Les révélations de Taïeb Laâguili, président de l’Initiative pour la recherche de la vérité sur l’assassinat de Chokri Belaïd (IRVA) sur une éventuelle coordination stratégique entre Ennahdha -parti au pouvoir en Tunisie-, Ansar Chariaa -groupe terroriste- et le chef de guerre libyen Abdelhakim Belhaj comportent, de toute évidence, de précieux nouveaux éléments d’information à même d’aider les Tunisiens à se forger des réponses cohérentes à certains dossiers peu éclaircis jusque-là.
Il s’agit d’abord de l’autisme des nahdhaouis au pouvoir, lesquels ont prouvé, depuis deux ans au pouvoir, qu’ils portent des œillères pour accomplir, à des fins occultes, une seule mission, celle-là même qui consiste à contrôler totalement l’Administration et les centres de décision aux frontières.
C’est ce qui explique, en quelque sorte, la porosité scandaleuse de nos frontières, et son corollaire, cette facilité avec laquelle des contrebandiers notoires du sud et de l’ouest du pays, connus pour leur alliance avec les mafiosis de Ben Ali et recyclés, ensuite, par les nahdhaouis, puissent faire entrer dans le pays des terroristes sanguinaires comme Abdelhakim Belhaj et autres.
Ici, juste un élément d’histoire: Abdelhakim Belhaj, présenté chastement par les responsables nahdhaouis comme un homme politique respectable, avait combattu en Afghanistan aux côtés d’Abou Yadh (leader d’Ansar Chariaa) et en Irak aux côtés du terroriste jordanien Zarkaoui. Sans commentaire…
Ces révélations, qui ont provoqué la fureur des nahdhaouis, alors qu’elles concernaient des défaillances au niveau du ministère de l’Intérieur, apportent également de précieux éclairages sur le rapport organique entre la contrebande et le terrorisme. Les Tunisiens n’ont jamais pu comprendre comment des convois de poids lourds, transportant en apparence des produits importés de manière non réglementaire mais bourrés en fait d’armes, puissent traverser la frontière au vu et au su de tout le monde. L’Administration nahdhaouie aux frontières ne pouvait pas ne pas être au courant …
Une administration aux ordres…
Le scénario d’une organisation terroriste régionale est ainsi mis en place: une Administration aux couleurs et aux ordres nahdhaouis, un groupe terroriste, «Ansar chariâa», entraîné au maniement des armes en Libye par Abdelhakim Belhaj et protégé, politiquement, en Tunisie, par Rached Ghannouchi, leader d’Ennahdha. Ce dernier, qui a toujours déclaré que les salafistes djihadistes sont «ses enfants», n’a jamais démenti dans ses écrits sa haine pour la laïcité mondiale et sa propension à restaurer le 6ème Califat.
Décryptage : Ennahdha, Ansar Chariaa, Abdehakim Belhaj ne sont que les composantes d’une même organisation terroriste. Celle-ci a commencé par les assassinats politiques avec la complicité des nahdhaouis au ministère de l’Intérieur (non prise en considération de documents d’alerte extérieure et intérieure et destruction des documents le prouvant).
Selon Mongi Rahoui, député retiré du parti Watad, qui s’exprimait, vendredi soir (4 octobre), sur Hannibal TV, l’original du document dans lequel la CIA avertissait le ministère de l’Intérieur de l’imminence de l’assassinat du leader Mohamed Brahmi a été détruit, défiant les autorités concernées de prouver le contraire.
C’est dans ce sens qu’il faudrait prendre trop au sérieux -même à titre préventif- les appels lancés, ces jours-ci, par les renseignements algériens quant à une éventuelle attaque de grande ampleur que des terroristes s’apprêtent à mener, à partir de la Libye, contre le pays le plus fragile d’Afrique du nord: la Tunisie.
3.000 jihadistes tunisiens s’entraînent en Libye
C’est dans cet esprit qu’il faut prendre au sérieux Zied Lakhdher, secrétaire général du Watad, quand il avait déclaré que plus de 3.000 Tunisiens se trouvent actuellement en Libye où ils sont pris en charge par le groupe d’Abdelhakim Belhaj et attendent des ordres pour revenir en Tunisie, défiant, à son tour, le ministère de l’Intérieur de démentir ces informations.
C’est dans cette optique qu’il faudrait comprendre l’appel pressant lancé, également vendredi soir, sur Nessma TV, par Taïeb Laâguili (président d’IRVA), au ministre de l’Intérieur et dans lequel il l’a prié avec beaucoup d’insistance de révéler toute la vérité au peuple tunisien à propos des liens louches qui unissent le trio d’enfer Ennahdha-Ansar Chariaâ-Abdelhakim Belhaj.
Idem pour les propos tenus dans les médias par Mohamed Salah Hedri, colonel à la retraite et président du parti “Justice et Développement”, qui a indiqué qu’entre 4.000 et 5.000 jihadistes tunisiens en Libye aidés par 5.000 terroristes libyens (10.000 au total) s’apprêtent à lancer une vague d’opérations terroristes sur tout le territoire tunisien. Toujours d’après lui, ces jihadistes sont sous le commandement d’Abou Iyadh, chef du mouvement islamiste Ansar Charia et s’entraînent dans la région de Zenten en Libye.
Le principal enseignement à tirer de l’ensemble de ces données est le suivant: le classement d’Ansar Chariaâ comme organisation terroriste ne serait que du cinéma. Pour preuve, ces adhérents se sont manifestés ensuite dans plusieurs villes du pays alors que leur chef, Abou Iyadh, se la coule douce aux côtés de son compagnon d’armes en Afghanistan, au Soudan et en Irak, Abdelhakim Belhaj.
Qu’apportent les révélations de Laâguili ?
Pour mémoire, Abou Iadh, impliqué dans l’assaut mené contre l’ambassade des Etats-Unis à Tunis, aurait été aidé par Ali Laârayedh, alors ministre de l’Intérieur, pour prendre la fuite alors qu’il été totalement à portée de mains des forces de sécurité, et ce selon des témoignages des syndicats de police.
Pour revenir aux révélations d’IRVA que les nahdhaouis ont qualifiées de «non évènement», tout indique qu’elles représentent une évolution qualitative certaine devant éclairer certaines zones d’ombre relevées dans les relations régionales d’Ennahdha.
De point de vue importance stratégique, elles méritent d’être classées au même niveau que la vidéo dans laquelle Ghannouchi disait qu’Ennahdha ne contrôlait pas trois corps (l’armée, la police et les médias), appelant les salafistes à y remédier.
C’est pour dire, aussi, après ces révélations rien ne sera plu comme avant…