Opinion : Les vrais bloqueurs de la Tunisie

A la suite de la publication des articles “les 10 qui bloquent la Tunisie”, Amad Salem réagit en commentant le choix des personnes et développe ce qui, de son point de vue, bloque réellement la Tunisie. Il pose, notamment, des questions sur qui est responsable du marasme, du désespoir, du stress, de cette négativité régnante ? Les dix personnalités présentées comme les « vrais bloqueurs de la Tunisie », répondent-elles toutes, et elles seules, à ce topo de bloqueurs du pays ?

tunisie_directinfo_poste-revolutionEnfin, les «10 pièces maîtresses» du puzzle «bloqueur de la Tunisie» sont en place. Il nous a fallu exactement 16 jours 22 min (du 14 mars 2013 18 h 00 min au 29 mars 2013 18 h 22 min) pour connaître ces « dix bloqueurs». Rappelons-les par leur ordre «d’importance de blocage» selon l’auteure : «N°1. Rached El Ghannouchi, N°2. Moncef Marzouki, N°3. Mustapha Ben Jaafar, N°4: A. N. Chebbi, N°5.Kamel Morjane, N°6. Habib Khedher, N° 7. Mohamed Abbou, (n°8) : Noureddine El Khademi, (n°9) : Hamma Hammami, (n°10) :Béji Caid Essebssi».

Remarque statistique :

3/10 (30 %) sont du parti Ennahdha, 6/10 (60 %) sont de la « troïka » qui gouverne. 4/10 (40 %) sont de «l’opposition». En résumé, ce sont 6/10 (60 %), c’est-à-dire la totalité du pouvoir en place depuis janvier 2012 qui «bloquent la Tunisie », selon Mme Amel.B.A. On pourrait penser, à juste titre, que les «quatre» (Morjane, Chebbi, Hammami et Essebsi) ne sont là que pour le décor.
Est-il vrai que ces «dix» sont les vrais bloqueurs de la Tunisie et la troïka est le principal bloqueur du pays ?

Que veut dire «bloquer» ?

On se suffira de ces explications, entre autres, données par Larousse : «a)- Empêcher quelque chose de se mouvoir, de bouger, de fonctionner. b)- Empêcher quelqu’un, un véhicule d’avancer, l’arrêter. c)- Rendre impraticables une voie, un accès. d)- Empêcher quelqu’un de poursuivre l’action en cours. e)- Affecter quelqu’un d’un blocage psychologique. f)- Empêcher une action, une situation de progresser, d’évoluer vers son terme».

Ces explications linguistiques nous aideraient à mieux comprendre «le blocage» d’un pays et à nous demander :

1)- Qui bloque la Tunisie «de se mouvoir, de bouger », de CHANGER ?

2)- Qui bloque «la situation de progresser, d’évoluer vers son terme », en un mot : qui bloque le changement démocratique en Tunisie ?

3)- Qui «empêche de poursuivre l’action en cours», plus simplement : qui bloque la marche économique, administrative et institutionnelle en Tunisie ?

4)- Qui «affecte le peuple tunisien d’un blocage psychologique», en clair : qui est responsable du marasme, du désespoir, du stress, de cette négativité régnante ? Les dix personnalités présentées comme les « vrais bloqueurs de la Tunisie », répondent-elles toutes, et elles seules, à ce topo de bloqueurs du pays ?

En lisant et relisant les dix articles, on constate que Mme Amel.B.A n’apporte aucune preuve de «blocage», elle ne nous montre pas COMMENT chacune de ces dix personnalités bloque-t-elle la Tunisie. Certes, on trouve des informations sur le personnage, mais ces informations ne s’élèvent pas au «scoop», à dévoiler les manigances du «bloqueur». Le «dossier » crie son vide d’investigation et de faits réels de blocage. Il y a insistance sur les ambitions personnelles, chose normale après tout, et je crois même qu’il y a confusion entre « vouloir bloquer » et « bloquer effectivement ».

