Tunisie : Vers la mise en place d’un projet de plan national Alzheimer

Le ministre de la santé se penche, actuellement, sur la mise en place d’un plan national Alzheimer, dans le cadre de l’élaboration du plan de développement 2016-2020, a déclaré à la TAP, Mouna Ben Jebara, membre du comité de pilotage du plan Alzheimer et professeure en neurologie à l’hôpital Razi.

A ce propos, Ben Jbara a indiqué que ce projet prendra en compte les spécificités de la société tunisienne et s’articulera autour des cinq axes suivants:

– Faciliter le diagnostic précoce, optimiser le parcours du soin et améliorer la prise en charge – Développer la formation des professionnels pour acquérir les compétences spécifiques de la maladie.

– Anticiper les besoins des malades et des familles en renforçant leur accompagnement pour alléger la charge morale et financière de la maladie – Organiser le suivi épidémiologique de la maladie – Renforcer et soutenir les recherches cliniques autour de la maladie d’Alzheimer

Elle a, par ailleurs, souligné que des réunions sont en cours, actuellement, entre le ministère de la santé et les membres du comité de pilotage du plan Alzheimer, sous l’égide du Pr Riadh Gouider, chef du service neurologie à l’hôpital Razi.

Environ 57000 personnes sont, actuellement, atteintes de la maladie d’alzheimer en Tunisie, selon l’association alzheimer internationale qui estime que ce chiffre sera multiplié par 4 en 2030.

Sur la table, des crayons de couleurs éparpillés au milieu de dessins qui attendent d’être coloriés. Tout autour, cinq sexagénaires peinent à choisir la bonne combinaison de couleurs pour mettre leurs oeuvres en valeur.

L’ambiance est à la fois, studieuse et bon enfant à l’accueil de jour Alzheimer de l’hôpital Razi.

Pour les malades et leurs proches qui sont venus les accompagner, mardi est sans doute un rendez-vous incontournable, duquel ils ne peuvent se départir pour prendre part aux ateliers de stimulation de mémoire, tout en partageant quelques moments de répit et de complicité. Dans cette atmosphère conviviale, apparaît une dame, assise sur une chaise, regard égaré et visage amoindri par la fatigue.

Tout porte à croire qu’elle s’est résignée, amèrement, face à l’imparable sort qui frappa son conjoint, il y’a deux ans de cela. Celle que nous appellerons “Saida” par souci d’anonymat, a longuement hésité avant de livrer son témoignage à l’agence TAP, mais a fini par céder au besoin de partager le fardeau qu’elle porte.

Une maladie encore méconnue

“J’ai commencé à prendre conscience des troubles de mémoire du “Hadj”, lorsqu’il m’appelait systématiquement pour se rappeler des courses”, se souvient-elle.

“Au départ, je croyais que c’étaient seulement des trous de mémoires banals. Je n’y avais pas vraiment prêté attention jusqu’au jour où il me ramena cinquante kilos de sucres. C’est à ce moment-là que j’ai compris que quelque chose n’allait pas.”

Saida qui, pendant tout le témoignage, n’a cessé de scruter le moindre geste de son conjoint, poursuit ses confessions accablantes, avec une voix tremblante:

“Après un premier diagnostic erroné révélant des signes d’une attaque cérébrale, c’est quelque temps plus tard, lorsque nous nous sommes rendus à l’hôpital Razi, que nous sommes parvenus enfin à mettre un nom sur cette maladie :Alzheimer.

” “Méconnue de certains médecins, notamment de ceux de première ligne, la maladie d’Alzheimer est souvent confondue avec les attributs de la vieillesse”, estime Dr. Mouna Ben Jebara, à la tête de l’accueil de jour du centre Alzheimer.

Veillant nuit et jour au bien-être des patients, cette neurologue spécialiste des maladies dégénératives au CHU Razi observe que cette pathologie résulte d’une accumulation anormale de certaines protéines cérébrales présentes dans des zones du cerveau qui entraînent la destruction des neurones et la perte progressive de la mémoire.

“Le traitement médical qui ne fait que retarder la progression de la maladie, n’est efficace qu’au premier stade lorsque le patient est encore conscient de ses troubles de mémoire, ajoute-t- elle, d’où, l’importance du diagnostic précoce.”

A l’heure actuelle, il n’existe aucun traitement curatif permettant de stopper la maladie mais seulement des traitements non médicamenteux qui permettent d’offrir une meilleure qualité de vie.

“C’est là qu’intervient le rôle des ateliers thérapeutiques que propose le centre Alzheimer. Ces ateliers d’ergothérapie, d’orthophonie et de kinésithérapie visent essentiellement à entretenir la mémoire des patients, à travers une stimulation cognitive et motrice”, selon Ben Jebara.