoui.
« Les autorités doivent cesser de s’en prendre à la liberté d’expression, qui figure parmi les droits pour lesquels les Tunisiens se sont battus si courageusement lors du soulèvement qui a conduit à l’éviction de l’ancien président Ben Ali en janvier 2011. »
Source: Amnesty International