Un Chinois musulman raconte la vie d’une communauté religieuse au pays de la soie

La minorité Hui est l’une des 10 ethnies musulmanes établies en République populaire de Chine. Ces musulmans sunnites résidant depuis plusieurs centaines d’années dans l’ancienne capitale impériale chinoise, le Xian de la province du Shaanxi dans le nord-ouest de la Chine, ont pour origine la région méridionale de l’actuelle Iran ou la Perse de l’époque. Commerçants ou prédicateurs, ils sont venus dans le sillage de la route de la soie en vue d’établir des commerces et de favoriser les échanges avec l’empire du milieu.

Invitée par l’association des journalistes de Chine, une délégation de journalistes de l’Agence TAP a rencontré l’un des représentants de cette communauté, Khaled An Shouxin, l’un des leaders de la communauté dont le nombre oscille entre 30 000 et 50 000 individus pour une population totale de près de 11 millions d’habitants, concentrée principalement dans et autour de la ville de Xian.

Nous accueillant dans sa demeure, au cœur des souks de la vieille ville de Xian, M. An Shouxhin qui porte la calotte musulmane sur la tête comme tous les musulmans de la région, nous explique que sa communauté vit et coexiste pacifiquement depuis des centaines d’années avec les autres groupes ethniques et religieux de la région. Il a précisé que la politique ethnique a permis aux minorités de préserver leur spécificité et de jouir d’une liberté de culte, observant que dans la seule ville de Xian, on dénombre pas moins de 40 mosquées dont certaines sont exclusivement dédiées aux femmes.

C’est autour d’un thé aromatisé qui nous rappelle le goût de l’églantier, et dans une demeure traditionnelle d’époque où cohabitent trois générations successives de la famille de M. Khaled An Shouxin que celui-ci nous explique que sa maison, lieu de vie, a été classée patrimoine de l’humanité par l’Unesco. Une maison qui se distingue par une architecture chinoise mais également des plafonds en bois et certaines décorations murales avec des idéogrammes reprenant des versets coraniques ou des hadiths dans une profession de foi où se mélangent art chinois et influences arabes et perses. Ingénieur de formation, M. An Shouxin est également un calligraphe renommé qui possède à son actif plusieurs publications sur la calligraphie chinoise comprenant des poèmes mais aussi des dictons dans un subtil mélange de philosophie confucianiste, de hadith et de versets coraniques. Un mélange des genres, une double identité affirmée et assumée qui est également reflétée au niveau de la vieille mosquée, de la ville, datant de plus de cinq siècles. Ce lieu de culte d’architecture chinoise de l’époque ming où les idéogrammes chinois sont couplées avec des versets en lettres arabes.

La mosquée toujours fréquentée par les croyants de la région se démarque par un plafond et des murs tout en bois de cerisier. Sur la façade supérieure, les versets du Coran sont sculptés en langue arabe tandis que la partie basse affiche la traduction en idéogrammes chinois. Les murs sont tous séparés par une mince bande en bois sur lesquels sont répétés les 99 noms d’Allah. Cette mosquée dénote l’enracinement séculaire de la communauté musulmane dans cette région, des chinois musulmans souvent commerçants ou restaurateurs réputés pour leur rigueur au travail, leur esprit d’entreprise et leur dynamisme. Ils sont à l’image de la Chine d’aujourd’hui attachés à leur culture et à leur passé tout en étant ouvert sur le monde, sur l’autre dans sa différence et sa diversité, dans un métissage des cultures qui fait de la ville de Xian, un lieu unique, à la fois le berceau de la civilisation et de la culture chinoise, de rencontre et d’échange avec diverses origines et cultures.

WMC/TAP

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