J’ai été investi le 22 octobre dernier comme candidat du Parti socialiste et des Radicaux de gauche pour l’élection présidentielle de 2012.Je souhaite partager avec vous quelques moments forts du parcours qui ont fait de moi ce que je suis. Je suis né à Rouen en 1954 et lorsqu’à 10 ans j’ai découvert la politique par la télévision, il n’y avait encore qu’une seule chaîne. A cette époque, les Français s’interrompaient pour regarder le général De Gaulle, dont les gestes menaçaient à chaque instant de sortir du cadre, et découvraient un jeune parlementaire au talent prometteur, François Mitterrand.
Mon père était médecin et ma mère assistante sociale. D’eux, j’ai appris l’attention que l’on doit porter aux autres.
A l’Institut d’études politiques de Paris, j’ai découvert la passion de l’engagement militant dans le syndicalisme étudiant. Jeune homme de gauche, j’avais envie d’être utile au camp que j’identifiais comme celui de la justice, du progrès, de l’innovation et de la liberté. Je nourrissais l’ambition à travers mes études – d’abord économiques à HEC, puis à l’ENA – de mettre mes compétences au service d’une gauche tenue à l’écart du pouvoir depuis 1958. A l”ENA, je milite pour une réforme démocratique de cette institution.
C’est tout naturellement que j’ai rejoint le parti socialiste en 1979. Repéré par Jacques Attali, je rédigeais des notes économiques pour celui qui allait devenir, deux ans plus tard, le premier président socialiste sous la Vème République. Le service de l’Etat, de la République, la lutte contre les injustices n’ont jamais cessé de rythmer mon existence.
De 1981, je conserve deux souvenirs : celui d’une magnifique victoire, celle du 10 mai, et celle d’une défaite, la mienne, aux législatives qui ont suivi, à Ussel en Corrèze, face à Jacques Chirac. Commence alors ce long combat face à l’ancien Président de la République. Sans doute n’imagine-t-il pas que non seulement je ferai basculer son département à gauche, que j’y ferai ma terre d’élection, le lieu de ma légitimité, mais qu’en plus je deviendrai son premier opposant à partir de 2002 comme Premier secrétaire du Parti socialiste. En Corrèze, dans cette région rude et généreuse la confiance se mérite. Il y a toujours à apprendre d’une apostrophe sur le marché de Tulle. Comment agir, animer, conduire un pays dont on ne reconnaîtrait pas la diversité ? Comment être le président des Français sans les aimer, sans connaître leur histoire, sans entendre la respiration profonde du pays ?
J’ai rejoint l’Elysée en 1981, puis dirigé le cabinet de Max Gallo dans le gouvernement de Pierre Mauroy.
Je suis socialiste. Depuis toujours. Je n’ai jamais aimé les batailles de courants et n’en ai jamais constitué moi-même. On me décrit comme un inlassable chercheur de synthèses. Je ne m’en défends pas.
Aujourd’hui, le mot est connoté, on lui préfère celui d’unanimité. L’essentiel, c’est que le sens demeure. Les socialistes ne sont forts que s’ils sont unis, la gauche n’est victorieuse que si elle accepte de prendre la meilleure part de chacune de ses composantes.
C’est cette règle que je me suis appliquée lorsque je suis devenu Premier secrétaire en 1997. Durant ces onze années à la tête de mon parti, quels qu’eurent été les enjeux, dans la victoire comme dans la difficulté, je ne me suis jamais laissé détourner de mon devoir. La ténacité, l’abnégation, la volonté, sont autant de vertus que j’ai développées durant cette mission. J’ai été associé par Lionel Jospin à toutes les décisions de la gauche plurielle. Chaque semaine, nous nous sommes rencontrés pour les grands arbitrages. Nous avons ouvert de nouveaux droits, fait reculer le chômage, consolidé la croissance. Tout n’a pas été parfait, nous n’avons pas toujours su nous faire comprendre. La défaite du 21 avril 2002 a été cruelle.
Il a ensuite fallu reconstruire. Tenir la barre. Je m’y suis attelé avec mes amis. Au moment où tous les regards se tournaient vers la « troisième voie » de Tony Blair ou Gerhard Schröder, j’ai défendu l’originalité des socialistes français. Lorsque la tentation du repli protestataire gagnait les esprits, j’ai maintenu le cap. J’aime à penser que c’est grâce à ce travail qu’en 2004, la gauche a remporté 20 des 22 régions de métropole et la Guadeloupe ; grâce à cette rénovation qu’une majorité de départements a, la même année, basculé dans le camp de la gauche ; grâce à notre remobilisation que le PS a connu son meilleur score lors d’élections européennes. Et lorsque le PS s’est déchiré en 2005, j’ai maintenu l’unité sans laquelle toute espérance d’une victoire en 2007 se serait définitivement évanouie.
Ségolène Royal a été désignée pour nous représenter. J’ai accompagné sa campagne comme Premier secrétaire.
En 2008 nous avons gagné les élections municipales. Le parti socialiste s’est ensuite déchiré au congrès de Reims… Puis est venu le temps de la réconciliation.
Pour ma part, après avoir si souvent porté la parole collective, j’ai voulu faire entendre une parole singulière. J’ai travaillé, rencontré, écouté.
Le défi que représente ma candidature à l’élection présidentielle, le plus important de toute ma vie, je le relèverai avec vous, avec les forces que j’ai développées durant ces années. Je le relèverai avec les valeurs, les croyances, celles qui, dans le for de ma conscience ont guidé mon chemin et m’ont conduit à défendre nos valeurs lors de l’élection présidentielle.
Une majorité de Français attend maintenant le changement.
Je veux porter avec eux, avec vous, mon projet pour la France.
François Hollande