L’adoption d’un arrêt républicain, pour la mise en œuvre de la loi de finances 2015, par tranches trimestrielles, demeure une alternative, si cette loi et le budget de l’Etat pour l’exercice 2015, ne sont pas adoptés dans un délai ne dépassant pas le 31 Décembre 2014″, a déclaré, à l’Agence TAP, le professeur de droit constitutionnel, Kaies Saied.
En effet, le recours à cette solution est prévue par l’article 11 du décret loi relatif à l’organisation provisoire des pouvoirs publics.
De fait, l’adoption de budget et de la loi de finances 2015 pose problème, à l’approche de la fin l’année, compte tenu de l’interruption de l’action législative dans le pays, en raison des élections législatives (26 octobre courant) et présidentielle (le premier tour est prévu pour le 23 Novembre 2014).
D’habitude, la préparation des projets de la nouvelle loi de finances et du budget de l’Etat commence aux mois de mai et juin. Ils sont adoptés par le conseil des ministres puis transmis au pouvoir législatif avant le 15 octobre, pour être examinés et adoptés dans les délais prévus par la loi organique du budget (date limite, le 31 décembre).
Un calendrier a été adopté dans ce sens, par un conseil ministériel tenu en mai 2014, selon lequel le même délai du 15 Octobre avait été maintenu, mais rien n’a été fait jusqu’à présent.
Pour le professeur Saied, cette situation résulte d’une formulation maladroite dans le 10ème chapitre de la constitution, relatif aux dispositions transitoires notamment l’article 148 qui stipule que l’Assemblée Nationale constituante continue à assumer ses prérogatives législatives, électives et de contrôle…jusqu’à l’élection de l’Assemblée des représentants du peuple.
Il a indiqué que la formule idéale pour cet article aurait été de préciser que “l’ANC demeure active jusqu’à ce que l’Assemblée des représentants du peuple prenne ses fonctions..Ce qui n’a pas été mentionné”.
“Outre l’aspect juridique concernant l’examen des lois par l’ANC, il y a un aspect politique, puique le mandat de l’ANC arrive presque à terme, ce qui soulève des interrogations d’ordre politique et non d’ordre juridique, sur la véritable disposition des députés à examiner des lois importantes, à l’instar de celles relatives au secteur bancaire, à la lutte contre le terrorisme et le blanchissement d’argent ou encore l’examen du budget de l’Etat”, s’interroge Saied.
Il a tenu à souligner qu’il “ne s’agit pas seulement de la loi de finances mais d’un Etat qui a besoin de législation”, relevant qu'”il y a un problème de vide juridique entre la période séparant les élections législatives et celle de la prise de fonction de la nouvelle Assemblée des représentants du peuple, dans la mesure ou celle-ci ne pourrait tenir sa première réunion qu’après l’annonce des résultats définitifs et le parachèvement de l’examen de tous les recours”.
L’économiste et ex-ministre de Finances, Houcine Dimassi a estimé, quant à lui, que le fait d’opter pour une exécution du budget de l’Etat pour l’exercice 2015, sur quatre tranches trimestrielles est “inquiétant”, et aura des répercussions sur l’économie nationale.
“L’Etat doit fixer les dépenses de gestion et de subvention et payer la dette extérieure pour gagner la confiance des investisseurs privés et étrangers”, a-t-il expliqué, soulignant la nécessité « d’accorder plus d’intérêt aux répercussions négatives de la non adoption du budget de l’Etat 2015 sur l’image de la Tunisie à l’échelle internationale ».
D’après lui, cette situation peut même se répercuter sur la notation souveraine du pays, et par conséquent sur les opportunités de financement et d’accès aux emprunts extérieurs, pour mobiliser des ressources financières au profit de l’Etat.
L’économiste a ajouté que le temps limité qui sera consacré à l’examen et à la discussion du budget de l’Etat, durant cette période électorale, entraîne «la prise de décisions hâtives qui ne servent pas l’intérêt suprême du pays ».
Il a critique le fait que l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) n’ait pas encore «adopté des lois vitales pour le pays, telles que la loi sur la restructuration du système bancaire ou celle portant sur la création d’une société de gestion d’actifs, notamment dans le domaine touristique».
M. Dimassi a accusé l’ANC de «contribuer activement à l’entassement et au blocage d’importants textes de loi qui concernent les engagements de la Tunisie vis-à-vis d’institutions financières internationales, en l’occurrence la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International».