Ghannouchi : « On ne peut pas dissoudre des gouvernements par des sit-in et des manifestations »

Le président du mouvement Ennahdha Rached Ghanouchi a déclaré que « c’est exagéré de dire que la Tunisie est en crise, il vaut mieux dire que le pays a des difficultés, a-t-il soutenu, liées au blocage des travaux de l’Assemblée constituante et à certaines personnes qui veulent imposer un agenda politique et tentent d’exclure Ennahdha du gouvernement ».

Répondant aux questions des journalistes lors d’une conférence de presse tenue, jeudi, à Tunis, le président d’Ennahdha a ajouté « on ne peut pas dissoudre des gouvernements par des sit-in et des manifestations », qualifiant les « tentatives » de dissoudre la Constituante et le gouvernement de « rêves anarchiques qui me rappellent l’utopie marxiste ».

Et de préciser « Tout le monde a le droit de réclamer des changements à la tête du pouvoir à condition que cela soit conforme à la loi sur l’organisation provisoire des pouvoirs publics ». « Le pays serait exposé à de multiples risques si les mécanismes démocratiques ne sont pas respectés », a-t- il averti.

Le président d’Ennahdha a estimé que pour sortir de la crise actuelle il va falloir parachever rapidement l’étape restante de la phase de transition, appelant à l’élargissement de la composition du gouvernement pour intégrer toutes les forces politiques et les impliquer dans la gestion du pays.

« Nous appelons à un dialogue qui n’exclut personne y compris le mouvement Nidaa Tounes qui a participé au dialogue national parrainé par la présidence de la République », a-t- il dit, précisant que les discussions avec l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) se poursuivent et doivent reprendre lundi prochain. Rached Ghannouchi a estimé également que « tout processus contraire à la loi est un processus conspirateur qui ne peut qu’aggraver la situation ».

Les Tunisiens, a-t-il soutenu, craignent désormais le scénario égyptien et s’attachent à la légalité dans tout changement. Evoquant le calendrier proposé par le mouvement Ennahdha pour les prochaines échéances et auquel « s’engageraient toutes les parties », Rached Ghannouchi a souhaité le voir validé par l’Assemblée constituante dès la reprise des travaux.

Sur un autre plan, le président d’Ennahdha a démenti les informations rapportées par certains médias qu’il qualifie de « suspects », selon lesquelles le mouvement palestinien Hamas aurait entraîné des islamistes en Tunisie et que le parti Ennahdha serait en train de stocker des armes en prévision d’éventuelles confrontations. « Ce ne sont là que des rumeurs », a assuré Rached Ghannouchi, affirmant que son parti qui conduit le gouvernement n’a pas besoin de stocker des armes.

Les gouvernements sont les seuls habilités à détenir légalement les armes, a-t-il ajouté. S’agissant de la loi sur l’immunisation de la révolution, le président d’Ennahdha a estimé que la priorité de l’Assemblée constituante est de parachever tout ce qui est lié aux élections. L’ANC, a-t-il expliqué, n’a plus assez de temps pour examiner tous les projets qui lui sont soumis dont la loi sur la justice transitionnelle et la loi sur l’immunisation de la révolution.

Il est possible de reporter l’examen de ces projets par la prochaine assemblée parlementaire, a-t-il ajouté. Rached Ghannouchi a relevé, d’autre part, que les ligues de protection de la révolution ne sont pas au-dessus de la loi à l’instar d’autres organismes. Seule la loi fera office de juge dans toutes les affaires, a-t-il affirmé. Evoquant la position des pays occidentaux à l’égard de l’Egypte et de la Tunisie, le président d’Ennahdha a jugé que l’occident agit en fonction de ses intérêts.

Malgré une « hésitation » face à la situation en Egypte, les Européens soutiennent encore l’expérience de transition démocratique en Tunisie, a-t-il noté. Et Rached Ghannouchi d’ajouter : La partie américaine n’a pas, quant à elle, revu son soutien au processus de transition, même si elle n’a pas caché son mécontentement face à l’attaque contre l’ambassade américaine en Tunisie et sa dénonciation des jugements prononcés contre les auteurs de cette attaque considérés comme « de légères sentences ».