” Le ministère de la santé s’emploie, actuellement, avec tous ses partenaires, à la révision de la législation en vigueur, datant déjà de 25 ans qui, malgré son aspect répressif, a montré ses limites”, a signalé samedi Slim Chaker, ministre de la santé.
S’exprimant lors d’un séminaire tenu sur les ” addictions et choix politiques “, à Tunis, à l’initiative de la société tunisienne d’Addictologie (STADD), Chaker a précisé qu’un changement conceptuel allant de la toxicomanie-délinquance à l’addiction- malade s’est concrétisé par une proposition d’amendement de la législation tunisienne relative aux stupéfiants représentée par le projet de loi 79-2015 actuellement en cours d’examen par la commission de législation générale de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).
” Ce projet de loi, en dépit des quelques reproches, prend en considération les aspects sanitaires, sociaux et économiques des addictions tout en tenant compte de la réalité des pays méditerranéens. “, a-t-il affirmé.
Selim Chaker a confirmé, à cette même occasion, qu’en attendant la réouverture du centre de Jebel Ouest de désintoxication, des espaces d’accueil et d’écoute ont été créés dans le grand Tunis et aux gouvernorats de Nabeul et Bizerte.
Selon des statistiques présentées, dans ce cadre par le ministre, le nombre des usagers de cannabis, en Tunisie, s’élève actuellement à 400 mille et celui des usagers de drogues injectables à 33 mille, dont un taux de 75% de célibataires parmi ces usagers.
En contre partie, le nombre des addictologues, entre médecins et psychologues cliniciens s’élève à 120. ” Ces addictologues seront d’un apport certain pour le rapprochement des services au profit des addicts et leur distribution géographique fera en sorte qu’ils toucheront la plupart des régions “, a souligné le ministre de la santé.
De son côté, Nabil Ben Salah, président de STADD a énuméré les apports du projet de loi 79-2015 relatif aux stupéfiants par rapport à la loi 92-52 encore en vigueur, insistant, dans ce cadre, sur l’importance de tenir en considération les droits de l’homme y compris le droit à la santé, à la prévention et à la réinsertion sociale.
Nicolas Prisse, président de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) en France a fait remarquer que l’addiction est une question mondiale avec des défis majeurs à relever, évoquant les principales orientations politiques françaises mises en place pour éradiquer ce fléau.
D’abord, la lutte contre ce fléau doit être menée en adoptant une approche globale tenant en compte les origines et les conséquences, a-t-il indiqué, rappelant qu’en France un nombre de près de 700 mille consommateurs quotidiens de cannabis est enregistré.
La consommation est, d’ailleurs, responsable de l’échec scolaire, a-t-il fait savoir, soulignant la nécessité de faire connaitre les causes de l’addiction et de ses conséquences.
” La stratégie de la prévention contre l’addiction a échoué en France “, a-t-il avoué, mettant en relief l’importance d’orienter les stratégies de prévention vers les enfants.
Il faut, également, que l’effort de prévention et de prise en charge vise les femmes enceintes, les personnes handicapées et les personnes en situation de précarité, a-t-il encore estimé.
Pour sa part, Gérard Duru, universitaire (France), a évoqué le poids économique du choix politique en matière de législation relative à l’addiction.
Le coût social de l’addiction est lourd, a-t-il indiqué, soulignant l’absentéisme, la baisse de productivité et la perte de valeur ajoutée.
L’universitaire a souligné le coût économique élevé de l’addiction qui nous incite à réfléchir aux solutions.