24hOO avant l’attaque terroriste perpétrée le 18 mars 2015 au Musée national du Bardo, l’ancien Musée Alaoui a fêté le 17 mars la signature de deux conventions de mécénat culturel, une première en son genre dans l’histoire de l’ancien palais beylical ayant connu depuis 2009 un vaste chantier de rénovation afin d’en faire un haut lieu de patrimoine, de savoir, de science et de création.
Récit de la journée du 17 mars 2015
Après la première phase de réouverture partielle en Juillet 2013, la salle de Carthage située au coeur du Musée du Bardo connaît la deuxième et ultime phase, celle de l’aménagement muséographique. La réouverture finale, prévue fin mai 2015, consiste en la présentation d’une trentaine d’oeuvres de sculptures, réalisées dans le cadre du chantier-école Louvre-Bardo, mené depuis cinq ans.
Pour finaliser cette dernière étape, deux nouveaux partenaires de taille à savoir l’Union bancaire pour le commerce et l’industrie (Ubci) et le groupe Total Tunisie viennent de s’associer au projet de partenariat scientifique mené entre l’Institut national du patrimoine de Tunis (INP) et le musée du Louvre (France).
Lors d’une conférence de presse tenue le 17 mars au musée du Bardo à l’occasion de la signature des deux conventions de mécénat culturel avec l’Ubci et Total Tunisie, Moncef Ben Moussa, conservateur en chef du musée a tenu à rappeler que cette dernière étape de réaménagement de la salle de Carthage s’inscrit dans le cadre d’une convention-cadre signée le 9 novembre 2009, d’une durée de cinq ans.
Il a relevé que cette phase ne pouvait être possible sans “le coup de pouce énorme de ces deux mécènes qui se sont engagés et mobilisés afin de soutenir l’équipe franco-tunisienne dans les travaux de restauration des sculptures et d’achever ainsi le vaste projet de rénovation et de transformation du Musée du Bardo, qui abrite la plus grande collection de mosaique dans le monde (5000 mètres carrés).
Prenant la parole, Patrick Poupon, directeur général de l’Ubci (Groupe BNP Paribas) a fait part de l’enthousiasme de l’union bancaire à soutenir le chantier-école visant à former de jeunes tunisiens et à créer ainsi de nouvelles perspectives pour un transfert de savoir-faire notamment dans le domaine de la restauration des sculptures.
L’apport de l’ubci, a-t-il déclaré à l’agence tap, consiste en un don de plusieurs dizaines de milliers de dinars déployés afin d’aider les différents intervenants à achever comme il se doit ce projet relevant que l’Ubci est déterminée à poursuivre sur cette voie à travers une multitude de petits projets à caractère social et aussi culturel.
A son tour, Matthieu Langeron, directeur général de Total Tunisie a tenu à rappeler que cette action de mécénat s’inscrit dans la logique naturelle du Groupe Total, partenaire de longue date avec le musée du Louvre. Dans ce sens, Total Tunisie s’est investie, sans hésiter, dans ce projet en se mobilisant pour développer le patrimoine tunisien mais aussi pour aider à créer de nouvelles pistes de carrière pour les jeunes tunisiens.
La contribution de Total-Tunisie, a-t-il ajouté, est “une action qui nous tient à coeur” car “au delà du financement, l’idée est de développer les compétences tunisiennes à travers ce genre d’échange ambitieux”. Un échange significatif dans la mesure où l’ambition est que “le patrimoine culturel fasse partie de l’adn du jeune tunisien” a-t-il relevé.
En présence de Françoise Gaultier, directrice du département des Antiquités grecques, étrusques et romaines du musée du Louvre et de Anne Laure Beatrix, directrice des relations extérieures du Musée du Louvre, Tahar Ghalia, chef du département du développement muséographique à l’INP a tenu à souligner l’importance de cette nouvelle alliance inédite, celle du mécénat, afin d’aider à la mise en valeur d’un musée comme celui du Bardo, en contribuant à la finalisation de la restauration d’oeuvres de grande valeur historique.
Des oeuvres restaurées grâce au travail assidu mené dans le cadre du chantier-école dirigé par deux restauratrices expertes du musée du Louvre ayant assuré la formation de jeunes tunisiens aux métiers de la pierre.
Une trentaine de sculptures, torses en marbre, statuettes et portraits féminins et masculins devrait été présentée comme convenu fin mai 2015 dans les vitrines à la salle de Carthage, qui n’aurait pas connu des dégâts au niveau muséographique” a déclaré aujourd’hui à l’agence Tap, l’experte Nathalie Brac de la Perriière, co-équipière de Daniele Branstein, toutes deux chargées du chantier- école Louvre-Bardo, entamé il y’a cinq ans.
Inaugurée dans une première étape avec la présentation du statuaire des entrecolonnements, la salle de Carthage située au coeur du musée du Bardo, reprendra de son lustre avec des oeuvres comme la Venuse pudique et la statuette Venus.
Chantier-école Louvre-Bardo :Formation aux métiers de la pierre, un apprentissage à la rigueur
Lors d’un tour à la salle de Carthage le 17 mars 2015, la restauratrice Daniel Branstein, spécialisée dans la technique de la pierre, a donné un aperçu global sur la transfiguration finale de la salle avec le prochain aménagement muséographique: vitrines et pose des socles métalliques sur lesquels seront installées les sculptures de moindre taille que la statuaire déjà en place. Des oeuvres qui ont été étudiés et nettoyés par une jeune équipe de jeunes tunisiens dont deux ont été formés à l’école de Tour en France, deux autres ont intégré l’INP ainsi que deux nouveaux stagiaires.
Parlant de ce chantier-école initié par le Musée du Louvre et soutenu financièrement par l’Institut français de Tunisie (IFT), Nathalie Brac de la Perriera a fait savoir que ces jeunes ont été formés depuis 2011 aux métiers de restauration et de muséographie.
Cette formation complète aux métiers de la pierre a permis, et pour la première fois, de créer le premier atelier de restauration de sculptures en Tunisie: enseignement des principes de manutention et de transport, manipulation des oeuvres et apprentissage des qualités essentielles (montage des oeuvres, travaux de marbrerie et d’installation des sculptures).
Au delà de la rénovation du musée du Bardo, le chantier- école a permis a-t-elle tenu à signaler d’initier ces jeunes tunisiens, à un métier qui n’existait pas auparavant, celui du restaurateur de sculptures.
“c’est un travail très long, précis et minutieux” a-t-elle relevé car la formation aux métiers de restauration est un apprentissage de la rigueur”.
Cela dit, l’objectif ultime est de créer dans les années qui s’en suivent une section de restauration sculpture en Tunisie en ayant recours à ces jeunes pour former à leur tour les futurs restaurateurs de sculpture du patrimoine en Tunisie qui dispose de compétences mais aussi de matériaux tels que le marbre gris de Foussena, utilisé d’ailleurs dans la restauration des “prochaines résidentes” au musée du Bardo, où des ouvriers et amis sont à pied d’oeuvre depuis le week-end pour préparer la réouverture demain du Musée.
Une réouverture marquée par un large mouvement de mobilisation “Je suis Bardo” mais aussi par un ensemble de manifestations de solidarité au rendez-vous de la journée du 24 mars 2015 dont la manifestation de la Corporation des guides professionnels de tourisme, placée sous le slogan “La Tunisie n’est pas finie…le musée du Bardo non plus”.