Des dizaines de jeunes avocats titulaires du CAPA algérien se sont vu cette année refuser l’adhésion au barreau tunisien.
Il est vrai que le bâtonnier est resté fidèle à sa position relative au problème des Tunisiens (es) titulaires du CAPA algérien. Il est vrai aussi que le conseil actuel ne permet pas un véritable débat démocratique et contradictoire vu le résultat des élections; c’est la loi de la démocratie et il faut l’accepter, tant pis ou tant mieux, c’est l’avenir qui le dira. Mais la décision prise de rejeter la demande des titulaires du diplôme algérien ou plutôt de revenir sur la décision du conseil précédent mérite quelques remarques, le débat démocratique l’exige.
Premièrement, la décision du conseil est grave de conséquences c’est un précédent qui ouvre le chemin vers une instabilité institutionnelle car, par la même logique, rien n’empêche le conseil actuel de revenir sur toutes les décisions prises par le précédent pendant toute une période ou pendant tout le mandat. Donc il n’y a plus de continuité dans la gestion des problèmes du métier
Deuxièmement, l’ancien conseil a donné une suite favorable à la demande de ces jeunes pour le principe, laissant à la nouvelle équipe le soin de traiter les dossiers au cas par cas, donc ce n’est pas un traitement en bloc semblable à la décision actuelle.
Troisièmement, cette décision reste silencieuse par rapport à ceux qui exercent le métier par décision de l’ancien conseil et qui étaient dans la même situation. On peut parler d’un droit acquis ou d’un accord électoral pour dire que se baser sur l’interprétation de la loi n’est pas toujours soutenable, encore faut-il parler de l’égalité des chances ou l’égalité devant la loi ou autres arguments.
Quatrièmement, la décision équitable de l’ancien conseil a pris en considération cette situation, et en plus, c’est la dernière vague de Tunisiens diplômés de l’Algérie -ce pays s’est doté d’une école supérieure pour la formation des avocats, et la nationalité du pays est une condition obligatoire pour l’accès à cette école d’autant plus que le vrai problème du métier ne se résume pas dans l’empêchement de ces jeunes d’accédé au métier.
Cinquièmement, je rappelle monsieur le bâtonnier que des vagues de juges retraités vont rejoindre notre corps, il n’y a aucune objection pour les jeunes d’entre eux comme je rappelle que des centaines d’avocats venus de Perpignan exercent depuis des années et ça n’a posé aucun problème. Ceux qui étaient opposés à ces jeunes savent maintenant qu’ils n’avaient pas raison.
Sixièmement, le véritable problème qui doit faire l’objet d’un débat, c’est les domaines d’intervention des avocats puisque l’assistance obligatoire de l’avocat n’est requise que dans peu de domaines; le vrai débat, c’est la dignité de l’avocat, son respect, la dictature fiscale, la défense des libertés… Pour dire enfin qu’il n’y a aucune raison de permettre à une minorité d’avoir un avenir et empêcher les autres d’exercer et de les mettre dans la rue par la force publique. La maison de l’avocat est un lieu privé, cette maison appartient aux avocats, à ceux qui vont devenir avocats, aux étudiants de droit et autres défenseurs des libertés. C’est la véritable vocation de l’avocat.
Zouhaier Yahiaoui