En 2020, les services de douane avaient saisi 39 kg de cannabis, 6 kg de cocaïne et plus de 1 kg d’héroïne, soit 46 kg en tout de drogues douces et dures.
En 2021, ils ont saisi 50,5 kg de cannabis et 18,2 kg de cocaïne. La palme d’or en Tunisie revient toutefois aux amphétamines dont la consommation passe pratiquement du simple au triple d’une année à l’autre : 451 021 pilules en 2020 et 1 117 241 en 2021. Ces quantités sont à multiplier au moins par 10 si nous considérons celles qui ont échappé aux mailles de filet des services de police et de douane.
La drogue fait des ravages en Tunisie. Le phénomène s’est amplifié en 10 ans. Les quantités de stupéfiants écoulés sur le marché national augmentent considérablement d’une année à l’autre dans une constance révélant un malaise social grandissant et une présence de plus en plus affirmé et agissante des mafias gérant le commerce de la mort. Des mafias avec des ramifications partout y compris, selon certaines sources, dans les services de police et de douane, d’où une attention particulière portée par les responsables au ministère de l’Intérieur au secret des enquêtes.
Pire, selon certaines informations, la “Casa Nostra“ sicilienne et la “Ndrangheta calabraise“ auraient pignon sur rue à Tunis. Comment, dans ce cas, s’étonner de la saisie en Equateur (petit pays d’Amérique du Sud) de 600 kg de cocaïne dissimulée dans une cargaison de bananes et destinée à la Tunisie ?
Bien que les investigations viennent tout juste de commencer, les autorités tunisiennes ayant saisi Interpol pour avoir plus de renseignements, les noms de l’importateur et de ses complices ne doivent pas être ignorés par les enquêteurs des services de stupéfiants de la Garde nationale, qui ne veulent rien divulguer pour l’instant. De sérieux doutes pèseraient sur un ancien député soupçonné de faire partie du clan mafieux.
Ils sont loin les temps où une affaire telle que le “couscous connections“ dans laquelle était impliqué le frère de l’ancien président de la Tunisie, Zine El Abidine Ben Ali, soulevait un tollé, le trafic de drogue, d’influence et la traite d’êtres humains ont été « démocratisés » (sic) et banalisés. La Tunisie, un pays où des partis politiques, occupant les devants de la scène politique et influents à l’ARP, seraient impliqués eux-mêmes dans des affaires mafieuses.
Les questions essentielles qui se posent aujourd’hui sont : la Tunisie est-elle seulement un pays de transit ? Est-elle devenue, grâce à la prétendue révolution de la dignité (resic), une plaque tournante mondiale du trafic de drogue ? Sommes-nous devenus pour la Méditerranée et l’Afrique ce qu’est le Mexique pour les Etats-Unis, un principal pourvoyeur en drogues et en amphétamines ?
Dans une Tunisie, où la voix qui porte le plus est celle de l’argent et des intérêts, et où la phrase qui ouvrent toutes les portes, est « Celui qu’on ne peut acheter avec un peu d’argent peut être acheté avec beaucoup d’argent », tout est possible en attendant le rétablissement d’un Etat fort et de l’Etat de droit.
Amel Belhadj Ali