Parlant de Hamma Hammami, par exemple, Mme Amel a critiqué principalement deux côtés chez ce “chômeur parasite anarchiste terroriste trotskiste” : son salafisme idéologique et son ambition de devenir «président de la République». «Ce leader politique obnubilé par l’idée d’être éternellement harcelé par la police politique, estime aujourd’hui mériter l’investiture suprême « Si le Front populaire me le propose ». Il a soutenu la tenue de la Kasbah II qui a mené le mouvement islamiste au pouvoir et défendu la création de l’instance nationale pour la réalisation des objectifs de la Révolution qui a orchestré l’idée des élections d’une constituante et mené à la création des ligues de protection de la révolution» (Amel.B.A).

Passons sur le mensonge du «harcèlement par la police» que perpétue l’intéressé, Hamma Hammami était l’un des principaux instigateurs de «kasba II» puisqu’il travaillait en étroite collaboration avec l’Ugtt et le watad. Non, le vrai but de «kasba II», imposée par l’Ugtt, est justement la Constituante afin de prendre le pouvoir «par les urnes» et imposer «la dictature prolétaire». Mais, mais…

Les vrais bloqueurs

Un pays est bloqué essentiellement par l’idéologie qu’elle soit affichée ou non et par la personnalisation du pouvoir. Depuis l’indépendance la Tunisie a eu un seul bloqueur « de taille » : Bourguiba. La responsabilité historique de cet homme est sans limites. Dans son sillage, ceux et celles qu’on appelle aujourd’hui «sages», ou «expérimenté(e)s», ont perdu toute dignité, toute valeur et se sont transformés en pions et lavettes. Alors, quand Essebsi, Moalla, Filali, Mestiri, Guiga et consort osent parler de démocratie, de droits de l’homme, de liberté de presse, c’est une vraie gifle qu’ils reçoivent.

Ce fumeux «14 janvier» n’était point jour de «révolution» ni fin d’une révolution. C’est un coup d’Etat du système sur lui-même. Le 15 janvier les bloqueurs se sont mis à l’œuvre.

1)- Blocage institutionnel : Bajy Qayed Essebsi, Y. Ben Ahour et K Jandoubi sont les vrais bloqueurs avant les élections. Après c’est la Constituante. R Ghannouchi et Ennahdha ont voulu bloquer, ont essayé mais ne sont pas arrivés à leur but et n’arriveront pas.
2)- Blocage économique : la coalition rouge extrémiste Ugtt-Front populaire est la première responsable par les grèves tournantes, les sit-in, le blocage des routes et le saccage des établissements publics. En second lieu c’est la BCT avec ses deux directeurs, l’actuel et son prédécesseur. Arrivent ensuite, les milliardaires du pays.
3)- Blocage administratif : Les trois syndicats «nationaux» et les responsables centraux et régionaux.
4)- Blocage mental : les médias par leur discours vide, plat, négatif et destructeur. Aujourd’hui, la chaîne Hannibalyd fait «un sondage d’opinions» à Sousse, la question est : «que penses-tu si « Si Larbi Nasra » crée un parti et se présente aux élections présidentielles ?». L’autre chaîne nesmabalyd fait déjà campagne électorale à « l’héritier » et surtout à «l’héritière divorcée» de son «leader-héros-martyr ».

En conclusion, le «dossier» des «dix bloqueurs de la Tunisie» est plutôt un réquisitoire contre le gouvernement qu’un dossier révélateur. Il est vrai que la « trinité » au pouvoir est bloquée dès le départ, s’est bloquée beaucoup plus dans les coulisses du pouvoir, chaque parti a essayé de bloquer ce qu’il voulait, mais elle n’est pas le vrai bloqueur de la Tunisie, ou du moins, elle n’est pas la seule et n’en a pas la grosse part de responsabilité. On ne peut connaître les vrais motifs et critères sur lesquels s’est basée Amel.B.A pour « choisir » ses dix cow-boys (aucune femme !), mais en «gommant» ces dix «présidentiables», Mme Amel.B.A nous fera-t-elle le scoop de son candidat «pousseur»? Je suis certain qu’elle peut mieux faire, beaucoup mieux. Et, si on commençait par Hamadi Jebali comme bloqueur de la «transition» ?