Plusieurs cas de mortalité inhabituelle d’oiseaux sauvages ont été signalés, ces dernières semaines en Tunisie.
Ces signalisation concernaient des Puffins de Scopoli, un grand oiseau marin endémique de la Méditerranée dont la plus grande colonie est installée sur l’Ile de Zembra, trouvés morts sur plusieurs plages le long les côtes tunisiennes et même en Algérie, et des moineaux qui étaient littéralement ” tombés du ciel “, par centaines, dans la région de Kairouan et au Cap Bon, a expliqué l’association “Les Amis des Oiseaux “, dans un éclairage, dont une copie est parvenue à TAP.
Les autorités compétentes, en l’occurrence la Direction Générale des Services Vétérinaires (DGSV), l’Institut de Recherche Vétérinaire de Tunis (IRVT) et la Direction Générale des Forêts (DGF), se sont mobilisées pour étudier et analyser ces phénomènes, notamment pour exclure qu’il s’agit de la grippe aviaire.
Malheureusement, dans le cas des puffins, l’état avancé de décomposition des cadavres a rendu cette tâche difficile.
La piste de la grippe aviaire exclue
” Il a été néanmoins possible d’exclure la grippe aviaire et de prouver la présence de la maladie de Newcastle, une affection virale aussi appelée “pseudo-peste aviaire” à cause des symptômes violents de sa souche vélogène, qui peut atteindre 100% de mortalité “, lit-on dans le communiqué de l’AAO. Les moineaux testés à Kairouan et au Cap Bon étaient eux aussi atteints de cette maladie.
Qu’est-ce que ces résultats signifient ?
Dans les deux cas la cause de la mortalité n’a pas pu être identifiée sans doute car d’autres examens et une autopsie auraient été nécessaires pour ce faire.
Bien entendu, la Maladie de Newcastle pourrait être la cause de ces mortalités comme cela pourrait être dû à une autre maladie, l’empoisonnement, un manque de nourriture ou encore des traumatismes mécaniques ou électriques, etc, développe l’association.
Tant de pistes qui n’ont pas pu être exclues, ce qui nous empêche aujourd’hui de prendre les mesures adaptées pour lutter contre cette mortalité.
La maladie de Newcastle, indique-t-on, est une maladie virale très contagieuse dont le virus peut être présent partout où vivent des oiseaux.
” On pense que l’élevage et le transport (légal ou illégal) des volailles, d’oiseaux exotiques ou encore de plumes, fumiers ou de carcasses jouent un rôle important dans la propagation du virus notamment quand les pratiques sanitaires manquent ou sont mal appliquées “.
Il est communément admis que le virus naturel soit diffusé par les oiseaux sauvages.
Toutefois, on estime aujourd’hui que la transmission du virus entre les oiseaux sauvages et d’élevage passe le plus souvent des élevages vers les oiseaux sauvages et non le contraire.
Les mortalités de masse dans les élevages, surtout intensifs, sont aussi dus au manque de mesures de barrière entre les oiseaux sauvages et d’élevage mais surtout au transport involontaire du virus par les personnes telles que les acheteurs de volaille, livreurs d’aliments pour animaux ou les aviculteurs eux-mêmes d’un élevage à l’autre.
Le virus, très résistant, est facilement véhiculé sur leurs habits, sous leurs chaussures et sur leurs instruments ou véhicules.
De même les oiseaux sauvages peuvent être très exposés aux virus via l’écoulement des eaux de nettoyage des poulaillers et par l’épandage de fientes contaminées sur les champs agricoles ou autres surfaces fréquentées par les oiseaux.
La surveillance est recommandée…
L’AAO estime que ces pratiques nécessitent une surveillance en permanence et un suivi systématique de la santé animale aussi bien des animaux d’élevage que des oiseaux sauvages.
” Par ailleurs, il existe un vaccin contre la Maladie de Newcastle qui est simple dans son application et dont l’administration systématique aux volailles d’élevage semble impérative pour protéger les oiseaux sauvages, dont certaines espèces souffrent déjà de multiples impacts humains et environnementaux, et afin d’éviter aux éleveurs des pertes économique importantes “, note l’ONG.
Pourquoi ces mortalités sont-elles inquiétantes ?
L’association estime que ce qui inquiète, en premier lieu, est le fait que ” nous ne connaissons pas, à l’heure actuelle, la véritable cause de ces mortalités “.
Le phénomène est aussi inquiétant ” parce qu’en raison de l’absence de personnes qui circulent dans nos paysages (suite au confinement sanitaire), la véritable ampleur du phénomène peut passer inaperçu et s’avérer beaucoup plus importante que ce qu’on voit actuellement “.
En troisième lieu, parce que la plus grande colonie au monde de Puffins de Scopoli pourrait être sévèrement affectée comme peut l’être la petite colonie de Puffins yelkouan qui nichent sur Zembretta.
Le Puffin yelkouan est une espèce globalement menacée, classée vulnérable dont les effectifs dans l’Archipel de Zembra ont augmentés depuis quelques années suite à une action de dératisation menée par l’Initiative pour les Petites Iles en Méditerranée (PIM) et l’Agence de la Protection et de l’Aménagement du Littoral (APAL) et leurs partenaires.
L’Association ” Les Amis des Oiseaux ” collabore avec les autorités, notamment la DGSV, la DGF et l’APAL, pour déterminer les conditions qui permettraient une meilleure prise en charge des cas de mortalité inhabituelle dans les oiseaux sauvages.
Une mission de terrain dans l’Archipel de Zembra pourrait être organisée par les partenaires précités pour évaluer l’état des colonies d’oiseaux qui y sont installées, a encore fait savoir l’AAO.